Un Collectif syndical des travailleurs immigrés se prépare à voir le jour. Date de naissance annoncée : dimanche 1er juillet à Rabat. C'est à l'ODT que le Collectif sera affilié pour revendiquer la régularisation du statut de travailleurs étrangers. Ali Lotfi a expliqué que la nouvelle centrale syndicale a pour but de protéger les Subsahariens victimes de surexploitation, d'accidents de travail et de traitements inhumains. Il y a trois semaines, un Subsaharien travaillant sur un chantier de construction a été victime d'un accident, lorsqu'un toit en béton s'est écroulé sur lui. Grièvement blessé à la tête, il n'a pas été transporté aux urgences, mais plutôt vers le lieu de sa résidence, à la demande de son patron. Résultat ou fatalité : la victime est décédée chez elle, suite à une hémorragie, dans l'anonymat et le dénigrement absolu. Le drame que raconte le secrétaire général de l'Organisation démocratique du travail (ODT), Ali Lotfi, justifie amplement, à ses yeux, la volonté de cette centrale syndicale d'ouvrir ses portes aux travailleurs immigrés. « Nous ne voulons pas que d'autres Subsahariens décèdent dans les mêmes conditions, qu'ils soient enterrés et leurs drames oubliés. Ils sont victimes de la surexploitation, d'accidents de travail et de traitements inhumains face auxquels il faut désormais crier halte ! », s'exclame-t-il, indigné. Collectif ODT En riposte à cette situation, l'ODT annonce la tenue, dimanche 1er juillet à Rabat, du congrès constitutif du Collectif syndical des travailleurs immigrés au Maroc sous le slogan « Nous aussi, ... nous avons des droits... ». Une mesure d'urgence qui donnera naissance à une nouvelle organisation affiliée à l'ODT et dont la mission sera principalement de sortir cette catégorie professionnelle du silence. Pour cela, l'ODT se réfère au Dahir n° 1-93-317 du 1er ramadan 1432 (2 août 2011) portant publication de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, adoptée par l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies le 18 décembre 1990. « Malgré cela, les immigrés sont surexploités, certains travaillent dix heures d'affilée pour 10 ou 20DH. Et dès qu'ils sont victimes d'accidents de travail, les patrons s'en débarrassent sans scrupule arguant qu'ils n'ont pas de contrat », dénonce Ali Lotfi. Et de citer un second exemple, celui d'un Subsaharien qui, en exerçant son activité au sein d'une société de marbre à Rabat, a été victime d'un grave accident au cours duquel il a perdu quatre doigts d'une main. « Il allait être viré avec un groupe de 40 autres Subsahariens qui travaillaient dans la même société, si l'ODT n'avait pas intervenue. Nous avons saisi un inspecteur de travail et engagé des négociations avec le directeur des ressources humaines de cette société dont le patron a finalement accepté de prendre en charge les soins de son employé et lui garantir une indemnité et surtout ne renvoyer aucun des Subsahariens », relate Ali Lotfi. Tendance ou surexploitation Il n'y a pas que les Subsahariens qui seront représentés dans cette nouvelle section de l'ODT. «Au congrès, nous allons recevoir des travailleurs immigrés de toutes les nationalités venant des pays arabes et asiatiques. Nous sommes particulièrement sensibles à ce nouveau phénomène des bonnes asiatiques qu'emploient les familles bourgeoises marocaines. Elles proviennent, en majorité, des Philippines et perçoivent un salaire misérable de moins de 70 % par rapport à l'habituel qu'offrent ces employeurs à une femme de ménage marocaine », tient à préciser le secrétaire général de l'ODT. Alors au-delà de briser le silence autour de ces travailleurs étrangers, il est surtout question de leur accorder une reconnaissance légale et une protection égales aux Marocains. « Nous nous attendons à accueillir 200 travailleurs immigrés des différentes villes du Maroc, dont Oujda, Fès et Rabat. Le collectif est ouvert à ceux qui travaillent d'une manière légale ou illégale », précise ce responsable pour qui la gauche politique pourrait être d'un grand secours dans ce projet. « Nous comptons sur nos alliés politiques pour que ce fléau soit porté haut et fort au sein du Parlement afin que le calvaire de ces travailleurs cesse », souhaite Ali Lotfi. Du souhait à l'aboutissement, le combat ne fait que commencer. A l'origine du Collectif C'est Marcel Amiyeto, d'origine congolaise, qui a initié l'idée du Collectif syndical des travailleurs immigrés. Etabli au Maroc depuis 2005, il a vécu le calvaire en quête d'un emploi stable, puis d'un moyen pour créer sa propre entreprise. « Sans succès, jusqu'à ce jour, je n'ai pas eu droit à un registre de commerce parce que je ne dispose que d'un statut de réfugié », confie-t-il avec amertume. Devenu par la voie de son entreprise un porte-parole des travailleurs immigrés, il a décidé suite aux drames des accidents de travail dont a été victime cette catégorie de trouver une centrale syndicale. L'ODT a donc pris sous son aile le collectif. « La première étape, pour nous, sera de donner une existence juridique à ce collectif par la voie de l'ODT et de procéder, ensuite, au recensement des travailleurs immigrés pour en connaître la quantité et les besoins », explique Marcel Amiyeto, soulignant que la régularisation du statut de ces travailleurs et la garantie à leurs familles de l'accès aux services élémentaires à commencer par l'école pour leurs enfants seront en tête de liste des revendications. * Tweet * * *