Elles l'ont tant attendu. Le Fonds d'entraide familiale passe enfin de la phase du projet à celle de la mise en place. Le PJD a tenu sa promesse vis-à-vis des femmes divorcées dans le besoin, et c'est avec conviction et satisfaction que le ministre de la Justice et des libertés, Mustapha Ramid, a annoncé le lancement officiel de ce fonds par la signature d'une convention avec le ministre de l'Economie et des finances, Nizar Baraka. La cérémonie, qui a eu lieu jeudi dernier au siège du département de Ramid, a été l'occasion pour ce dernier, de souligner l'urgence de cette mise en œuvre et surtout les moyens dont il dispose. Un plafond de 1 050DH « L'enveloppe budgétaire de ce fonds a été fixée à 160 millions de dirhams», indique le ministre, précisant que la pension mensuelle pour chaque bénéficiaire sera de 350 DH et que le plafond ne dépassera pas 1 050 DH, soit trois enfants par famille. Conformément aux dispositions de l'article 16 bis de la loi de finances 2011, un compte spécial a été crée à cette fin. Il est notamment prévu que le fonds soit alimenté, partiellement, à partir du produit de timbres à valeur symbolique apposés sur les actes relatifs au statut personnel et familial. Quant à sa mise en œuvre effective, c'est la loi 41-10 qui servira de référence, puisqu'elle fixe les conditions et procédures de bénéficier des prestations de cette caisse, dont le l'objectif primordial est d'assurer à la mère démunie une aide financière et protéger par conséquent l'enfant du divorce. « L'activation de ce fonds contribuera sans nul doute à résoudre plus efficacement le retard ou la difficulté d'exécution des décisions de justice liées aux pensions alimentaires en raison de l'absence du père condamné », estime Mustapha Ramid. Le fonds sera donc opérationnel dans trois cas de figure, à commencer par le retard d'au moins deux mois de paiement de la pension alimentaire. Il le sera également lorsqu'il s'avère impossible d'exécuter la décision judiciaire portant versement d'une pension alimentaire et en l'absence de l'ex-mari. Comment en bénéficier « Dès que la mère divorcée démunie affronte des difficultés d'exécution, elle est en droit de faire appel au fonds auquel elle doit présenter quelques pièces nécessaires, fixées par le décret d'application de la loi en vigueur. Nous ferons en sorte que le délai d'obtention de cette aide soit réduit », déclare au Soir échos le ministre de la Justice et des libertés, ajoutant que cette mesure ne signifie pas, non plus, que le père est « dispensé ». L'aide du fonds ne représentera qu'une sorte d'avance sur la pension alimentaire dont doit s'acquitter le père tôt ou tard. En attendant, la mère doit donc déposer une demande d'aide auprès du président du tribunal de première instance ayant prononcé la décision judiciaire ou chargé de l'exécution, accompagnée d'un certificat d'indigence délivré par le wali ou le gouverneur. A ces pièces, elle doit ajouter un certificat de non-imposition délivré par le service des impôts proche de son domicile, une copie de la décision judiciaire fixant la pension alimentaire, le procès-verbal constatant l'empêchement ou le retard dans l'exécution totale ou partielle de la décision ainsi que les actes de naissance et de vie des enfants. La procédure accomplie, il ne reste plus qu'à obtenir la somme versée par le fonds, géré par la Caisse de dépôt et de gestion (CDG). Oui, mais… Les associations de défense des droits de la femme, conviées au lancement du fonds, se sont réjouies de cette avancée, mais n'ont pas caché leur conviction de son insuffisance. « N'oublions pas que les mères démunies ont, pour une grande majorité d'entre elles, plus de trois enfants. Cette aide n'arrivera pas à soulager toute cette charge financière que la prise en charge de leur progéniture suppose », déclare Me Zahia Amoumou, avocate au barreau de Casablanca et militante des droits de la femme et de l'enfant. Aux yeux de celle-ci, le fonds représente un grand espoir mais son accessibilité reste très limitée. « 350DH est une somme dérisoire par rapport aux besoins réels de l'enfant. Rien que les fournitures scolaires dépassent de loin ce montant », fait-elle remarquer avant de préciser que le nombre de mères divorcées privées de la pension alimentaire s'accroît rapidement au fil des années. Des statistiques, qui remontent à 2009, montrent que le nombre des jugements relatifs aux frais de la garde a atteint 33.726 cas, dont seul le tiers a été exécuté dans les délais. « Nous avons des dossiers qui attendent depuis six ans. Comment ce fonds va-t-il procéder au traitement des demandes ? », s'interroge l'avocate pour qui l'application de ce fonds reste floue. « Et si pour en bénéficier, ces femmes sont contraintes une autre fois d'entrer dans les rouages administratives, la procédure risque d'amenuiser l'espoir qu'elles bercent », prévient Me Zahia Amoumou.