L'attente se fait longue d'autant plus que la tâche se révèle ardue. Les Tunisiens attendent toujours la formation d'un gouvernement de technocrates annoncé par le Premier ministre, Hamadi Jebali, la semaine dernière. Déterminé à aller jusqu'au bout, Hamadi Jebali, issu du parti islamiste Ennahda enchaîne les consultations. Il a indiqué lundi qu'il attendait les réponses des partenaires politiques. Le chef du gouvernement a également rencontré plusieurs ambassadeurs en poste en Tunisie dont notamment celui du Royaume-Uni, de la Turquie, d'Arabie saoudite et de l'Union européenne. L'objectif était, entre autres, de les informer des derniers développements de la scène politique nationale. Selon le chef de la diplomatie tunisienne, Raffik Abdessalem, qui faisait partie de la délégation du chef du gouvernement, Hamadi Jebali a souligné lors de ces rencontres, l'impératif de trouver un consensus national pour relever les défis qui s'imposent. Mais son initiative a du plomb dans l'aile puisque le Premier ministre manque de soutien. Son propre parti, Ennahda, n'est pas en phase avec son projet. Toutefois, Ennahda a proposé lundi, la formation d'un gouvernement de « compétences politiques » plutôt que nationales comme le souhaite Hamadi Jebali. Le porte-parole du mouvement a indiqué lundi la volonté d'Ennahda d'élargir les consultations à d'autres partis ouverts au dialogue. Un gouvernement de compétences politiques De son côté, le parti du Congrès pour la République (CRP), membre de la coalition au pouvoir, a aussi rejeté l'initiative du chef du gouvernement, renouvelant ainsi sa confiance à Ennahda. « Nous avons décidé de geler notre décision de retirer nos ministres du gouvernement mais si dans une semaine nous ne voyons aucun changement nous quitterons le gouvernement définitivement », a déclaré à la presse le chef du Congrès pour la République (CPR), Mohamed Abbou. Le CRP explique sa prise de position par la décision du parti islamiste de satisfaire ses exigences. Le CPR, parti du président tunisien, Moncef Marzouki, demande depuis longtemps le départ de deux ministres de premier plan d'Ennahda, ceux des Affaires étrangères et de la Justice. Cependant Ennahda n'a pas encore confirmé pour le moment leur limogeage. « Nous sommes contre un gouvernement de technocrates car cela permettrait le retour des figures de l'ancien régime de Zine El Abidine Ben Ali », a affirmé le porte-parole du Congrès pour la République. En revanche, le troisième parti de la coalition au pouvoir, Ettakatol, qui est du centre-gauche, a apporté son soutien à l'initiative. Hamadi Jebali peut donc compter sur le soutien de l'opposition à défaut de celui des islamistes. Pour rendre son action plus forte, l'opposition tunisienne tente de faire front commun. Un pas positif En effet, cinq partis dont notamment Nidaa Tounès, le Parti Républicain et le Parti socialiste ont annoncé lundi la constitution d'un front politique et électoral. Dans un communiqué commun, les représentants de ces formations politiques ont précisé que « ce front s'emploiera à unir les efforts pour servir l'intérêt supérieur de la nation et contribuer à la réussite de la transition dans le cadre d'une feuille de route consensuelle et précise ». Le mouvement Nidaa Tounès voit en l'initiative du Premier ministre, un pas positif sur la bonne voie, précisant que la formation d'un gouvernement d'indépendants est une de ses revendications depuis sa création. Même son de cloche du côté du parti républicain. Pour Maya Jribi, la proposition du chef du gouvernement est positive pour le pays et permettra de rétablir la stabilité en vue de prévenir la violence. Par ailleurs, les cinquante-huit députés de l'opposition, qui avaient annoncé la suspension de leurs activités à l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) suite à l'assassinat, il y a une semaine, de l'opposant Chokri Belaïd, ont réaffirmé lundi leur volonté de poursuivre leur décision jusqu'à la tenue d'une séance plénière pour débattre de la situation politique dans le pays en vue de fixer un calendrier clair pour les mois à venir. Mais en attendant, la crise continue de battre son plein.