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Armen Lubin et Martin Melkonian, poètes du souvenir blessé
Publié dans Le Soir Echos le 23 - 07 - 2012

Ce fut une vraie joie pour les amateurs de grande poésie que la réédition en 2010 de trois des grands livres d'Armen Lubin Le passager clandestin, Sainte patience et Les haute terrasses en un seul volume dans la collection de poche Poésie chez Gallimard. Le préfacier Jacques Réda est lui-même un des plus subtils poètes d'aujourd'hui. Justice était enfin rendue à une voix inimitable. En effet, lire pour la première fois Armen Lubin – chance que j'eus à la fin des années soixante- c'est rencontrer quelqu'un dont l'œuvre vous devient aussitôt inoubliable. Envoyé spécial permanent de la poésie française à l'hôpital, Armand Lubin qui aurait eu cent ans en 2003, traversa des épreuves innombrables et les chanta sur des pages de cahier plutôt que de les enfouir dans le ressentiment. Son attention à tous était prodigieuse et il obtint celle de ses confrères. Ainsi, le romancier et critique Jean Freustié notait-il : « Ses poèmes, Armen Lubin, si on le laissait faire, il les remanierait fin. (...) Le « mot » c'est la seule chose avec laquelle il ne plaisante pas. Là est son terrain de bataille. Pour le reste il est tout sourire, comme s'il avait trouvé sa juste place ».
L'épouse de Jean Freustié, Christiane, émue par une conférence que je prononçai en juin 2000 pour célébrer la mémoire d'Armen Lubin, me donna une petite poupée en bois qui lui venait du poète. A mon tour, je l'offris et elle figure aujourd'hui dans le patrimoine ludique de la famille du poète et journaliste marocain Jamal Boudouma. La poésie, n'est-ce pas la meilleure de nos aspirations ? Lisez Armen Lubin : « Personne ne sera réellement appauvri/ Par le spectacle de la mort / si ce n'est un jeune homme au profil d'ange/ Pur jeune homme qui prend son or et l'échange / Contre de la petite monnaie, une monnaie locale./ C'est une monnaie vile que les mensonges de l'hôpital/ Qui s'échangent d'un lit à l'autre, qui ont cours/ Qui déchiquettent tout, même l'innocence sans détour / Et le mort reste pris dans ce drap en loques / Le mort le plus mort reste un peu dans l'équivoque ». Ma passion pour l'œuvre d'Armen Lubin n'a pas vraiment trouvé d'équivalent au fil de mes lectures mais, quelquefois, un livre surgit qui me semble parfaitement digne du splendide héritage que constituent ceux d'Armen Lubin. Voici donc que Martin Melkonian dont les trois premiers ouvrages Le Miniaturiste (Seuil, 1983), puis Désobéir et Loin du Ritz inauguraient un parcours singulier nous donne avec Arménienne (Maurice Nadeau 2012) son livre le plus médité et le plus lumineux. C'est un livre de fils comme l'était Mama d'Abdemajid Benjelloun. Si le poète slaoui a interrogé son lien insécable à sa mère dans une prose lyrique, la manière de Martin Melkonian est celle d'un peintre qui nous restituerait avec un soin d'enquêteur le nuancier des couleurs des âmes. Il se montre appartenant à la lignée d'Armen Lubin et peut raconter Victoria, sa mère, recopiant un passage d'Histoire d'un enfant (Histoire de mes idées) d'Edgar Quinet. Melkonian « substitue, nous dit-il, le présent de l'indicatif – le présent éternel- à l'imparfait de la narration » et cela donne : « A table, elle met tous les jours la place du fils absent. Et même, le jour anniversaire de sa naissance, elle sert l'absent. Elle met les morceaux les plus fins sur l'assiette de l'absent devant laquelle il y a sa photographie et des fleurs ». Il est toujours merveilleux de pouvoir penser qu'un poète disparu semble lire avec nous un auteur d'aujourd'hui. Et tout au long de la lecture du récit du séjour à Istanbul de Martin Melkonian, c'est Armen Lubin qui nous semble lire les pages que nous découvrons et s'en émouvoir avec nous. Tel est le prodige auquel parvient Melkonian dans Arménienne : universaliser le plus singulier de son récit intime, éclairer l'obscur des tourments. Son pouvoir de résurrection des vies aimées est comparable au génie poétique d'Armen Lubin. Ainsi se révèlent-ils tous deux à nous comme deux maîtres du souvenir. On suivrait volontiers Martin Melkonian « chez ces épiciers fraternels qui prétendent que les clients fréquentant leur boutique vivent plus longtemps que ceux qui négligent d'en franchir le seuil et de succomber au déballage gourmand. » vous avez dit épicier ? Ami d'Armen Lubin, le poète et romancier Henri Thomas me racontait en quel dénuement s'était trouvé l'auteur de Passager clandestin, de Sainte Patience et de ce récit inoubliable qu'est Transfert nocturne. Le plus émouvant des lecteurs d'Armen Lubin, c'était un épicier arménien qui, avec son épouse, dans son village de France, faisait cotiser pour Armen le ban et l'arrière-ban de sa clientèle, tous lecteurs du poète et conteur qu'ils admiraient .

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