Plaire et déplaire. Entre les deux extrêmes le gouvernement Benkirane semble balancer dans la perspective de définir la nouvelle structure des prix de l'électricité. Bien que la décision aurait un coût, sur fond de tensions socio-politiques, la révision à la hausse des tarifs de l'électricité se profile à l'horizon. Interrogé sur la question, lors d'une rencontre avec la presse jeudi dernier au siège de son département à Rabat, Fouad Douiri, ministre de l'Energie, des mines, de l'eau et de l'environnement, garde ses distances en avançant que cela relève de la responsabilité de l'ensemble du gouvernement. Tarification de l'énergie Sur la réserve, ce ministre si communicatif à l'accoutumée, explique que le contrat-programme signé avec l'Office national de l'électricité et de l'eau potable (ONEE) traite entre autres de la tarification de l'énergie électrique. Dans le même sillage, le département du ministre istiqlalien a lancé à la fin 2012 une étude portant sur la structure des tarifs au Maroc. De plus, il a précisé que le prix de vente de ce bien public est largement inférieur à son coût de revient. La volatilité des cours du baril de pétrole à l'international et la flambée des intrants de fabrication de l'électricité observées sur les 5 dernières années pèsent lourdement sur la tarification» a-t-il ajouté. «Quoi de plus probant, surtout lorsqu'on sait que le prix de l'électricité basse tension n'a pas été touché depuis 1996 ?», informe Ali Fassi-Fihri, patron de l'ONEE, bras armé de l'Etat en matière énergétique qui croule sous le fardeau lourd d'un déficit de près de 37 milliards de dirhams. L'ensemble de tous ces éléments doublé à un scénario fort probable de décompensation énergétique plaide pour une possible hausse des prix, bien que le gouvernement Benkirane qui marche sur un terrain miné se veuille rassurant. Les signes annonciateurs de la réforme de la politique de tarification de l'énergie électrique sont bien là. Reste à savoir si la réforme de la caisse de compensation osera toucher cette année à ce dossier placé sous haute tension. En sachant que les contours de la réforme ne sont pas encore définis, le scénario des tarifs sociaux de l'électricité serait, selon cet économiste, d'un apport bénéfique pour les finances de l'Etat. Interpellé sur la nouvelle proposition qui trouve d'ailleurs un échos favorable en France, un haut responsable refuse de se prononcer en raison de la sensibilité du sujet, difficile à appréhender par ailleurs. Conscient du poids de la facture énergétique qui a battu son record en 2012 en s'élevant à près de 104 milliards de dirhams, le Maroc semble déterminer à faire des énergies renouvelables, son nouveau champ de bataille dans le domaine des nouvelles énergies. L'éolien a le vent en poupe La rencontre qui porte sur l'état d'avancement du programme marocain d'énergie éolienne a été l'occasion d'éclairer sur les prix et la rentabilité de l'électricité éolienne. Certes la communication sur la tarification pratiquée fait défaut, mais cette fois-ci Fassi-Fihri fait exception. «Le prix de vente du kilowatt-heure d'un parc éolien comme celui de Taza est moins cher que celui d'une centrale à charbon produisant de l'électricité », lance-t-il. Suite aux pressions exercées par la presse, il finit par céder en annonçant que le prix sortie usine du kilowatt-heure du parc éolien de Tarfaya est estimé à 64 dirhams. Il a ajouté que « les prix de l'éolien sont compétitifs en raison de l'évolution technologique qui fournit des machines plus grandes et plus performantes». En outre, la force du vent alliée à l'altitude contribue également à rendre les investissement dans l'éolien, attractif. Mais ce n'est pas la seule raison, bien que Fassi-Fihri esquive. Il faut savoir que le prix de rachat de l'électricité d'origine éolienne est évalué à deux fois son prix de revient ; Soit une manne financière à ne pas rater. «L'autre avantage de cette source énergétique réside dans la facilité de son stockage», souligne Douiri. Il assure que la sécurité d'approvisionnement doit s'adapter aux fluctuations de la demande mais aussi de la variation de la production d'énergie. «La stratégie éolienne permet au pays de se doter d'une taille critique à même de répondre favorablement aux besoins de la croissance économique. Si elle permet de maximiser les impacts économique et énergétique, elle favorise également une meilleure intégration industrielle », précise-t-il. L'intégration industrielle dont parle le ministre est le fruit de la nouvelle loi 13-09 introduisant des innovations majeures sur le chapitre de la production privée d'électricité. Dans la liste des dispositions, «l'ONEE consent à la vente d'électricité par les investisseurs à ses meilleurs clients et l'achat de l'excédent en cas de surplus de production ». Il est stipulé également que «le transport de l'électricité ER se fait vers les clients (en contrepartie d'un timbre de transport)». Corroborant les propos du ministre, Fassi Fihri fait savoir que c'est la première fois que son office exige aux entreprises adjudicataires d'appels d'offres internationaux de livrer un certain niveau d'intégration industrielle, en plus du tarif bas, comme un des critères de sélection du développeur. Une condition qui intervient suite à la libéralisation du secteur. Toutefois, il est utile de souligner, que cette condition ne concerne que les énergies renouvelables. Le parc éolien de Tarfaya est révélateur à ce titre. il met en concurrence l'ONEE et les investisseurs privés et implique pour la première fois les banques nationales. Le développeur formé par le Consortium IP/Nareva, filiale du groupe SNI a levé un emprunt de 4 milliards de dirhams auprès des établissements de crédits d'AttijariWafa, Banque Populaire et BMCE. Selon le département de l'énergie, la validation du projet dans le cadre du MDP est en cours, mais l'accord technique est déjà donné. Pour rappel, le coût du projet dont l'accord de partenariat public-privé signé au mois d'avril 2012 s'élève à 5,1 milliards de dirhams. La puissance installée et le productible annuel se situent respectivement 300 MW et environ 1 000 Gwh, au moment où la vitesse moyenne de vent est de 9 mètres par seconde. La mise en service effective est prévue pour juin 2014. Demande de 1 500MW Douiri rassure. Pour lui les travaux des projets éoliens, ceux programmés ou en cours de réalisation, vont bon train. «On a reçu nombre de demandes pour la production de 1 500MW», se félicite -t-il. Parmi les programmes éoliens ambitieux de la stratégie nationale on peut noter celui des parcs éoliens de 850MW. D'un coût global de 1,7 milliard de dollars, ce projet englobe les parcs de Tanger II (100 MW), Tiskrad ( 300 MW), Boujdour (100 MW), Midelt (150 MW) et enfin Jbel Al Hadid (200 MW). Il a permis jusqu'à présent la levée d'une dette de concession par l'ONEE de l'ordre de 201,7 millions de dollars auprès de la Banque africaine de développement (BAD). Les fonds, en cours de mobilisation, sont répartis entre la banque allemande KfW (95 millions de dollars) et la BEI(162 millions). Un autre financement existe, d'un total de 18,7 millions de DH contracté dans le cadre du projet européen Facilité d'investissement pour le voisinage (FIV). Le patron de l'ONEE conclut que «le complément du financement sera assuré par le partenaire stratégique qui sera désigné à l'issue de l'appel d'offres»