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Réinventer le Bien
Publié dans Le temps le 17 - 01 - 2011

Driss C. Jaydane dresse le portrait du Maroc sans concession. Plus de culture et moins de culturel, clame-t-il.
Votre livre Le jour venu traite de la réalité marocaine et de sa diversité ? Si vous deviez résumer cette réalité ?
Je dirais qu'aujourd'hui nous sommes une société «tradi-post-moderne». Cela peut paraître un peu compliqué, ou pas très heureux, comme formule ! Mais c'est une façon de dire que nous devons réfléchir sur ce qui reste de traditionnel chez nous. Comment nous pouvons le vivre, le penser, ou tout simplement le fantasmer, l'imiter, en somme. La société traditionnelle s'intéresse à des individus types : l'imam, le fou, le marchand, le buveur, le mejdoub, la mère, etc. La modernité, c'est, pour nous, la puissance du colon, puissance en armes, en technique, en… mots, pour faire court. Le post-moderne, c'est aujourd'hui l'idée que l'Histoire et le Progrès n'avancent pas ensemble, que les grandes idées des Lumières n'ont pas empêché un siècle de massacre, et, pour faire court, que les discours et l'esthétique se valent et une forme de «paganisme» qui découle de la fin de l'Un, en Occident. Pour une société comme la nôtre, nous héritons du Multiple de l'Occident, mais nous avons l'Un en nous. Nous sommes une société «avec Dieu», pas «sans Dieu». A ce titre, avec l'influence des idées qui fusent du monde, nous sommes confrontés à notre sortie de la tradition, qui n'est pas la sortie de l'Un, mais aussi le choc avec le Multiple venu du monde, notre propre diversité… Il y a de quoi faire, en somme ! Le Jour venu se situe au début de ce tournant, dans les années 80.
La bourgeoisie est-elle uniforme, psychologiquement parlant ? Un bourgeois est-il voué à être comme les autres bourgeois de sa caste ?
La bourgeoisie, chez nous, c'est-à-dire cette frange de la société qui crée des richesses et des idées, existe, mais à mon avis, pas assez comme «idéologie». Nous avons des gens exceptionnels, pris à part. Ce qu'il nous faut, c'est que les esprits se rencontrent, j'ai espoir que cela se fasse de plus en plus.
Décidément, vous semblez déterminé à en découdre avec le mode de vie bourgeois…
J'ai voulu raconter l'histoire d'une chute dans la matière, celle d'individus dont les pères étaient, justement, peut-être nos derniers traditionnels, et qui ont puisé dans la tradition et dans des machineries modernes, - utilisation à des fins de domination de la langue française, modes de vie se voulant modernes en apparence mais générateurs de signes de puissance, de mise à distance, etc. matière à inventer une grammaire du pouvoir assez inédite qui, je dois le dire, fonctionnera encore longtemps dans notre pays. Ceci dit, j'ai décrit des «capitalistes totaux», possédant l'argent et le symbolique, plus que des bourgeois. J'aime profondément les bourgeois, du fait de leur place dans le développement des sociétés.
Comment changer cet état de fait et apprendre l'humilité à des gens qui ont été éduqués ainsi ?
On n'apprend pas l'humilité à des gens qui la considère comme néfaste pour leur compte en banque.
Etes-vous en panne d'écriture ou victime du succès de votre premier roman ?
Je ne suis pas en panne d'écriture. Pour moi, écrire, c'est d'abord inventer le narrateur du livre, c'est ça qui prend du temps, qui demande du travail, dès que celui qui parle existe, qu'il sait parler, qu'il marche sur ses deux pattes, et qu'on peut lui faire confiance, le livre lui est confié pour qu'il le dicte à l'auteur qui doit écouter le désir du livre d'exister. C'est cela, je crois, écrire, c'est une histoire de désir.
De quoi traitera votre prochain ouvrage ? Et quand comptez-vous l'éditer ?
Je crois qu'il raconte un peu ce que je décris dans ma réponse à votre première question. Un moment de transition, un rapport entre un monde qui se rationalise, et un autre qui reste magique, parce que je crois que notre pays a ceci de formidable qu'il est «Le» roman que nous avons à écouter les autres nous dicter. Je pense qu'il sortira en 2011.
Quelle est la nature de l'action menée par l'association «Marocains Pluriels» dont vous êtes l'un des fondateurs ?
Nous voudrions que les générations qui montent puissent accepter l'idée qu'une identité n'est jamais achevée et qu'on n'est pas rivé à ce qu'on est. Les déterminismes, finalement, ne sont pas tant de l'ordre du culturel que du social, là, oui, il y a malheureusement, des forces contraires qui empêchent un individu de sortir de son milieu. Mais, s'agissant du patrimoine culturel, de ce qui nous a été accordé pour donner sens au monde, nous sommes invités à l'Universel. Je crois beaucoup à l'idée d'un lieu de croisement où, par exemple, on susciterait des échanges de pensées, de débats, - car ils ne demandent que cela, Apulée et Kafka, Ibn Arabi et Lévinas, et tous les autres !
Quelle est votre philosophie dans la vie ?
Je crois en Dieu, c'est-à-dire qu'il me faut absolument passer par l'Homme pour le connaître. Il appartient à toute pensée, à toute spiritualité de s'anéantir dans le sacré de l'Etre de l'Homme, en s'attachant à toujours réinventer le Beau et le Bien. C'est à cela que sert la culture.
Que pensez-vous du Maroc actuellement et de l'évolution du système de penser ?
Je vois le Maroc à travers le prisme de mes préoccupations. Je dois dire que nous avons besoin de plus de culture, et de moins de culturel. Nous avons attrapé une sorte de mal post-moderne qui nous fait multiplier les passions, en prenant pour idéologie le principe de l'équivalence entre toute chose. Je suis désolé, mais il y a beaucoup de médiocrité dans cette soi-disant nouvelle movida dont on voudrait nous faire avaler qu'elle serait notre contre-culture parce que, justement elle y puise des signes, des codes, et encore, alors qu'au fond, elle relève plutôt du conservatisme avec T-shirt du Che en prime.
Que conseillez-vous aux écrivains en herbe ?
Avoir des maîtres, morts ou vivants. Comment écrire un bon roman ? Demandez à Mohamed Hmoudane (ndlr : écrivain marocain établi en France) !
Quelle idée avez-vous de l'homme ?
Je voudrais mourir avec le sourire, et laisser à mes enfants ce sourire en héritage. Une façon de dire qu'un homme doit pouvoir compter sur ce qu'il a fait de lui durant une vie, le jour venu.
Qu'espérez-vous à travers l'association «Marocains Pluriels» ?
Que nous puissions retirer le «Pluriels». C'est un pléonasme, mais aussi un symptôme, c'est aussi contre ce symptôme qu'il nous faut lutter, en remettant notre identité au travail.
Propos recueillis par Amine Amerhoun


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