Le département d'Etat américain a rendu public mardi dernier son rapport international sur la liberté religieuse dans le monde. Il dénonce les « abus » commis par les autorités de l'Etat en 2010. Le Maroc se fait tirer les oreilles par le département d'Etat américain pour ses « atteintes» à la liberté de culte. Dans son dernier rapport 2010 sur les libertés religieuses dans le monde, rendu public mardi dernier, le pays de l'Oncle Sam pointe du doigt, notamment, le « harcèlement» exercé par les autorités sur certaines minorités, « les arrestations arbitraires et expulsions de chrétiens sous l'accusation de prosélytisme », «les menaces » qui auraient été proférées contre les « chiites », « la surveillance constante des chrétiens, des chiites… des musulmans convertis à d'autres croyances »… Une série de griefs formulés dès les premières lignes de la partie réservée au Maroc. Dans son préambule, on peut déjà lire « bien que la Constitution prévoit la liberté de pratiquer sa religion, le gouvernement impose des restrictions à ce droit dans la pratique ». Florilège. Des minorités chrétiennes marocaines continuent de dénoncer « le harcèlement moral » qu'elles subissent de la part des « services de police », regrette le département d'Etat américain dans son rapport. Certains résidents chrétiens constatent qu'ils font l'objet de « surveillance constante de la part des autorités ». D'autres vont plus loin en affirmant que « la police locale exige d'eux un document qui atteste qu'ils sont chrétiens ». Certes, les juifs jouissent d'une sécurité dans le pays ; toutefois, déplore le rapport, les chrétiens sont déclarés « persona non grata ». Les auteurs du rapport ne manquent pas de citer l'affaire du Village de l'Espoir, un orphelinat dont vingt cinq étrangers ont été expulsés pour prosélytisme présumé. Au total, près de 150 chrétiens étrangers originaires de 19 pays – dont les Etats-Unis – ont été expulsés du Maroc de juillet à décembre 2010 pour « un prétendu prosélytisme », s'indigne le département américain, qui déplore le fait qu'ils ont été renvoyés « sans bénéficier d'un procès et sans avoir le droit de se défendre devant un juge ou même de contester la décision d'expulsion ». Certains ressortissants américains ont intenté une action judiciaire pour contester leur expulsion, mais le tribunal a déclaré qu'il ne pouvait pas prendre de décision en raison de l'absence d'une copie physique d'un arrêté d'expulsion formelle, critique le ministère américain. Le Maroc a été également critiqué pour l'interdiction des « rassemblements traitant de sujets religieux autres que l'Islam ». Des résidents chrétiens se plaignent de ne pas pouvoir se réunir régulièrement en raison de la « crainte de la surveillance du gouvernement et de la persécution sociale ». Certains déclarent même se réunir discrètement dans des maisons. Les autorités marocaines sont également accusées par le département d'Etat américain « d'avoir harcelé et menacé les chiites, outre les chrétiens ». « Le ministère de l'Intérieur a continué à surveiller les activités présumées de prosélytisme, en particulier celles des musulmans chiites et les chrétiens », lit-on dans son rapport. Le nombre des musulmans chiites au Maroc est estimé entre 3 000 et 8 000, dont la plupart sont des résidents étrangers originaires du Liban et de l'Irak. Cette communauté compte également des Marocains convertis. « Bien que le gouvernement marocain autorise la vente des Bibles et autres genres de littérature religieuse dans les librairies, il continue de les confisquer, croyant qu'ils sont utilisés pour des activités de prosélytisme », critique le département américain. Ce dernier voit d'un mauvais œil « l'interdiction et la confiscation des documents traitant des sujets religieux autres que le rite malékite ». Par ailleurs, le département de l'Etat américain n'a pas manqué de s'exprimer sur la question de l'interdiction des prénoms berbères. « Les membres de la communauté berbère y compris les non-musulmans, se plaignent que les autorités régionales refusent d'enregistrer les prénoms de leurs enfants car jugés non-muusulmans », s'indignent les auteurs du rapport. Le rapport considère problématique la fermeture de certaines mosquées « non autorisées » ou « informelles ». Il n'a pas manqué de souligner l'absence de mosquées chiites dans le pays.