Interview avec Malika Lehyan : «Les progrès des femmes sont indéniables, mais il reste du chemin à parcourir»    L'aéroport Marrakech Menara optimise ses contrôles d'entrée    Fraude alimentaire : Un entrepôt clandestin démantelé en plein Ramadan    Donald Trump nomme Duke Buchan III, ambassadeur des Etats-Unis au Maroc,    Le Roi loue les mérites et les nobles qualités de feue Naïma Samih    Tourisme. Le Maroc séduit les motards du monde entier à Rome    Real: Brahim Diaz élu joueur du mois de février    UEFA: Hakimi sur le podium des joueurs le plus rapides de la LDC    Liga: Barça - Osasuna de ce soir reporté    FRMB : les candidatures pour la présidence sont lancées    Maroc : 83 condamnations à mort en 2023, un chiffre en baisse    Tensions lors de la marche du 8 mars à Paris    Michel Onfray désavoue la politique permissive d'Emmanuel Macron à l'égard de l'Algérie et qui menace la sécurité intérieure française    Rabat : convention pour la mise en œuvre du programme national de formation des enfants au numérique et à l'IA    Saisie d'une tonne et 57 kilogrammes de résine de cannabis à Nador et arrestation de six suspects    Naïma Samih... Une icône de la chanson marocaine s'en va, mais sa voix reste gravée dans la mémoire des générations    L'Université Chouaïb Doukkali commémore l'épopée de la libération et de l'unité nationale    Interview avec Khadija Ezzoumi : « Malgré les succès notables, des obstacles majeurs persistent »    Interview avec Fawzia Talout Meknassi : « Les Marocaines ont gagné leurs droits politiques et civils à travers différentes étapes historiques »    La SMIT célèbre les femmes, ingénieures de l'excellence touristique    Naïma Samih, l'icone de la chanson marocaine, est décédée    Le PJD réclame l'application de la loi 104.12 après avoir libéralisé les prix et laminé le pouvoir d'achat des Marocains    Le ministre des Affaires étrangères chinois : La Chine cherche à apporter des éléments de certitude à un monde rempli d'incertitudes    UM6SS: Ouverture prochaine de deux nouveaux campus à Marrakech et Agadir    La DGM lance des alertes de niveaux rouge et orange    L'ONU Tourisme fait l'éloge du climat d'investissement au Maroc    Aéroport Tanger Ibn Battouta : plus de 3,27 MMDH injectés pour son extension    La chanteuse Naïma Samih n'est plus    Le Maroc désigné à l'unanimité pour abriter le siège du bureau régional Afrique de la Conférence de La Haye    Présidence du Ministère public : appel au développement du réseautage informatique entre les secteurs impliqués dans la justice pénale    Donald Trump nomme Duke Buchan III ambassadeur des États-Unis au Maroc    Duke Buchan III nommé ambassadeur des Etats-Unis au Maroc    Corée : le président suspendu Yoon Suk Yeol remis en liberté    Tanger-Tétouan-Al Hoceima : 1,26 milliard de dirhams pour moderniser le secteur agricole    Le Conseil de la ville de Casablanca dément toute intention de vendre le Complexe Mohammed V    Achraf Hakimi est le deuxième joueur le plus rapide de la Ligue des champions    Loubna Ghaleb, membre du directoire du Groupe Tanger Med, reçoit le 10e prix annuel du «Gender Leadership Award» de la Banque Mondiale    La chanteuse marocaine Naïma Samih s'éteint, laissant un héritage musical intemporel    Décès de Naïma Samih : Le Maroc perd une icône de la chanson    La Maison Blanche crée un groupe de travail en charge du Mondial 2026    Naïma Samih est décédée : retour sur la vie et la carrière de l'icône de la chanson marocaine    Alerte météo Maroc : ADM appelle à la vigilance sur le réseau autoroutier    Tindouf : Un opposant au Maroc demande de retourner au Sahara    «En caso de elecciones libres, el Polisario no obtendría ni el 10% de los votos»    Apertura excepcional de las fronteras marroquí-argelinas    Ukraine: Donald Trump n'écarte pas des "sanctions" contre la Russie en vue d'un accord de paix    Maroc : 5 romans de Rachid Benzine regroupés dans un coffret    Salat al-Kha'ib : Un recueil qui prie, un poète qui crie    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Le Maroc est une cible au même titre que l'Algérie ou la Tunisie»
Publié dans Le Soir Echos le 04 - 07 - 2011

Jean-Pierre Filiu, professeur à Sciences Po (Paris), historien et arabisant et auteur notamment de L'Apocalypse dans l'Islam et de La Véritable histoire d'Al-Qaida, revient sur l'avenir d'Aqmi après la mort de Ben Laden, mais aussi sur la menace que l'organisation terroriste représente dans la région sahélienne et au Maroc.
Quelques jours après la libération des deux journalistes français retenus en otage en Afghanistan, où en est-on concernant leurs quatre compatriotes, enlevés le 15 septembre 2010 au Niger, par Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) ?
