Décidément, chacun y va de son couplet ! La rentrée, scolaire ou politique, n'a pas encore fini de commencer qu'elle s'annonce d'ores et déjà mouvementée et accapare les esprits. Elle obéit aux rituels : celui de l'effet d'annonce, celui de la mobilisation des langages. Au milieu d'un flot de déclarations, les unes plus surprenantes que les autres, il y a surtout le faisceau d'interrogations terre-à-terre que ne cessent de formuler les citoyens et qui interpellent en même temps les responsables. De quoi sera fait demain ? Entre la cherté de la vie qui s'est déclinée un certain jour après la hausse du prix de l'essence et la rentrée scolaire qui ne dément pas le cycle Le gouvernement dirigé par Abdelilah Benkirane est confronté à d'énormes défis pour cette rentrée. de la hausse, comment se comporte le pays ? Prosaïque, aussi simple qu'il n'y parait, la question est de savoir maintenant ce que les prochains mois et semaines nous réserveront, si bien entendu le prix du pain ne bougera pas, ou plutôt si le pain ne manquera pas avant de nous renvoyer à la date abyssale de 1981, qualifiée pour notre plus grande honte « d'émeute du pain » , si ensuite la Caisse de compensation sera restructurée, refondue de fond en comble, ou simplement supprimée, si enfin le chômage sera attaqué et la croissance relancée ?…La crise que nous subissons n'explique pas , forcément, l'attentisme qui est en vedette, récupéré surtout par la dérive discursive et le triomphalisme verbal. L'économie d'abord Ces questions taraudent les esprits raisonnables. Ceux qui tentent et s'efforcent d'échapper à l'emprise de la politique qui, aujourd'hui comme jamais auparavant, semble prédominer avec ses logomachies et ses manies. Le 6 août dernier, en plein mois de Ramadan, alors qu'il s'apprêtait à tenir un séminaire avec ses collègues du gouvernement, Nizar Baraka, ministre de l'Economie et des finances, mettait en garde contre la tendance, fâcheuse selon lui, de tout sacrifier sur l'autel de la politique politicienne et nous conviait à un redéploiement vers l'économie qui est au Maroc d'aujourd'hui ce que l'obligation de résultat est au gouvernement. En d'autres termes, affirmait-il, il faut arrêter de politiser à outrance le débat national, mettre en terme à cette logorrhée de phrases, les unes plus « assassines » et meurtrières que les autres et passer aux choses sérieuses ! Membre du gouvernement de coalition, et surtout représentant du Parti de l'Istiqlal au sein de ce même gouvernement, architecte de la politique économique et financière du pays, Nizar Baraka ne croyait pas si bien dire. Son appel survenait au milieu d'une tempête de petites phrases et d'une valse d'allusions où, plus d'une fois, le cocasse le dispute au fanfaron, suscitant l'hilarité des uns et la consternation des autres ! Des enjeux de taille Si la litanie habituelle est de dire que « gouverner, c'est prévoir », à présent, elle est de soutenir aussi que « gouverner, c'est choisir » ! Or, le choix global ne semble pas aussi simple. Quand bien même le conseiller en titre du Chef de gouvernement, Ahmed Baha, rappelle aux jeunes du PJD la nécessité de penser le changement en termes de réforme et non de révolution, la réalité économique et sociale interpelle chacun à assumer ses responsabilités. Or, la réalité dont il est question ici imposera d'elle-même le besoin de visibilité qu'il faut donner aux choix et aux options. De ceux-ci découlera la méthode. D'autant plus que la crise, dont beaucoup soutiennent qu'elle n'est pas une fatalité, sera au rendez-vous dans les prochains mois, avec beaucoup plus d'acuité et moins d'indulgence. Le prix de pétrole ne cessant d'augmenter comme le prévoient les experts moins exposés aux rêves, la consommation intérieure augmentant à un rythme effarant alors que les salaires restent bloqués et des usines fermées, les investissements évoluant au ralenti, la productivité de manière générale frappée de plein fouet, les banques au plus mal parce que les liquidités sont en panne et le circuit de l'argent en difficulté, ce ne sont-là que quelques signes du sombre tableau que notre économie décline en cette rentrée. Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour comprendre que désormais la rentrée sera placée sous le signe d'un défi majeur, économique et social. Autrement dit, sous l'effet de la pression de la crise. La « politique politicienne » , le miroir aux alouettes et des grandiloquences devraient être renvoyées aux calendes grecques, pour un moment en tout cas. Une grande partie des secteurs d'activités attendent impatiemment leur propre réforme, et l'éducation nationale – pierre angulaire du système éducatif – n'en est pas le moindre, au regard des piètres résultats enregistrés depuis des années, illustrés par la déscolarisation rampante qui menace nos écoles, les archaïsmes et le déficit que le Roi, tout à sa lucidité et sa volonté de changer les choses, a dénoncés lors de son discours du 20 août. Là aussi, outre la restructuration en profondeur, c'est la confiance qu'il faut rétablir...La même chose pour la santé qui est « malade » de ses propres dysfonctionnements et qui attend une reprise en mains nécessaire. La rentrée pourrait être un nouveau départ, à la fois pour les projets et les initiatives, pour relancer l'effort et l'adhésion sur des bases tangibles, afin de redonner à chaque citoyen, quelle que soit sa posture, la confiance nécessaire et le sentiment d'aller de l'avant. * Tweet * *