La gauche marocaine, tous partis confondus, ne possède que 76 sièges parmi les 325 que compte la Chambre des représentants. A quelques mois du scrutin législatif, la tâche s'annonce rude pour une gauche marocaine divisée. Fini le temps où les partis de gauche drainaient les masses lors des campagnes électorales. Le gouvernement d'alternance présidé par Abderrahmane Youssoufi a certainement joué en leur défaveur. Leur crédibilité atteinte, ce sont les islamistes du PJD qui, aujourd'hui, peuvent se targuer d'avoir une assise populaire. Actuellement, le nombre de sièges occupés par les représentants de partis se réclamant de « gauche » ne dépasse guère 76 à la Chambre des représentants. Plus dramatique est encore leur répartition, entre l'USFP et le PPS, qui depuis douze ans font partie des différentes coalitions gouvernementales, et les autres – notamment le Parti travailliste ou l'alliance PADS-CNI-PSU – qui ont toujours opté pour l'opposition. Mostafa Meftah, membre du bureau politique du Parti socialiste unifié (PSU), qui a d'ailleurs boycotté le référendum sur la Constitution, impute les derniers échecs électoraux de la gauche au « désintérêt des électeurs potentiels » qui sont, à ses yeux, « les jeunes ». En réaction aux divisions que subit la gauche, Meftah précise qu' « au Maroc, il existe deux gauches » : la « première est formée de l'USFP et du PPS et n'est pas cohérente avec ses projets », « ce qui a poussé les électeurs de gauche à bouder les élections » ; quant à la « deuxième gauche », faisant allusion à son propre parti et ses alliés, Mostafa Meftah regrette « qu'elle n'ait pas fait l'effort de rénovation nécessaire et n'ait pas bien précisé son projet ». « Certains partis de gauche n'ont pas su évoluer et sont restés attachés à leurs vieilles revendications ». Ahmed Zaïdi, président du groupe parlementaire Ittihadi à la première Chambre. Le dirigeant ajoute que son parti a « essayé d'ouvrir un débat national unissant tous les partis de gauche », mais « les positions n'ont jamais pu se rejoindre » et un véritable « front autour de la monarchie parlementaire n'a pu être constitué », déplore-t-il, en référence à l'acceptation de l'USFP et du PPS du nouveau texte constitutionnel, puisqu'il ajoute que « le PPS et l'USFP ont accepté les règles du jeu et ont approuvé une Constitution à mi-chemin ». Quant au faible nombre de sièges occupés par l'alliance PADS-CNI-PSU (5 sièges à Chambre des représentants), Meftah met en cause « le mode électoral » mais aussi le recours massif des autres partis aux « notables », alors que « le PSU s'en est toujours tenu à sa base électorale ». « Notre parti reste ouvert aux jeunes du 20 février ; si on pouvait les avoir au sein de notre parti, ce serait l'idéal », avance le dirigeant du PSU, « mais il ne s'agit pas de récupération », se défend-il. De son côté, Ahmed Zaïdi, le président du groupe parlementaire Ittihadi au sein de la première Chambre, estime que son parti a souffert de « jugements de valeurs un peu hâtifs » et que si l'USFP a perdu la place qu'il occupait auprès des masses populaires à cause de « l'énorme attente des électeurs envers les socialistes lors de leur entrée au gouvernement ». Zaïdi déplore que son parti « n'ait jamais réellement pu gouverner et ainsi appliquer son programme, comme le prévoyait la Constitution ». Mais il n'a fait que « gérer les affaires de l'Etat ». Le dirigeant estime que s'il avait des regrets à exprimer, ce serait pour « la dégradation de l'image du parti », mais « pas pour le pays », puisqu'il pense que « la décision de participer au gouvernement d'alternance était pour le bien de la Nation ». Ahmed Zaïdi ajoute que « l'USFP n'a jamais coupé les ponts avec les autres partis de gauche, même s'il peut y avoir des divergences » regrettant que « certains partis de gauche n'aient pas su évoluer et soient restés attachés à leurs vieilles revendications ». Quant à la Koutla (alliance entre l'USFP, le PPS et l'Istiqlal), il pense que si elle demeure dans l'état où elle se trouve actuellement, « elle n'a plus lieu d'être ». Concernant le vieillissement des cadres de l'USFP, Zaïdi tient à nuancer : « Il existe dans notre parti des vieux qui ont des idées jeunes et des jeunes qui peuvent être beaucoup plus conservateurs », appelant de ses vœux de voir certains jeunes du 20 février intégrer son parti, « à condition de respecter les principales orientations de la formation », précise-t-il. « Ce sont ces jeunes du 20 février, et je parle de ceux du début (en référence à la récupération dont aurait été victime le mouvement de la part d'Al Adl Wal Ihsane, ndlr), qui ont le pouvoir de faire avancer le Maroc », soutient-il.