Luis Suarez est un attaquant aux multiples facettes, truqueur et buteur, tranquille et intenable. Et après avoir montré son visage le plus sombre en 2010 et 2014, l'avant-centre uruguayen peut prouver qu'il a mûri en huitièmes du Mondial 2018 face au Portugal. Le « Pistolero », on l'aime ou on le déteste! Adulé en Uruguay pour sa rage de vaincre, apprécié à Barcelone pour son flair de finisseur, il est aussi décrié à Madrid qu'en Angleterre, au Ghana ou en Italie pour ses coups bas et sa tendance à disjoncter en plein match. Toute la planète foot se souvient encore de sa cynique main volontaire pour stopper un tir ghanéen sur sa ligne en quarts du Mondial 2010. Et comment oublier sa morsure sur l'épaule de l'Italien Giorgio Chiellini en phase de poules du Mondial 2014, qui lui avait valu une lourde suspension ? Au moment de son transfert à Barcelone pour 81 millions d'euros, en pleine tourmente après son éviction du Mondial 2014, Suarez avait assuré consulter des « professionnels adaptés » pour canaliser son trop-plein d'agressivité. Enfin assagi? « J'ai essayé d'oublier ce match (contre l'Italie) et cette situation. C'était un moment difficile pour moi et je dis à tous les supporteurs de ne pas s'inquiéter, car je ne le referai jamais », avait alors déclaré ce mordeur multi-récidiviste. Les quatre années suivantes ont confirmé cette rédemption: Suarez n'a pris aucun carton rouge direct avec le Barça depuis son arrivée en 2014, seulement une exclusion pour deux cartons jaunes en Coupe du Roi lors d'un choc bouillant contre l'Atlético Madrid en 2017… Pas si mal pour un mauvais garçon! Et il reste sur 25 buts en 33 matches de championnat cette saison, ce qui en a fait le troisième meilleur buteur de la Liga derrière Lionel Messi et Cristiano Ronaldo. Plus deux buts en finale de Coupe du Roi (5-0) contre Séville pour sceller le doublé Liga-Copa. « C'est un attaquant que beaucoup d'équipes voudraient avoir. Nous avons la chance de pouvoir compter sur lui et qu'il nous apporte autant », déclarait en début d'année l'entraîneur barcelonais Ernesto Valverde. « Y'a-t-il vraiment un match où Luis Suarez n'est pas motivé? » Plus discipliné A 31 ans et après avoir fêté sa 100e sélection en Russie, l'attaquant aux 53 buts internationaux s'est peut-être assagi, tout en conservant son vice et son goût du duel. « Il est comme ça, généreux. Il a toujours été comme ça, à Groningue, à l'Ajax, à Liverpool, à Barcelone. Il a toujours eu un grand sens des responsabilités », a expliqué son sélectionneur Oscar Tabarez. C'est cette responsabilité qui l'a poussé à se montrer sous un jour plus discipliné en Russie, avec aucun carton jaune récolté, déjà deux buts en trois matches et un parcours parfait: trois victoires pour l'Uruguay, aucun but encaissé et la première place du groupe A. « Personnellement je suis très content, mais je suis surtout content de poursuivre nos objectifs collectifs », a lancé Suarez, déjà tourné vers son prochain défi: déboulonner le colosse portugais Cristiano Ronaldo, son rival du Real Madrid. Et sans perdre son sang-froid, si possible.