Les débats autour des fonds d'investissement et des activités qui leurs sont liées ont souvent lieu à Casablanca et rarement à Rabat. Normal, car c'est dans les capitales économique et administrative que se concentre l'ensemble de l'activité financière du pays. Dans d'autres villes, c'est un concept dont on ignore encore les tenants et les aboutissants Pourtant, Oujda et la région de l'Oriental ont choisi de ne pas rester à l'écart de ce secteur en pleine croissance. L'initiative royale, lancée en 2003, de créer un fonds d'investissement dédié au développement des PME de la région, est depuis deux années une réalité qui prend forme à travers des actions concrètes. Microchoix et Monlait préparent déjà leur introduction en Bourse pour les mois à venir. Le fonds d'investissement régional de l'Oriental a dressé le bilan, le 20 avril à Oujda, de sa deuxième année d'activité. En effet, depuis son lancement en 2007, le fonds a réalisé deux investissements pour une mise globale située dans une fourchette de 35 à 45 millions de DH. La première participation a été prise dans le capital de Microchoix, un distributeur de matériel informatique et électroménager dont le siège est à Oujda, mais dont les magasins sont installés à Casablanca, Fès, Meknès et même à Paris. Une structure qui a débuté, en 2003, comme un site de vente en ligne de matériel informatique et qui compte aujourd'hui 7 magasins répartis sur l'ensemble du territoire. Le fondateur de Microchoix est Khaled Saâdi, un MRE revenu de France pour créer sa structure au Maroc. Le deuxième placement a été réalisé dans une unité de production laitière dont le siège est à Berkane. La société baptisée Monlait appartient à la famille Messaoudi. Ce sont trois frères qui sont retournés de Belgique pour investir dans leur région d'origine. La distribution de leur produit se limite actuellement à la région de l'Oriental. S'ils se sont alliés au Firo, c'est pour développer une ferme laitière de 250 têtes dans l'agropôle de Madagh. Le projet porte aussi sur l'extension de l'unité industrielle pour multiplier la production. Un investissement de l'ordre de 30 millions de DH. Comparés aux chiffres faramineux que les fonds d'investissement annoncent à Casablanca ou Rabat, ces projets paraissent modestes. Mais dans une région longtemps laissée à l'abandon et connue pour la contrebande et le narcotrafic, de tels projets lui insufflent une nouvelle dynamique. Celle de l'investissement transparent et créateur d'emplois et de richesse. Pour rappel, le fonds porte sur une enveloppe globale de 300 millions de DH. Les fonds déjà engagés représentent donc moins de 10% du total. A première vue, un tel engagement paraît faible. D'autant plus que la durée de vie du fonds est limitée à 10 ans. De ce fait, le montant à investir doit être déboursé durant les 5 premières années. «Pour que les investisseurs puissent adhérer à la logique du capital investissement, il fallait d'abord qu'ils constatent le succès d'expériences concrètes», précise Abdelkarim Mehdi, directeur général de la société gestionnaire du Firo. Ce dernier souligne que même les modes de financement classiques ne sont pas monnaie courante dans la région. Mehdi confie d'ailleurs que bon nombre de PME locales ont même refusé de le rencontrer pour parler d'un éventuel partenariat. D'ailleurs, une grande partie des entreprises dans l'Oriental ne disposent même pas de lignes de financement bancaires. Elles évoluent dont d'un seul coup vers le capital investissement. Mieux encore, Microchoix et Monlait préparent déjà leur introduction en Bourse pour les mois à venir. Le constat du succès des deux premiers investissements semble avoir porté ses fruits. Lors de la cérémonie de mardi, le Firo a annoncé la réalisation imminente de deux nouveaux placements. Le premier concernera Midi Peinture, un opérateur oujdi qui distribue ses produits sur les trois quarts du territoire national. Le second porte sur une participation dans le projet de complexe industriel, dans la région de Zaïo. Il s'agit de plusieurs unités de production de biscuiterie chocolaterie réalisées par la société La Belle Pâtisserie pour un montant de 180 millions de DH. Le DG de la société de gestion nous confie que les discussions sont en cours pour une dizaine d'autres placements. «Nous attendons que les PME viennent elles-mêmes nous chercher car, jusqu'à maintenant, c'est nous qui faisions le premier pas», précise Mehdi qui assure au passage que la somme levée sera placée en totalité dans les cinq ans à venir. Voilà une expérience qui montre que la dynamique d'investissement peut bien être installée même dans les régions les plus reculées. Reste à savoir si elle sera limitée uniquement à l'Oriental. Pour lancer la dynamique, il faut au moins 15 autres fonds répartis sur l'ensemble des régions du pays. Dans le Souss, il n'y en a actuellement qu'un seul et il n'a encore réalisé aucun placement.