Il ne suffit pas d'avoir une stratégie de développement de l'innovation, il faut en avoir les moyens. Mieux encore, il faut avoir des ressources humaines qui innovent. En un mot, une vraie culture d'innovation. Au Maroc, en Afrique en général, et dans l'état réel des choses, peu de facteurs laissent augurer de bonnes perspectives pour la propriété intellectuelle et l'innovation technologique. La langue des chiffres en atteste largement. En effet, sur 155.900 brevets d'inventions (de par le monde) 486 ont été déposés par le continent noir en 2009. Notre pays est placé au troisième rang après l'Afrique du Sud et l'Egypte. «Nous n'avons pas encore mis les pieds dans le système de l'innovation», tient à souligner Adil El Maliki, directeur général de l'Office marocain de la propriété intellectuelle (OMPIC), à l'occasion du séminaire régional africain sur le transfert de technologie basée sur l'utilisation stratégique de la propriété intellectuelle qui se poursuit jusqu'au 30 avril. Pourquoi stratégique ? Le mot stratégie renvoie justement au partenariat public privé. Une telle coopération et un tel partenariat impliquent nécessairement la mise en vigueur d'une approche pragmatique et «non dogmatique» des questions de propriété intellectuelle, qui passe forcément par un rapprochement et une forte communication entre l'entreprise et l'université.` La contribution de ces deux derniers dans le système de l'innovation au Maroc reste très timide. Ainsi, le nombre de dépôts de brevets d'invention de «l'innovation organisée» a atteint 46 brevets. «Il est inconcevable que les inventeurs individuels déposent plus que les universités et les entreprises», déplore El Maliki. Ceci dit, il faut donc s'orienter vers une meilleure valorisation de la recherche ainsi que des actions de proximité avec le monde de l'entrepreneuriat. Cela passe inéluctablement par l'identification des besoins des entreprises en matière d'innovation et de création. Seule trajectoire pour rendre l'économie plus compétitive surtout dans ce contexte de mondialisation et d'ouverture sans cesse croissante des frontières. Autrement dit, le tissu économique national est appelé à se doter d'une forte capacité d'innovation et de création, via de nouveaux produits et process, alors que le gap technologique entre pays développés et pays non développés continue de se creuser. L'utilisation stratégique de la propriété intellectuelle garantit également la sécurité alimentaire, comme l'a bien noté Herman Ntchatcho, directeur principal de la coopération pour le développement, au bureau africain de l'organisation mondiale de la propriété intellectuelle. Aux yeux d'El Maliki, il faut donc trouver un moyen pour pallier ce gap. Là c'est une autre question qui met sur la sellette un point d'une importance cruciale ayant trait à la dépendance (au sens large du terme) des pays du Sud envers les pays du Nord. Toutefois, cet état de fait n'est pas une fatalité. L'expérience singapourienne est un exemple éloquent. Elle s'appuie sur un principe qui consiste, entre autres, à motiver les chercheurs à commercialiser leurs inventions et à bénéficier, en contrepartie, des retours sur investissements. Selon, Jasmine Kway de l'université nationale de Singapour, l'Etat a alloué un budget de 5 milliards de dollars à l'activité Recherche & Développement, ce qui représente près de 3,5% du PIB.