Suite à la dernière décision du Parlement européen de rejeter la prorogation de l'accord de pêche, le Collectif pêche et développement durable revient à la charge. Il dit non à toute reconduction de l'accord dans sa mouture actuelle. Le temps des accords basés sur l'extraction pure et simple est révolu. Le message du Collectif pêche et développement durable est on ne peut plus clair : « Non à toute reconduction de l'accord en ses termes actuels ou toute re négociation d'un nouvel accord s'inscrivant dans la même logique ». Une position ferme qui trouve son fondement dans le rapport même de la Commission pêche du Parlement européen dont les conclusions laissent dégager le non -respect d'un certain nombre de clauses par la flotte européenne. «La contribution de l'accord au développement du secteur des pêches marocain n'a pas été efficace (…). La flotte nationale marocaine est déjà trop importante par rapport au potentiel de pêche du pays et si les navires de pêche européens poursuivent leurs activités, les pêcheurs marocains perdront leurs revenu et leur emploi », note-t-on. Et pour bien comprendre les tenants et les aboutissants de l'avis de ce groupement professionnel, il suffit juste de jeter un coup d'œil sur un principe basique du droit international de la mer : Les Etats tiers n'ont droit de pêche et d'exploitation des ressources biologiques dans le cadre de partenariats que si excédent il y a. Une condition sine qua non. Or, le constat est sans appel : les stocks nationaux font état d'un épuisement quasi-total, comme le souligne la pléiade d'armateurs, lors d'un point de presse mardi à Casablanca. Dans ce cas là, comment pourrait-on justifier la possibilité de recours à un éventuel renouvellement de l'accord ? « On a pas de surplus à donner », tempête Mohamed Benjelloun de la CGEM. Des chiffres révélateurs Même son de cloche auprès d'Abderrahmane El Yazidi, secrétaire général du Syndicat des officiers et marins pêcheurs de haute mer qui lance que la prorogation du contrat dans sa formule actuelle serait « un crime » contre et le citoyen marocain et l'humanité de façon générale. Le terme est certainement fort mais cache toute une réalité amère. « Le moindre que l'on puisse dire des activités d'exploitation de la flotte européenne est qu'elles relèvent de la destruction. Ces armateurs considèrent que les eaux territoriales sont leur chasse gardée sans pour autant laisser aucun droit de contrôle aux autorités nationales », se désole Mohamed Allalou, secrétaire général de la Confédération nationale de la pêche côtière au Maroc. La clause de débarquement obligatoire des captures dans les ports est complétement ignorée. Pis, l'obligation de la présence à bord des navires européens d'un contrôleur scientifique marocain est aussi catégoriquement rejetée. Plus grave encore, la clause d'apporter une valeur ajoutée à l'industrie locale n ‘a pas été respectée, comme le souligne d'ailleurs le rapport en question. Idem pour la clause de l'emploi obligatoire. Et ce ne sont pas les chiffres qui manquent pour schématiser cet état lamentable qu'a atteint le secteur. Les exportations des produits de la mer ont chuté de plus de 50 %. Sachant qu'ils représentent 55 % des ventes agroalimentaires à l'étranger et 12 % de l'offre exportable nationale. Le président de la Chambre des pêches maritimes d'Agadir prévient que ce dernier chiffre pourrait tomber à 7 % dans le cas d'un renouvellement de l'accord. Le nombre des barques de pêche traditionnelle dans la région de Dakhla a chuté lui aussi, glissant ainsi de plus 13 000 à 3 084. Par ailleurs, le Collectif pêche et développement durable dénonce catégoriquement l'attitude de la commission mixte maroco-espagnole des professionnels de la pêche en la qualifiant d'étrange. Le communiqué de cette dernière note : « Nous ne pouvons que déplorer que des positions idéologiques personnelles aient pu causer la perte d'emplois de pêcheurs européens, notamment andalous, au risque d'entraîner des répercussions fort néfastes pour les relations de bon voisinage et de coopération existant entre le Maroc et l'Espagne ». A noter enfin que le collectif recommande en cas d'impératifs politiques d'initier une nouvelle démarche basée sur la préservation des ressources halieutiques, la promotion de l'investissement européen dans la valorisation des produits et le développement de l'industrie nationale en aval. Soulignant le nécessite de leur implication directe par le gouvernement Benkirane dans le cas de toute renégociation. Chose à laquelle tenait Abderrahmane Youssoufi alors premier ministre.