Inséparables, feu le dessinateur palestinien Naji al-Ali, et son personnage culte, Handala, symboles de la lutte dans le monde arabe, sont à découvrir pour la première fois en français dans Le Livre de Handala, édité chez Scribest Publications. Mon nom est Handala. Le nom de mon père n'est pas important. Le nom de ma mère est Naqba et ils ont appelé ma petite soeur Naqsa» se présente-t-il, lors de sa première apparition en 1969 dans le journal Al Siyassa. Enfant de Palestine, Handala est un témoin indigné de l'histoire de son peuple. Le plus souvent de dos, les pieds déchaussés et le chandail rapiécé, ce petit personnage s'inspire de la vie de son créateur, le dessinateur palestinien Naji al-Ali, contraint à l'exil au Liban à l'âge de 12 ans. Publié en 2011, année placée sous le signe des révolutions, Le Livre de Handala invite à relire l'histoire de la Palestine, en suivant les pas de ce personnage emblématique de la résistance, présent sur plus de 10 000 dessins de presse. Des caricatures critiques et dérangeantes, qui causeront l'assassinat du dessinateur le 22 juillet 1987 à Londres. Comme l'écrit Alain Gresch dans sa postface, Naji al-Ali rêvait déjà du « réveil arabe ». Ses dessins en noir et blanc des mensonges et des impostures, y compris celles des leaders palestiniens, n'ont pas pris une ride. Ce qui fascine dans l'oeuvre du dessinateur, c'est non seulement la justesse des symboles et des paradoxes dépeints, mais aussi cette conscience historique exacerbée. « L'artiste a dit son mot pour son époque et l'époque suivante », écrit justement à son propos le romancier palestinien Mohammed al Asaad. « L'artiste a dit son mot pour son époque et l'époque suivante », Mohammed al Asaad. Sous ses coups de crayon affûtés, on découvre une autre Palestine, représentée sous les traits d'une femme en habits traditionnels, qui résiste aux tentatives israéliennes de la déguiser avec des tenues aux étoiles juives. Les barils d'or noir, estampillés des puissances étrangères, étranglent les hommes et leurs droits, tandis que les réfugiés portent à leur cou des clés, symboles de leur inexorable condamnation à l'exil. L'empreinte étrangère dans cette histoire dramatique se dessine sur le dos battu d'un Palestinien, sur lequel les traces du bâton deviennent les lignes du drapeau américain. Mais si Handala nous montre le désespoir et les mains ligotées du peuple palestinien, il ne résiste pas à l'envie de brandir le poing, de jeter les pierres de l'Intifada ou de glisser la fleur de l'espérance entre les barreaux des prisonniers. Enfant de Palestine, Naji al-Ali aimait à rappeler qu'Handala était aussi « un enfant arabe et de l'Humanité ». Universelle et à la fois si personnelle, sa bataille pour la liberté n'a pas fini de résonner dans le monde arabe. NB : Le Livre de Handala. Les dessins de résistance de Naji al-Ali ou l'autre histoire de Palestine, préface de Plantu, postface de Alain Gresch, Scribest Publications, 175 pages.