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L'État face à la crise du collectif « MALI »
Publié dans Le temps le 29 - 09 - 2009


Les autorités veulent éviter
un emballement médiatique et politique de l'affaire.
C'est un casse-tête de plus que les pouvoirs publics et les autorités locales de la ville de Mohammedia auraient bien aimé s'en passer en cette fin du Ramadan. Le projet d'organiser un pique-nique champêtre dans les environs de Mohammedia par le «MALI» (Mouvement Alternatif pour les Libertés) né sur le réseau Facebook a créé une polémique médiatique qui réactive les clivages entre laics et conservateurs au sein de la société marocaine. Le débat fait rage sur Facebook, les forums internet et les colonnes des médias, sans impact notable pour l'instant sur l'ordre public. Ce qui relative l'ampleur que la presse a donnée à l'affaire et l'importance du dispositif que l'Etat a déployé pour contenir la crise.
Un dispositif à double détente
Dès l'éclatement de l'affaire, les autorités se sont en effet engagées dans une course contre la montre pour désamorcer la polémique et maîtriser l'emballement médiatique et politique de l'affaire. A cet effet, un dispositif à double détente a été enclenché. D'un côté, l'Etat a donné rapidement des gages aux franges conservatrices de l'opinion publique choquée par la démarche du collectif MALI. Le Palais s'est exprimé via son conseiller royal, Mohammed Moatassim. Ce dernier s'est réuni avec les partis politiques et leur a demandé expressément de prendre publiquement position contre le mouvement. Le PAM de Fouad Al El Himma a précédé la démarche en publiant un communiqué de condamnation. Le conseiller royal s'est par ailleurs exprimé dans les médias pour fustiger le mouvement, jugeant l'initiative dangereuse, nourrie par des mobiles obscurs au nom de la liberté individuelle. Le Conseil des Oulémas de la ville de Mohammedia s'est exprimé à son tour dans le sens d'une condamnation ferme.
Deuxième gage donné à l'opinion publique : la poursuite deux jours après des membres du mouvement au nombre de six. Le mobile de ces arrestations reste confus : violation de la loi ? protection des concernés contre des menaces de mort reçues sur Internet ?. La réaction des autorités ne fait pas l'unanimité. « C'est absolument disproportionné comme réaction. Jeter des gamins en prison pour avoir exprimé un point de vue sur Ramadan sur Facebook est anormal dans un Etat de droit, d'autant que le pique-nique n'a pas eu lieu » proteste-t-on dans l'entourage de MALI. Dans l'entourage des pouvoirs publics, le raisonnement est autre :« Pour l'Etat, il s'agit d'un côté de rassurer l'opinion publique que les fondamentaux religieux de la société sont protégés et de l'autre de sauvegarder la vie des membres du mouvement MALI.. Si par malheur, un de ces jeunes venait de subir quoique ce soit, ce sont les médias internationaux qui accuseront le Maroc de ne pas protéger les minorités et d'être un pays intolérant etc… ». L'enjeu est donc à la fois politique et sécuritaire, les pouvoirs publics ne voulant surtout pas revivre le cauchemar de l'affaire des homos de Ksar El Kébir, même si le parallèle n'a pas lieu d'être selon plusieurs membres de la société civile. Pour anticiper la colère des habitants les plus conservateurs de Mohammedia, une contre-marche devait même être organisée avant l'Aid par le tissu associatif de la ville. En effet, pour certains officiels, l'opinion publique marocaine reste farouchement attachée à la pratique du Ramadan et un tel débat sur les libertés individuelles n'est pas à l'ordre du jour. La religiosité de la société est d'ailleurs attestée par les chiffres d'une enquête rigoureuse menée sur « les valeurs et les pratiques religieuses au Maroc » réalisée par les sociologues Mohammed El Ayadi, Hassan Rachik et Mohammed Tozy et publiée par la revue « Prologues » dans sa collection « Religion & société » dirigée par Mohammed Sghir Janjar de la Fondation Al Saoud. Il en ressort que les Marocains sont fondamentalement religieux et conservateurs : 66% de Marocains font régulièrement la prière, 84% sont pour le hijab, 66% pensent que l'Islam est la solution à tout, 66% sont antisémites, 86% sont contre la liberté du culte, 52% jugent la banque haram et….et 60% ne considèrent pas comme musulman quelqu'un qui ne fait pas le Ramadan !
