Ils sont en colère et ils le crient. Après avoir porté un brassard rouge du 5 au 9 avril, les fonctionnaires des deux Chambres du Parlement menacent d'observer des sit-in et de suspendre le travail, pendant quelques heures, pour se faire entendre. « C'est une honte de travailler dans ces conditions ! », s'exclament les représentants syndicaux du personnel des deux Chambres. Les deux syndicats indépendants des fonctionnaires de la Chambre des représentants et de la Chambre des conseillers comptent coordonner leur mouvement de protestation pour désamorcer une crise unanime. « Le statut des fonctionnaires n'a pas changé, depuis 15 ans. Nous travaillons avec des lois obsolètes, alors que nous sommes dans une structure qui légifère et contrôle le gouvernement », s'indigne Mohamed Meskaoui, membre du syndicat indépendant des fonctionnaires de la Chambre des représentants. Ils sont près de 300 fonctionnaires au service de 395 parlementaires. « Durant l'examen du projet de la loi de Finances, le personnel est amené à travailler pendant de longues heures auprès des présidents des commissions parlementaires, préparer les réponses et les rapports. Mais ils ne disposent même pas d'un moyen de transport pour les ramener chez eux, tard dans la soirée », lance ce syndicaliste. Personnel asphyxié Sous la prestigieuse coupole du Parlement, les fonctionnaires expriment leur asphyxie. L'augmentation du nombre de sessions parlementaires et celle de la charge du travail ne se sont accompagnées d'aucune motivation ou prime, à en croire les représentants syndicaux du personnel. Selon ces derniers, l'accélération de l'activité parlementaire pour cause d'examen du projet de la loi de Finances, qui sera suivi par l'ouverture de la session ordinaire, risque de resserrer l'étau encore plus sur le personnel. « Nous travaillons jour et nuit et même les week-ends, s'il le faut, afin de ne pas freiner l'activité parlementaire. Mais ce sacrifice ne durera pas plus longtemps », confie ce fonctionnaire. A la Chambre des conseillers, même son de cloche. Dans un communiqué, le syndicat met en garde contre « des promesses non tenues » et menace de faire éclater sa colère par tous les moyens. « L'association des œuvres sociales attend toujours de recevoir un budget de 150 millions de centimes au titre de l'année 2010, que le président a promis lui-même de verser dans les plus brefs délais », cite en exemple le syndicat s'interrogeant également sur l'issue des conventions qui avaient été signées, entre autres, avec l'Institut supérieur d'Administration. « Nous ne connaissons pas le sort de cet accord qui portait sur la formation du personnel ni où a disparu le budget qui devait être alloué à cette formation », se demande le syndicat indépendant des fonctionnaires de la Chambre des conseillers. Le communiqué décrit longuement les différents problèmes dont souffre le personnel et dénonce surtout des « dysfonctionnements » et « un clientélisme au niveau des missions diplomatiques dont ne bénéficient que les chanceux ». A quand le dialogue ? Le personnel attend que les présidents des deux Chambres réagissent, qu'ils ouvrent une brèche au dialogue. « Nous avons adressé notre dossier revendicatif au président de la Chambre des conseillers et nous attendons qu'il intervienne », déclare Abdellah Maachou, membre du bureau exécutif du syndicat, qui insiste sur l'urgence d'ouvrir des enquêtes au sein du Parlement afin de mettre un terme au « gros désordre » dans lequel s'enlise la Chambre des conseillers. « Nous voudrions améliorer notre statut et mieux représenter cette structure constitutionnelle. Qu'on ne vienne plus nous poser cette question : pourquoi le parlement manque-t-il d'expertise ? », lance Maachou. D'après ce dernier, malgré la réduction du nombre des conseillers qui ne sera plus que de 120, le nombre de fonctionnaires (près de 300 également) restera toujours insuffisant pour répondre à la qualité du travail qu'il est amené à assurer. « Nous ne voulons pas retarder l'examen du projet de la loi de Finances arrivé déjà tardivement, mais nous voulons juste attirer l'attention sur une situation lamentable. Nous ne comptons pas arrêter de travailler mais suspendre le travail, un moment durant la journée, pour exprimer notre calvaire », ajoute Maachou. Le personnel des deux Chambres se dit conscient que le contexte actuel ne permet pas de geler totalement le travail au sein du Parlement, mais insiste sur sa volonté de tirer la sonnette d'alarme.