« Nous avons entendu dire que le HCP ne sera plus un établissement indépendant, que le chef du gouvernement compte vous rattacher à son équipe. Y a-t-il des tentatives réelles dans ce sens ?». Le président du groupe parlementaire authenticité et modernité, Abdellatif Ouahbi, a été le premier à poser la question au Haut commissaire au plan, Ahmed Lahlimi, au terme de son exposé consacré au budget et aux perspectives de son administration à la commission des finances et du développement économique, vendredi dernier au parlement. Face à lui, les députés de l'opposition ont unanimement exprimé leur crainte que le HCP perde son indépendance. « Au PAM, nous estimons que le HCP n'est pas un instrument de l'Etat et nous continuerons à revendiquer son indépendance de toute couleur politique », affirme Abdellatif Ouahbi. C'est aussi par souci de préserver « l'objectivité » de cet établissement qu'Anis Birou, du groupe RNI, a pris la parole soulignant que son parti craint pour l'amélioration du rendement du HCP. A l'USFP, Mohamed Hammani lance même un appel au gouvernement pour donner au HCP « l'importance qu'il mérite ». Indépendant, mais pas de moyens « Depuis que cette rumeur de changement de statut a été lancée, je ne cesse de recevoir sur mon bureau des demandes de mutation », reconnaît Ahmed Lahlimi. Mais la rumeur n'est pas fondée et le Haut commissaire a tenu à l'affirmer. Dans une déclaration au Soir échos, Lahlimi souligne que le HCP est indépendant et qu'il le restera. « Le HCP ne peut pas ne pas être indépendant. Il s'agit d'engagements du Maroc, de la volonté affirmée de SM le roi pour préserver la place du HCP au plan mondial. Après l'entrevue que j'ai eue avec le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, j'ai eu confirmation de cette volonté de maintenir cette indépendance et de renforcer le HCP », assure Ahmed Lahlimi. A présent que la rumeur est dissipée, Ahmed Lahlimi s'attaque au fond des difficultés dont souffre le HCP : le manque de moyens. Avec un budget de près de 412 millions de dirhams, dont plus de 50 % sont consacrés aux dépenses du personnel, la loi de finances n'a pas fait preuve de clémence envers le HCP. « C'est très faible ! », s'exclame-t-il, appelant le gouvernement à « mieux prendre en compte les besoins du HCP ». Lahlimi n'a d'autre alternative que d'attendre que le nouveau gouvernement soit plus réceptif à ses doléances. Mais pour le moment, il déplore une situation presque catastrophique. Objectifs et compétences « On nous a donné 20 postes budgétaires, alors que nous avons besoin de beaucoup plus, de 431 au total. Le HCP souffre d'un départ massif qui impose la nécessité de préparer la relève », fait remarquer le Haut commissaire souhaitant que les retraités du HCP puissent reprendre leur activité par la voie de contrats. Au manque de moyens financiers s'ajoute la réduction du personnel et donc des compétences dont dispose le Haut commissariat. Il devient urgent, pour ce dernier, de motiver le peu de personnes qui assument la lourde tâche d'apporter de l'information scientifique et de s'assurer de sa crédibilité. « Nous avions demandé à l'ancien gouvernement d'augmenter l'indemnité de déplacement aux enquêteurs, superviseurs et contrôleurs, parce qu'ils sont appelés à se déplacer énormément pour accomplir leurs missions. Mais, nous attendons toujours », révèle Lahlimi. Au titre de l'année 2012, le HCP devra poursuivre son activité de prospective en réalisant des études d'impact et des analyses des actions de développement économique. Parmi ses projets prioritaires figurent l'actualisation des projections et des estimations des paramètres démographiques et l'analyse des résultats des enquêtes réalisées en 2011 sur l'anthropométrie et la mobilité sociale. Par le biais de cette dernière, le HCP compte évaluer et cartographier l'état nutritionnel de la population et diagnostiquer le processus de mobilité sociale ascendante. Mais ce qui semble avoir le plus intéressé les députés, c'est la préparation du recensement général de la population et de l'habitat 2014. Polémique sur les chiffres Les députés n'ont pas raté l'occasion de remettre en question les chiffres du HCP qui diffèrent, parfois, d'autres émis par des organismes indépendants ou par le gouvernement. Ahmed Lahlimi limite ce problème aux prévisions soulignant que ce secteur ne peut jamais être précis et reste toujours assujetti aux aléas et conditions socioéconomiques et climatiques. Quant aux organismes indépendants, Lahlimi leur accorde peu de crédibilité : « Souvent, ces organismes sont financés par des parties qui ne sont pas totalement indépendantes ».