La hausse des droits de douane prévue sur l'importation du produit fini de polyster a été amendée au parlement. Les industriels locaux tirent alors la sonnette d'alarme. Le projet de loi de finances 2021 a prévu dans sa monture initiale une augmentation des droits de douane de 2,5% à 17,5% sur l'importation du produit fini de polyester discontinu destiné au rembourrage. Finalement, l'un des groupes parlementaires a présenté un amendement pour annuler cette décision. Cette proposition a suscité l'ire des fabricants locaux du produit qui pour eux, une telle disposition censée leur donner une bouffée d'oxygène a nécessité quatre longues années de pourparlers et de concertation avec la douane, le ministère de tutelle... « Son annulation aujourd'hui, va à l'encontre du principe de protection de la production locale. Ce qui serait en porte-à-faux avec les efforts de maîtrise des importations, notamment à travers la sensibilisation des opérateurs pour ralentir le rythme d'importation et le relèvement des droits d'importation observé dans plusieurs secteurs d'activités (hors zones de libre-échange) en vue de renforcer la protection de la production nationale et encourager la substitution des importations par la production locale, comme stipulée dans le PLF 2021.», commente Abdeslam El Eulj, PDG de Famacolor, l'un des acteurs principaux du secteur de polyster marocain. Il ajoute également que l'enjeu est d'éviter une fuite de devises d'environ 150 MDH par an. « La baisse des tarifs douaniers encourage l'importation des produits polluants (issus du recyclage du plastique), met en péril des investissements marocains au profit des sociétés étrangères et freine la création d'emplois directs et indirects au Maroc. Surtout dans le contexte actuel marqué par la crise de la Covid-19 », prévient t-il. Argumentaire Vs contre argumentaire Outre la protection des entreprises nationales consommatrices de la fibre polyester discontinue de rembourrage, le rejet de la hausse de la taxe d'importation par la première Chambre a été justifié aussi par le fait que l'industrie nationale de la fibre en polyester ne peut pas répondre aux besoins du marché local. Les producteurs industriels locaux contestent cet argumentaire et précisent que l'abrogation favorise l'importation massive de fibres en polyester, produites à partir des bouteilles en plastique recyclées. « Une baisse du droit d'importation profiterait à une poignée d'importateurs, qui prétendent que l'offre importée leur revienne moins chère, quitte à ruiner la production locale, sans tenir compte des enjeux écologiques, de l'impact sur l'environnement et sur le tissu économique marocain du non-traitement des déchets PET, qui jusqu'à présent continuent d'être enfouis, alors que ces plastiques sont des bombes écologiques », alertent les industriels. De son côté l'AMITH, soutient que si le passage des droits de douane à 17,5% est validé, la décision portera un coup dur à toute la filière textile de maison, qui compte plus de 150 entreprises, et qui utilise majoritairement de la fibre vierge et semi-vierge pour le rembourrage». Selon les dirigeants de l'AMITH, il faut donc absolument que les droits de douane restent à 2,5% tant que la production locale n'est pas disponible en quantité et en qualité suffisantes. «Même avec des droits de douane en deçà du seuil de viabilité de l'activité, c'est-à-dire à 17,5%, comme annoncé initialement dans le PLF 2021, Famacolor Casafibre peut à elle seule combler 100% du besoin du marché, sans le nouveau venu Dolidol. Ce qui démontre que la disponibilité, en quantité et en qualité suffisantes, de la production locale est directement liée aux facteurs de production et à la différence de traitement accordé par les Etats notamment ceux asiatiques », explique Abdeslam El Eulj. Ce que recommandent les producteurs De l'avis des producteurs locaux, il convient de revoir cet amendement et passer le taux des droits d'importation de 2,5% à 30%, pour la fibre de polyester discontinue destinée au rembourrage. « A l'instar du secteur du textile, l'industrie du polyester mérite une attention particulière de la part de l'Etat pour être compétitif face à la concurrence étrangère, notamment asiatique (Chine, Indonésie, Inde) », préconisent-ils. Ils appellent aussi la création de la vingtaine de Centres de tri, comme promis par l'Etat depuis 2015, pour faciliter la fourniture de matières premières et bouteilles en plastique aux unités de valorisation. Il est également primordial, selon eux, de contrôler le rendement de ces centres et destiner leurs productions exclusivement aux industriels en règle vis-à-vis des normes environnementales.