Israël s'apprête à libérer une première vague de 477 prisonniers palestiniens dans la journée. Cette libération qui intervient à l'issue d'un accord trouvé la semaine dernière avec le Hamas suscite autant d'émotions que d'interrogations. La libération des 1 027 prisonniers palestiniens que l'Etat hébreu doit échanger contre la liberté du soldat israélien Gilad Shalit, capturé par le Hamas en 2006, se concrétise. Le gouvernement israélien a dévoilé dimanche une liste de 477 détenus palestiniens qui devraient être libres dès aujourd'hui selon des sources concordantes. Même si cet accord trouvé entre le parti islamiste et Israël suscite beaucoup de joie au sein des familles qui vont retrouver les leurs après tant d'années, il n'en demeure pas moins qu'il suscite aussi maintes interrogations. Le Hamas veut saisir l'opportunité du «Printemps arabe»pour redorer son blason notamment dans l'opinion publique palestinienne (Cisjordanie surtout). Le succès et le retour triomphal de Mahmoud Abbas en Palestine au mois de septembre après avoir présenté son initiative d'adhésion de la Palestine à l'ONU semblent avoir jeté de l'ombre sur le parti islamiste. Le président de l'Autorité palestinienne est désormais vu par son peuple comme l'homme de la situation, «le sauveur». Des actes et pas des mots Le Hamas devait donc réagir pour ne pas sombrer dans la léthargie. En acceptant cet accord avec l'Etat hébreu, le parti qui gouverne la bande de Gaza depuis 2007 montre ainsi au peuple palestinien qu'il est capable de lui apporter bien plus qu'un discours triomphant à la tribune des Nations Unies. «Les actes sont bien plus importants que les mots», dit-on souvent. Le Hamas veut se démarquer du Fatah, le parti de Mahmoud Abbas, en se posant comme le plus apte à obtenir quelque chose de concret à son peuple. Car les dirigeants du parti dont Khaled Mechaal, qui vit en exil au Qatar, savent bien que même si le président de l'Autorité palestinienne arrive à fédérer les neuf voix pour son initiative au sein du Conseil de sécurité, l'obstacle du veto américain reste insurmontable. Popularité renforcée Aussi,cet échange de prisonniers renforce-t-il indubitablement la popularité du Hamas dans les territoires palestiniens ( Gaza et Cisjordanie). Le parti islamiste se place désormais dans une bonne posture en vue des prochaines élections législatives. Si élections il y a bien sûr, car à l'issue de l'accord de réconciliation conclu en Egypte en mai, les deux parties ( Fatah et Hamas) avaient convenu de mettre en place un gouvernement d'union qui se chargerait d'organiser les élections, mais force est de constater que jusqu'ici rien n'a été fait dans ce sens. Toutefois, de nombreuses voix s'élèvent pour dénoncer certaines conditions concédées par les dirigeants du parti. Selon l'accord conclu avec Israël, quelque 200 prisonniers ne rentreront pas dans leur foyer d'origine puisqu'ils seront expulsés vers les pays voisins. «Nous sommes très déçus par cette partie de l'accord car nous ne voulons voir aucun Palestinien expulsé de son propre territoire par une décision prise par son propre peuple», a déclaré Ryad Al-Malki, le ministre des Affaires étrangères de l'Autorité palestinienne. «Leur nombre est faible et ne représente même pas 5% du total de l'accord et leur éloignement se fera avec leur accord personnel et de leur plein gré. Ces prisonniers exilés auront la possibilité de revenir plus tard à Gaza lorsqu'ils le voudront, quant aux autres bannis, ils seront transférés à Gaza, qui est une partie libérée de la patrie», s'est défendu Ismaïl Radwane, un dirigeant du Hamas. Offensive diplomatique de Mahmoud Abbas Le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, est pleine offensive diplomatique pour accompagner son initiative d'adhésion de la Palestine à l'ONU actuellement en cours d'examen. Depuis le début de ce mois, il n'a cessé de multiplier les voyages à l'étranger. Après sa tournée latino-américaine où il s'est entretenu en tête-à-tête avec les dirigeants de la République dominicaine, du Salvador et de la Colombie, il était vendredi à Paris où il a remercié le chef d'Etat français Nicolas Sarkozy pour ses efforts avant de l'exhorter à poursuivre son soutien au «Printemps palestinien». Pour rappel, l'organisation onusienne UNESCO a déjà reconnu la Palestine comme membre à part entière. Une première victoire donc pour Mahmoud Abbas.