Le Centre marocain de conjoncture, dans sa dernière lettre mensuelle, note que le printemps arabe n'a pas encore épuisé toutes ses cartouches. Tensions inflationnistes, effets sur le tourisme, flux migratoires, exportations, IDE..autant de secteurs touchés. Les effets directs et indirects sur l'économie marocaine du printemps arabe portent à croire que le taux de croissance prévu pour l'année en cours (4,3%) serait révisé à la baisse. C'est du moins ce qui ressort de la dernière lettre mensuelle du Centre marocain de conjoncture (CMC). En fait, dans ce contexte effervescent où les cours internationaux des matières premières ne cessent de flamber, il paraît clairement que le rythme de croissance de la machine économique devrait afficher une tendance à la baisse. Tendance qui devrait se poursuivre jusqu'en 2012. Pour étayer leur prédictions, les conjoncturistes font appel aux prévisions du FMI. « Les pays importateurs de pétrole de la région MENA (Afrique du Nord et Moyen-Orient) devraient afficher en 2011 une croissance autour de 2%, très insuffisante par rapport à leur croissance démographique…», peut-on lire. Ce revirement de tendances se traduirait sur le court terme par des tensions inflationnistes , qui ne manqueraient pas, à leur tour, d'impacter à la baisse le pouvoir d'achat des ménages. Dans la foulée des déchaînements de l'effet Mohamed El Bouazizi, le budget de l'Etat accuse et accusera certainement des pertes sèches. Etant donnée que le jeu d'équilibre recettes-dépenses se trouverait perturbé. Déjà, le déficit budgétaire avait atteint un seuil critique au terme des quatre premiers mois (cf.www.lesoir-échos). « Les pays importateurs de pétrole de la région MENA (Afrique du Nord et Moyen Orient) devraient afficher, en 2011, une croissance autour de 2% ». Les emplois de la caisse de compensation y sont pour beaucoup. En fait une rallonge budgétaire de 15 milliards de dirhams avait été débloquée pour couvrir le poids très lourd de la facture pétrolière et céréalière. Et ce n'est pas tout. Le gouvernement semble être soumis à un test qui n'est pas de tout repos. Le « package social», prévu pour payer la paix sociale, avoisine les 30 milliards de dirhams. « Le traitement appelle des stratégies innovantes pour préserver l'intérêt général en troquant l'accoutumance à la stabilité d'hier contre le besoin de réformes d'aujourd'hui», recommande l'observatoire privé. Il faut souligner aussi que la barre des 209 milliards de dirhams fixés au titre de la loi de Finances 2011 pour les dépenses globales sera certainement franchie. Ce qui met en perspective l'urgence de mettre en place une loi de Finances rectificative, au sens large du terme, sans se contenter de « simples retouches » à apporter ici et là. Les enjeux politico-économiques du printemps arabe ne se limitent pas aux seules tensions inflationnistes. Les chercheurs soulignent, en effet, que les répercussions sur notre pays passent par le retour des Marocains des pays où les révoltes populaires battent son plein, les effets indirects sur le tourisme, les exportations, ou encore les investissements directs étrangers. Si pour les deux premiers secteurs les prévisions du CMC tablent sur des baisses notables ; en revanche, pour les deux autres elles sont plus prometteuses. Pour le seul exemple des IDE, les économistes précisent que le Maroc a enregistré, au terme du premier trimestre de l'année en cours, « la hausse la plus significative du nombre de projets des IDE au sud de la Méditerranée ». Le printemps arabe inspire, aux yeux des conjoncturistes, une nouvelle géographie de la croissance. Ce reprofilage ne manquerait pas de nourrir leurs interrogations. «Serait-ce, encore là, l'effet d'un transfert vers le Maroc de projets qui, sans les révolutions, seraient réalisés ailleurs », se demandent-ils. Une chose est sûre : rien n'est plus sûr avec ce tournant historique ! Mohamed Mounjid