Les sympathisants de « MALI » donnent de la voix
Dans un tel contexte, les autorités préfèrent s'aligner sur le sentiment dominant de la population en condamnant avec toute la vigueur nécessaire l'initiative du collectif MALI. « Si l'Etat ne multiplie pas ainsi les signes de fermeté, ce sera alors du pain béni pour les islamistes. Le flanc moderniste de la société marocaine est minoritaire comme l'a déjà montré la réforme de la Moudawana et il n'est pas sûr que tous les modernes soient des dé-jeûneurs. L'Etat ne peut pas prendre un risque politique en s'alignant sur les positions des laïcs » explique un observateur politique. D'autant que pour les autorités, l'initiative du mouvement est fort douteuse, marquée du sceau de la « provocation gratuite ». Une source enrage : « Qui interdit à quiconque d'aller à Mc Donald's ou à Pizza Hut ? Toutes les franchises internationales de fast-food sont ouvertes. Dans les hôtels, les touristes sont servis y compris quand ils demandent de l'alcool, alors pourquoi faire de la provocation gratuite ? ». En toile de fond, ces propos rejoignent en fait le concept de « la laïcité masquée » qui prédomine au Maroc. C'est le cas de la consommation de l'alcool, interdite dans les textes pour les Marocains musulmans mais tolérée en réalité. Pour les laïcs, la position des pouvoirs publics est marquée par la lâcheté et l'hypocrisie. Sur Facebook, un groupe de solidarité avec le mouvement MALI est né, les membres du groupe ayant décidé d'afficher publiquement leur profil et leur photo avec un slogan « Au Maroc, manger tue ». Le texte introductif fait office de véritable manifeste politique : « Six militants du Mouvement Alternatif pour les Libertés Individuelles (MALI) ont été arrêtés par les autorités marocaines dans la nuit du 15 au 16 septembre. Le 13 septembre, ce collectif a tenté d'organiser un pique-nique public pour revendiquer l'abrogation du décret 222 du code pénal marocain qui interdit la rupture du jeune pendant le ramadan. Cette revendication s'inscrit dans une volonté plus large d'obtenir la liberté de culte au Maroc. En effet la loi marocaine ne reconnaît que deux religions. Les marocains de confession juive sont soumis à des lois qui leur sont propres et les autres sont automatiquement considérés comme musulmans et traités comme tels par le code pénal. La répression policière que subissent ces militants s'accompagne de menaces de mort quotidiennes de la part de barbus fascistes qui eux bizarrement ne sont pas poursuivis. Ce laxisme n'est autre qu'une façon d'encourager ces personnes à commettre des actes haineux. Il n'y a qu'à lire la déclaration de la très gouvernementale agence de presse marocaine pour s'en rendre compte. Le but de ce groupe est de soutenir les militants de «MALI», et de réaffirmer notre attachement à la liberté de culte, il ne s'agit pas d'inciter les gens à ne pas jeûner, chacun fait ce qu'il veut ». Sur la page du collectif lui-même, les messages de soutien affluent. Les sympathisants qui déclarent publiquement ne pas jeûner réclament un Etat laïc, fustigent la duplicité des pouvoirs publics, l'hypocrisie des partis, la démission des élites et réclame la même audace politique que les intégristes pour dessiner les contours d'une nouvelle société marocaine, laïque et tolérante, à l'image de l'exemple turc ou tunisien. Le Ramadan est également fustigé pour les dégâts économiques qu'il cause, le pays tournant au ralenti. Mais les sympathisants du mouvement déclarent respecter le droit de chacun de pratiquer le jeûne. L'affaire enflamme Facebook et les anti- «MALI» s'expriment à leur tour. Le débat que les pouvoirs publics voulaient éteindre dans l'œuf est désormais lancé. Le sort aujourd'hui incertain des membres arrêtés devient une deuxième affaire dans l'affaire. «MALI», c'est parti pour durer….
Abdelkhalek Zyne


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