Ce qui s'est passé en Afghanistan n'a rien à voir : c'est un autre temps, un autre contexte, d'autres discussions et surtout Al- Qaida n'avait rien à voir là-dedans. Pour ce qui est d'AQMI et du Niger, on sait deux, trois choses sur cette prise d'otages : elle a été revendiquée par Abdelhamid Abou Zeid, le chef de la katiba qui nomadise dans l'est de la zone sahélienne. Abou Zeid et AQMI ont lié la libération des otages à un retrait des troupes françaises d'Afghanistan. Cette exigence publique a été renouvelée par Ben Laden lui-même à deux reprises. Ben Laden rentrera dans l'histoire comme ayant prononcé son dernier message pour menacer la France le 21 janvier 2011. Tout ce qu'on a eu depuis ce sont des messages posthumes qui peuvent être discutés. Maintenant qu'il est mort, je constate qu'AQMI n'a pas encore prêté allégeance à Al Zawahiri en tant que nouveau chef d'Al-Qaida. On peut être dans la déconnexion. On peut aussi être dans une phase de transition où AQMI va reprendre ses marques par rapport à la nouvelle direction d'Al-Qaida sous l'égide de Zawahiri.
La mort de Ben Laden va-t-elle intensifier le phénomène de «guerre des chefs» au sein d'AQMI ?
La guerre des chefs, même si elle n'a pas un aspect violent, existe déjà depuis longtemps dans les rangs d'AQMI. J'ai toujours dit que la disparition de Ben Laden encouragerait immanquablement les tendances centrifuges au sein d'Al-Qaida : entre la direction centrale et les différentes branches, d'une part, (Irak, Péninsule arabique, Maghreb Islamique,…), et à l'intérieur de ces différentes branches, d'autre part. Au fond, l'autorité d'Abdelmalek Droukdal (chef d'AQMI, ndlr) sur ses lieutenants de guerre Belmokhtar et Abou Zeid tient beaucoup à sa dimension de représentant de Ben Laden. Cela va peut être continuer, mais je dis juste que ça va être beaucoup plus difficile.
«La guerre des chefs, même si elle n'a pas un aspect violent, existe déjà depuis longtemps dans les rangs d'AQMI».
L'élément qui jusque-là dissuadait des rivalités ouvertes a disparu. S'il n'y a pas de déclarations publiques de Belmokhtar contre Abou Zeid, cela fait quand même trois ans qu'ils sont en rivalité sérieuse. Ils se sont donné des coups sévères de manière indirecte. Tout va dans le sens d'une accentuation de ces tensions internes et de ces mouvements centrifuges.
Quels sont les véritables objectifs d'AQMI ? Combat idéologique ou crapuleux ?
AQMI est le cas le plus avancé du « gangstéro-jihadisme». En Kabylie, Droukdal et son équipe dirigeante se financent largement sur l'extorsion et les enlèvements d'Algériens. Il existe quand même une différence entre les lieutenants de l'organisation terroriste. Belmokhtar, surnommé «Mister Marlboro», accorde plus d'importance aux moyens sur les fins, alors que ce serait plutôt l'inverse pour Abou Zeid. Mais en réalité, ce sont tous des délinquants et des trafiquants. Précisons aussi que la dimension idéologique de leur engagement est très limitée car aucun d'entre eux n'a de véritable bagage religieux. Par exemple, Abou Zeid est un contrebandier qui est devenu jihadiste par la suite. Il a gardé des réflexes de contrebandier : rusé, calculateur, il navigue en permanence entres les différentes frontières qui jalonnent le Sahara.
L'influence d'Al Qaïda au Sahel
Les dirigeants des pays concernés par la menace (Algérie, Mauritanie, Mali, Niger) se sont récemment rencontrés pour mieux coordonner leur lutte antiterroriste. Selon vous, quelle stratégie doivent-ils adopter pour venir à bout d'AQMI ?
Je pense que la coordination régionale est la clé. Quand on est face à des groupes qui jouent sur les passages de frontières, sur la contrebande et les trafics, il faut une forte coopération régionale. La semaine dernière, l'armée mauritanienne est intervenue au Mali pour attaquer une base de combattants d'AQMI.
Les dirigeants des pays concernés par la menace (Algérie, Mauritanie, Mali, Niger) se sont récemment rencontrés pour mieux coordonner leur lutte antiterroriste. Selon vous, quelle stratégie doivent-ils adopter pour venir à bout d'AQMI ?
Je pense que la coordination régionale est la clé. Quand on est face à des groupes qui jouent sur les passages de frontières, sur la contrebande et les trafics, il faut une forte coopération régionale. La semaine dernière, l'armée mauritanienne est intervenue au Mali pour attaquer une base de combattants d'AQMI.
«Quand on est face à des groupes qui jouent sur les passages de frontières, sur la contrebande et les trafics, il faut une forte coopération régionale».
Cette attaque leur a fait très mal. Avant, ils venaient au Mali pour se réfugier et échapper à ce genre d'assaut. Dorénavant, ils n'y sont plus en sécurité et je pense que ça les déstabilise profondément.
Le Maroc est-il dans le viseur d'AQMI ?
J'ai été frappé par le fait qu'AQMI ait démenti l'attentat de Marrakech. J'ai tendance à le croire, car généralement ils revendiquent tous leurs actes. Le Maroc est une cible au même titre que l'Algérie ou que la Tunisie. Mais il faut faire la distinction entre les cibles virtuelles et les capacités réelles.
Comme son nom l'indique, on a chez AQMI une volonté régionale qui voudrait dépasser la dimension algérienne du GSPC. Ce qu'on a vu, c'est que cette dimension algérienne est restée déterminante. Mais les jihadistes sont fondamentalement des opportunistes, c'est-à-dire que s'ils ont une opportunité sérieuse ils la saisiront. J'ai la conviction que les services marocains sont particulièrement mobilisés pour justement éviter toute opportunité. Cela dit, ça ne veut pas du tout dire que le danger terroriste est écarté. Le drame de Marrakech est là pour nous le rappeler.
Propos recueillis par Benjamin Roger


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.