Après le succès de son polar Al Qadya et de son film Casanegra, Nour-Eddine Lakhmari revient avec Zéro, un nouveau long-métrage qui nous plongera au cœur de Casablanca, la mégapole fétiche de ses tournages. La sortie de ce nouvel opus est attendue début 2012. Quelle est l'histoire que nous racontera votre deuxième long-métrage ? C'est un looser en routine, un monsieur qui n'est personne et qui ne s'aime pas, ne vivant qu'avec son père, mais qui deviendra un autre grâce une femme. Zéro se purifie à travers l'amour et la rencontre de cette femme ; cela lui permettra de se poser d'autres questions et de se regarder au profond de lui-même. Qu'est-ce qui vous a poussé à faire ce film ? Nous, Marocains, avons un énorme problème d'identité. Les Marocains ne travaillent pas assez sur eux-même et ne se regardent pas dans le miroir. La société marocaine n'avancera que grâce à des individus qui se font de l'autocritique. Zéro en aura l'occasion à travers la découverte de l'amour avec cette femme. Il sortira de son cadre de routine et se fera d'autres raisons d'être que de laisser à « maman » et « papa » le soin de s'occuper de tout. Vous avez décrit votre film en disant « Vous prenez Casanegra et vous multipliez par dix ! ». Sur quel plan Zéro est un concentré de Casanegra ? Dans chaque film, le comportement des personnages m'est important. Je montre comment Zéro devient un produit de son environnement à travers la rédemption de son âme par le travail sur soi, mais surtout par l'amour. C'est dans le cadre de ma trilogie consacrée à une ville que j'aime énormément, Casablanca : le premier volet a traité de la solitude dans Casanegra, le second est un hommage à la rédemption qui vous change une vie, le tournage du troisième n'est pas encore prévu mais il abordera le sujet de l'amour. «Le tournage s'est étalé sur 9 semaines. C'était très difficile, je travaillais avec mon équipe de 18 h à 7h du lendemain». Quel est donc votre conception de l'amour ? L'amour commence par la tolérance et par l'acceptation de l'autre. Le refus à cause de la différence est dangereux. Je vois qu'au Maroc, rares sont les personnes qui acceptent les différences de l'autre, qu'il soit noir ou blanc, amazigh, juif, chrétien… Le refus des différences chez les Marocains nous a rendus de plus en plus violents et intolérants et cela est dangereux. Qu'en est-il du casting pour du film ? J'ai fait un casting sauvage comme pour toutes mes créations précédentes au Maroc : Al Qadya, Le Regard, Casanegra,… Je suis toujours à la recherche d'individus inconnus du cinéma, inexpérimentés ou débutants, mais aux grands talents distingués. Je montre à travers cela que les Marocains sont capables de faire des choses incroyables s'ils se regardent assez dans le miroir et s'il travaillent beaucoup sur eux-même. Qu'est-ce qui vous a attiré chez l'acteur que vous avez choisi pour le rôle principal ? Son intelligence, son talent et la force avec laquelle il est devenu le personnage. Ce jeune acteur apportera beaucoup pour le cinéma marocain. Comment s'est passé le tournage du film ? Le tournage s'est étalé sur 9 semaines. C'était très difficile, je travaillais avec mon équipe de 18h du soir à 7h du lendemain, car beaucoup de prises devaient être faites pendant la nuit. C'était l'hiver, les acteurs tombaient souvent malades et il pleuvait beaucoup lors des prises à l'extérieur. Quelle scène de tournage vous a marqué le plus ? Il y en a beaucoup, mais je n'oublierai jamais celle où nous devions contrôler le trafic sur tout le boulevard Mohammed V pour un tournage de caméra à 360° : il y avait des voitures, des gens curieux tout autour, des cris parfois, les lampes blanches qui dérangeaient beaucoup de monde et surtout une pluie ininterrompue. Peut-on avoir une idée sur le budget du film ? 20 millions de dirhams. Nous avons pu en obtenir 4,5 avec l'aide du Centre cinématographique marocain, le reste est financé par la boîte de production Timlif. Quel effet a eu le contexte politique actuel au Maroc sur votre inspiration pour Zéro ? Le cinéma marocain devient la mémoire de sa société. C'est pour cela que chaque pose de caméra pour le réalisateur est un acte politique. Un acteur ou un réalisateur qui vous dit : « Je ne suis pas intéressé par la politique » vous ment parce que le cinéma et l'art en général sont un produit de la société. Propos recueillis par Ghita Zine (stagiaire)