La pression de l'UE, le décès de Kamal Ammari et l'organisation de marches dans les grandes artères des villes du pays, ont contribué au retour du calme. Les marches du 5 juin ont renoué avec le calme. Une tradition qui était la leur avant que les autorités ne décident de brandir la matraque pour disperser les manifestants. Certains, comme les membres du Mouvement du 20 février, voient dans ce changement la main de l'Union européenne. La semaine dernière, Bruxelles, par la voix d'une de ses porte-parole, s'est dite préoccupée par « la violence dont il a été fait usage lors des manifestations du week-end dernier au Maroc (29 mai, ndlr) ». Cette sortie médiatique de l'UE a écorné une certaine image que Rabat tente de véhiculer auprès de ses partenaires européens, mais ne peut, à elle seule, expliquer le comportement des forces de l'ordre du 5 juin. D'aucuns considèrent que c'est la réponse des autorités à l'organisation des marches dans les grandes artères des villes du pays ; un retour à la « normale », qui intervient après des semaines de manifestations (celles du 15, 22 et 29 mai) dans les quartiers populaires d'El Akkari de Rabat ou de Sbata à Casablanca, avec les conséquences que l'on connaît ; exception faite de Tanger, où la manifestation n'a pas dépassé le territoire de la préfecture de Béni Makada ; ce qui explique le fort déploiement des forces de l'ordre dans cette partie si sensible de la capitale du Détroit. Béni Makada est connue pour être un haut lieu de la contestation dont trois factions islamistes, le PJD, Al Adl wal Ihssane et les salafistes, se disputent le contrôle. Le décès du jeune Kamal Ammari est certainement pour quelque chose dans le changement d'attitude des forces de l'ordre. Une mort qui est toujours au centre d'une polémique entre les membres de sa famille, soutenue par le Mouvement du 20 février et Al Adl wal Ihssane, et les autorités. « Des participants à une marche, organisée dimanche à Rabat à l'initiative du Mouvement du 20 février, ont appelé à des réformes politiques, économiques et sociales profondes. Cette marche, qui s'est ébranlée de la place Bab El Had avant de traverser l'avenue Hassan II, pour enfin se disperser devant la gare Rabat-Ville, s'est déroulée dans un climat calme et serein. Tout au long de cette marche, les participants ont scandé des slogans appelant à une Constitution démocratique garantissant la séparation des pouvoirs, le renforcement des libertés et des droits et permettant la dignité et la justice sociale. Lors de cette marche à laquelle ont pris part des acteurs politiques, des militants des droits de l'Homme, des représentants des centrales syndicales et de la société civile, les participants ont également brandi des banderoles appelant à la lutte contre la corruption et l'économie de rente. Les manifestants ont aussi appelé à une réforme des secteurs de la Justice et des médias publics, à même de répondre aux aspirations de toutes les composantes sociales, culturelles et intellectuelles du peuple marocain ». Chacune des parties y va de sa propre version pour expliquer les causes du décès du jeune manifestant. Une polémique appelée à se poursuivre, en dépit de la publication du rapport des médecins légistes (cf page 6). Justement, Safi a connu une marche qui a battu tous les records depuis la première marche du 20 février. Certaines sources estiment que le nombre de participants oscillait entre 40 000 et 60 000 personnes. Un chiffre obtenu grâce à la forte mobilisation des disciples de Abdeslam Yassine, venus en masse clamer la vérité sur la mort de Kamal Ammari. A Rabat, la marche à laquelle à appelé le Conseil national pour le soutien du Mouvement du 20 février, de Bab El Had au Parlement, s'est déroulée sans incident. La police veillait au grain, mais n'a pas chargé les manifestants. Même scénario à Casablanca, où les forces de l'ordre se sont fait discrètes. Des marches de soutien au Mouvement du 20 février ont également eu lieu dans les petites localités de Khénifra, Imintanout, Bouârfa, Taourirt et bien d'autres.