Le 16 août 2012, à l'âge de cinquante-neuf ans, la princesse Lalla Amina est décédée à Rabat, après qu'elle eut parcouru la moitié du siècle passé dans une trépidante existence, partagée entre le devoir familial, l'engagement social et, ce qui constitue sans doute l'un des patrimoines majeurs pour notre pays, la réhabilitation du cheval dans sa splendeur d'autrefois... Feue Lalla Amina, présidant le 6 mai à Rabat la cérémonie de remise des prix aux vainqueurs de la 5e édition de la Course féminine de la Victoire. Dans un jardin aux caractéristiques tropicales, visage amaigri et émacié, un homme, et non des moindres est assis à même le sol, jambes croisées...Une petite fille dont le peuple marocain, meurtri de chagrin, vient de découvrir les premières photos officielles, parvenues de la lointaine Madagascar...est blottie dans ses genoux, le regard porté vers le ciel. Lui, c'est le « Sultan Mohammed V », comme on avait coutume de l'appeler. Elle, c'est la princesse Lalla Amina, dernier enfant , née dans ce décor de savane et de tropiques, six mois après le « coup de force » du 20 août 1953, alors que le Roi et sa petite famille, éloignés de leur peuple, purgeaient un exil forcé qui durera quelque vingt-huit mois. Elle sera l'icône du royaume agressé et d'un peuple demeuré orphelin du 20 août 1953 au 16 novembre 1955... Cinquante-neuf ans après, le 16 août 2012, la princesse Lalla Amina est décédée à Rabat, après qu'elle eut parcouru la moitié du siècle passé dans une trépidante existence, partagée entre le devoir familial, l'engagement social, pour la femme, les enfants, les handicapés et, ce qui constitue sans doute l'un des patrimoines majeurs pour notre pays, la réhabilitation du cheval dans sa splendeur d'autrefois... « Lalla » ! L'appellation procédait d'une triple dimension : la noblesse, la simplicité et une irréversible affection. Ces trois paradigmes, Lalla Amina les incarna tout au long de sa vie de princesse militante, colletée avec les préjugés et les tabous d'une société qui marginalisait ses handicapés, ses femmes, voire ses enfants. Jusqu'à son dernier souffle, elle en fera une règle de vie, miroir reflété comme un immense rayon lumineux sur les autres. La princesse « malgache » avait incarné le devoir dès sa tendre enfance, à l'ombre d'un père dont la mansuétude et l'intransigeance à la fois, n'avaient d'égale que sa volonté de construire son pays, de l'élever au rang d'une nation moderne et authentique. Et surtout de donner à ses enfants l'éducation nécessaire qui les prépare à de hautes responsabilités. Pas plus que deux ans après la Libération, il l'avait nommée présidente de la Ligue marocaine pour la protection de l'enfance (LMPE)... À partir de novembre 1955, elle avait pu vivre d'ores et déjà les moments les plus intenses de cette phase de l'histoire du Maroc. Jeune témoin privilégié, elle assistait ainsi au processus de négociations de la Celle-Saint-Cloud, à proximité de Paris, que son père menait âprement avec le gouvernement français, alors dirigé par Antoine Pinay, à la proclamation de l'indépendance le 6 novembre 1955 et au retour triomphal de la famille royale au Maroc dix jours plus tard, enfin à l'instauration des premiers jalons de l'Etat indépendant, et des défis multiples qui attendaient ce Maroc, sorti des limbes coloniales et propulsé sur la voie de la difficile démocratie et du progrès. Elle vivra douloureusement le décès de son père, feu Mohammed V en février 1960 alors qu'elle n'avait que six ans, son frère aîné, feu Hassan II la prenant sous sa protection, assurant son éducation et sa formation. Les études primaires et secondaires accomplies au Collège royal de Rabat, elle s'intéressera à la philosophie et aux sports, davantage attirée par la course à cheval, le noble mais rude sport équestre dont elle sera à jamais l'incomparable dirigeante et auquel elle redonnera ses lettres de noblesse. L'image n'en a jamais dérogé, ni subi une plissure : c'est une toute jeune cavalière de premier plan qui, à la stupéfaction de tous, s'envolait sur les obstacles équestres et arrachait les prix, c'est aussi une passionnée du cheval qui, non contente de réhabiliter une tradition équestre ancestrale, créera une écurie privée, s'adonnera à l'élevage et l'éducation des chevaux, fera des générations de jeunes cavaliers et fera hisser les couleurs du royaume au-delà des frontières nationales. Outre le titre de présidente de la Fédération royale marocaine des sports équestres (FRMSE) qu'elle assumait depuis 1999, elle avait lancé et présidé aux destinées de la « Semaine du cheval » qui se tient chaque année à Rabat et qui, outre, offre à la capitale et au Maroc, une vitrine de promotion inestimable qui réunit un public international, lui permet de perpétuer l'héritage national en matière de science et de civilisation du cheval. Si la princesse défunte avait une prédilection affichée, accomplie aussi en matière de sports – et pas seulement équestres – , son champ d'action, autrement privilégié si l'on peut dire, est demeuré le combat social mené sur plusieurs fronts de la précarité. Un militantisme pour la protection de l'enfance Elle fut une avocate infatigable de la cause des mères de famille, ensuite une militante active de la protection de l'enfance, irrémédiablement fidèle à la mission initiale que son père lui assigna. De la même manière, elle s'était totalement investie dans la lutte en faveur des handicapés, physiques ou mentaux, pour lesquels elle n'avait de cesse de donner le meilleur d'elle. A ce titre, elle a assumé la présidence d'honneur de l'Association « Al Hadaf », créé ensuite le Special Olympics Maroc, dont elle élargira à la fois l'action et les compétences à la région du Maghreb et du Moyen Orient...Ce qui lui vaudra ensuite le privilège de présider la 2e session des Jeux du Special Olympics de la région du Moyen Orient et d'Afrique du Nord, organisés à Rabat en 2000. C'est à ce titre, et pour saluer aussi son dévouement, le Prix du Spécial Olympics International lui a été décerné, de la même manière qu'elle elle a reçu dans la foulée le Woman Trophée Sport du Comité international olympique(CIO). Nul n'oubliera la silhouette discrète d'une femme, dont la volonté de rester modeste et quasi effacée, n'a d'égale que sa force de caractère, sa volonté d'apporter aux autres, à tous ceux qui souffrent, soutien et présence, enfin de faire don de sa personne...pour leurs causes ! * Tweet * *