La hausse survenue des prix à la pompe allégera la caisse de compensation de 4,3 milliards de dirhams. Un montant dérisoire devant les répercutions négatives qui seront induites par l'effet domino de cette hausse, en particulier du côté des entreprises et du pouvoir d'achat du citoyen. A travers la hausse des carburants, l'état engendrera des coûts additionnels à son budget de fonctionnement, en l'occurrence l'entretien de son parc automobile. 4,3 milliards de dirhams. C'est le montant que le gouvernement économisera en augmentant les prix de consommation de l'essence, du gasoil et du fuel industriel. Ce chiffre nous a été communiqué par Said El Aoufir, directeur combustibles et carburant au sein du ministère de l'Energie, des mines, de l'eau et de l'environnement. Selon El Aoufir, la caisse de compensation coûtera 50 milliards de dirhams à l'Etat (au prix actuel des cours internationaux). « Grâce à cette hausse, l'Etat ne devra dépenser que 45,7 milliards de dirhams au lieu des 50 milliards », déclare El Aoufir. Sur une année pleine, la partie économisée représentera 7,4 milliards de dirhams. Toutefois, cette « petite » économie ne résorbera pas les charges astronomiques de la caisse de compensation qui, rappelons le, dans le cadre de la loi de finances 2012, a eu un budget de 32 milliards de dirhams. Un montant décalé de la réalité, selon nombre d'observateurs, puisque sur les 5 premiers mois de l'année en cours, 23 milliards de dirhams ont déjà été dépensés. Les causes de cette hausse Dans les détails, « le prix de l'essence a augmenté de 2 dirhams le litre et celui du gasoil de 1 dirham, alors que la subvention unitaire octroyée à ces produits est de 3,35 dirhams le litre pour le gasoil et 1,50 dirham par litre pour l'essence », a indiqué le ministère chargé des Affaires générales et de la Gouvernance dans un communiqué. Le prix du fuel industriel sera augmenté, quant à lui, de 988,04 dirhams la tonne et restera subventionné à hauteur de 2 000 dirhams la tonne. Selon la même source, cette décision des prix à la consommation de l'essence, du gasoil et du fuel industriel, qui a pris effet samedi 2 juin dernier, intervient pour faire face à l'augmentation du cours du pétrole brut sur le marché international. « Le début de l'année 2012 est marqué par des fluctuations importantes des prix du pétrole, en ce sens que le baril a atteint un niveau record de 117,4 dollars entre les mois de janvier et mai, contre 78 et 110 dollars pour la même période en 2010 et 2011 », explique le ministère, notant que la subvention a atteint une moyenne de 3,62 dirhams le litre pour l'essence, 4,68 dirhams le litre pour le gasoil, 3 350 dirhams pour la tonne du fuel industriel, 4 430 dirhams pour le fuel ordinaire destiné à la production de l'électricité et 5 388 dirhams pour le fuel supérieur destiné à la production de l'électricité. Les prix du gaz butane ont atteint, eux aussi, des niveaux record, le prix moyen de la tonne s'étant situé à 960 dollars durant les cinq premiers mois de l'année, contre 860 dollars en 2011, ce qui dépasse une subvention moyenne de 100 dirhams pour la bonbonne de 12 kg et de 25 dirhams pour la bonbonne de 3 kg, soit 250 % du prix à la consommation. « Dans le souci de préserver le pouvoir d'achat des citoyens et la compétitivité du tissu productif national, le gaz butane ne subira aucune augmentation, malgré le renchérissement continu de son cours sur le marché international », ajoute le ministère. Une mesure jugée injuste Cet avis n'est pas partagé par plusieurs personnes sondées par le Soir Echos, notamment l'économiste Abdelakder Berrada. Ce dernier n'y va pas par 4 chemins. Selon lui, cette décision intervient dans un moment très délicat. « C'est une décision injuste. Le timing n'est pas fortuit pour une augmentation des prix du carburant. Tout d'abord, les cours du pétrole sont en baisse actuellement. Il faut indexer les prix avec les cours mondiaux. Ceci sans parler de la mauvaise conjoncture économique que nous traversons avec un taux de croissance qui a été divisé par deux. Le citoyen a été pris de court et on s'attendait à tout sauf à cette hausse », lance Berrada. Selon lui, cet « impôt déguisé » ne va pas de pair avec les promesses électorales du PJD. Ainsi, le scénario de cette hausse sera, selon l'économiste, alarmant pour le citoyen lambda. Ce dernier verra son pouvoir d'achat baisser considérablement à cause de l'effet domino causé par cette hausse. L'Etat, première victime de cette mesure Que ce soit au niveau des prix des produits alimentaires ou au niveau des transports en commun, les dégâts seront collatéraux avec une très attendue inflation les mois prochains. Du côté des entreprises, les craintes se font déjà sentir. En effet, le coût énergétique, poste névralgique dans les charges pour certaines industries, plombera la rentabilité des entreprises marocaines dont les carnets de commandes s'effritent déjà à cause de la crise européenne. Pour conclure, Berrada avertit que cette hausse aura un impact négatif non seulement sur le pouvoir d'achat des citoyens mais également et surtout sur l'état. « L'Etat est le premier consommateur des carburants. Avec son énorme parc automobile, l'Etat aura des dépenses supplémentaires importantes à coup de milliards de dirhams. L'état sera la première victime de sa mesure injuste ». Voilà ce qui est dit ! Réaction Ahmed Zaidi, président du Groupement des Pétroliers Marocains (GPM). Nous n'avons pas de réaction quant à cette décision qui incombe au gouvernement. Toutefois, ce que je peux vous dire c'est que la caisse de compensation fera des économies importantes. Concernant nos arriérés avec le gouvernement, cette décision aura un impact positif sur l'état d'avancement de ce dossier. D'ailleurs, nous travaillons sur un programme de rééchelonnement avec l'Etat pour réduire ces arriérés. * Tweet * * *