" Nous sommes en 2010 lorsque Youssef El Arabi lâche ces mots. Il enchaînait alors les buts sous le maillot du club de son cœur, Caen, tout juste promu en Ligue 1. Aujourd'hui, malgré les années, les buts à foison, et un statut d'incontournable en sélection comme en Liga, l'attaquant marocain de 29 ans n'a pas tellement changé. "Ce n'est pas cela qui fera de moi une star", confirme-t-il au micro de FIFA.com. "Une star, ça joue dans un grand club, ça dispute des Coupes du Monde et des Ligues des champions. Moi, je me vois comme un modeste attaquant, comme un simple joueur de foot qui a le privilège de faire de sa passion son métier, et qui espère prolonger ce plaisir le plus longtemps possible. Rien de plus." Sauf que les statistiques sont plus flatteuses. Depuis cette saison 2010/11, El Arabi n'a jamais marqué moins de 10 buts par exercice. Cette année, il a même inscrit son nom dans livre d'or de Grenade en devenant le meilleur buteur de l'histoire du club qu'il a rejoint en 2012 après un an passé en Arabie Saoudite, à Al Hilal. En sélection, il affiche un impressionnant ratio but de 15 réalisations en 36 sélections. "C'est pas mal, mais puisqu'on parle de record, je suis encore loin de celui d'Ahmed Faras et ses 42 buts. Et en ne marquant qu'un match sur deux, il va plutôt falloir être patient pour l'atteindre...", plaisante-t-il. "En attendant, je vais me satisfaire de la qualification pour la Coupe d'Afrique des Nations. C'est déjà pas mal !" C'est même très bien. Car le football marocain traversait une période quelque peu difficile depuis quelques temps. Incapable de se qualifier pour une Coupe du Monde de la FIFA depuis 1998, disqualifié d'une CAN qu'ils étaient partis pour organiser, les Lions de l'Atlas étaient à la recherche d'un second souffle qu'ils semblent aujourd'hui avoir trouvé. Victorieux du Cap-Vert (0:1 ; 2:0), alors première équipe africaine au Classement FIFA/Coca-Cola, le Maroc a été la première sélection à obtenir son billet pour la reine des compétitions africaines, organisée en 2017 au Gabon . "La qualité a toujours été là, mais c'est vrai que cela ne se reflétait pas dans les résultats pour des raisons que j'ai du mal à expliquer. Les différents changements de sélectionneur n'ont certainement pas aidé. En tout cas, là nous sommes sur des bons rails. L'arrivée du nouvel entraîneur a été très positive", analyse-t-il faisant référence à la nomination d'Hervé Renard au poste de sélectionneur, intervenue en février 2016. "C'est un entraîneur qui a fait ses preuves en Afrique. Il a gagné deux CAN avec deux pays différents. Au Maroc, il dispose d'un bon noyau de joueurs. On a bien travaillé ensemble. Et cette fois, les résultats s'en sont fait ressentir." Renard et le Maroc peuvent remercier Youssef El Arabi sur ce coup-là. Le natif de Caen a inscrit tous les buts face aux Requins Bleus, deux penalties et un joli coup de tête, et ainsi réconcilié pour de bon la sélection avec ses supporteurs : "Peu importe qui marque. Seules la victoire et la qualification comptent", souligne-t-il. "Se qualifier pour une CAN c'est bien, mais ce n'est non plus pas un exploit ! C'est un devoir. J'espère surtout aller plus loin, remporter ce tournoi ou participer à une Coupe du Monde". Cliché, trophée et fierté Faute de cela, El Arabi se contente d'autres récompenses, comme ce titre honorifique de meilleur buteur de l'histoire de son club, ou comme ces simples clichés post-matchs où il pose avec Zinedine Zidane, Lionel Messi et Cristiano Ronaldo. Des photos qu'il affiche sur son compte Instagram comme on accrocherait des médailles à un palmarès : "Ce sont comme des trophées", avoue-t-il. "J'étais un passionné de foot avant d'en être joueur. Pour moi, croiser des légendes du foot telles que Zidane, c'est tout simplement fantastique. Ces photos sont des souvenirs. Quand je vois un joueur ou un entraîneur qui me plait, qui me fait rêver, quand bien même il a été mon adversaire pendant 90 minutes, pourquoi m'empêcher de faire une photo avec lui ?" Pourquoi pas ! Car El Arabi est en fait resté "ce gamin, trop heureux de jouer en Liga", un gamin qui a accompli son rêve et qui a pour seule ambition de le prolonger : "Quand j'étais jeune, j'étais ramasseur de balle au Stade d'Ornano de Caen. Je m'imaginais être à la place des joueurs. Des joueurs que j'idolâtrais, à qui je suppliais de donner les maillots à la fin des matches, en vain bien souvent", raconte-t-il. "Aujourd'hui, rien ne me rend de plus heureux que d'avoir l'opportunité de donner mon maillot à un ramasseur de balle..." Et de conclure : "Voilà ma plus grande fierté. Ce ne sera jamais celle de rentrer dans l'histoire d'un club ou d'une sélection. Mais plutôt d'être parvenu à devenir le héros de l'histoire que je me racontais en m'endormant, enfant."