Les tensions sur les cours mondiaux des matières premières agricoles s'accentuent. Elles mettent à mal les budgets des ménages et de l'Etat marocain. Il est grand temps de repenser la stratégie agricole nationale. Le risque de voir la volatilité des prix des matières premières agricoles maintenue dans les mois à venir est entier. Le phénomène s'explique par les intempéries observées un peu partout dans le monde (Australie, Canada, Chine, Amérique latine… et dernièrement l'Allemagne et l'Afrique australe), en plus de la tendance haussière de la demande «assez prévisible» provenant principalement des pays de l'Afrique du Nord (Egypte, Algérie…). A ces facteurs d'incertitude, il faut ajouter la forte spirale spéculative, les tensions politiques ainsi que les chocs émanant d'autres marchés de matières premières comme celui du pétrole, selon les analystes. La sonnette d'alarme de la FAO L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture( FAO) a déjà tiré la sonnette d'alarme sur les niveaux record qu'avaient atteint les prix alimentaires mondiaux en janvier dernier. L'organisation internationale a souligné ainsi que l'Indice des prix des céréales s'est élevé à 245 points en janvier, en hausse de 3 points de pourcentage qu'en décembre, soit le plus haut niveau depuis juillet 2008. Depuis le 11 février 2010 et jusqu'en 2011, les cours mondiaux du blé ont bondi de 52,2%, d'après le Chicago Board of Trade : «Les nouveaux chiffres montrent clairement que la pression à la hausse des prix alimentaires mondiaux ne montre pas de signe d'essoufflement», a déclaré l'économiste et expert en céréales de la FAO, Abdolreza Abbassian. De quoi menacer la sécurité alimentaire des pays pauvres et inquiéter les ménages pauvres qui consacrent une partie importante de leur budget à l'alimentation. Au Maroc par exemple, 42% du budget des ménages est alloué à la consommation. La question qui se pose est de savoir jusqu'à quand les budgets et des ménages et de l'Etat marocain devraient subir les effets néfastes du poids de la facture alimentaire ? D'autant que les réalisations du secteur céréalier restent largement en deçà des besoins alimentaires de la population, mettant en cause la politique agricole nationale : «Le Maroc est passé d'une situation de quasi-autosuffisance à la fin des années 80 à l'importation de près de 6,4 et de 4 millions de quintaux respectivement de blé dur et d'orge», précise la dernière note de conjoncture de Bank Al-Maghrib. Ces chiffres nous renseigne sur «une activité handicapée par des problèmes techniques et structurels ». Sont montrés du doigt les rendements jugés très faibles et la superficie emblavée (limitée : 5 millions d'hectares en moyenne). «L'amélioration des rendements du blé au Maroc est estimée à un quintal par décennie. Cette performance est dix fois inférieure à celle réalisée par la France et Egypte, cinq fois inférieure à celle de l'Espagne et trois fois à celle de la Turquie (ces deux derniers pays avaient des rendements comparables à ceux du Maroc en 1960)», note-t-on. Impact du changement climatique Dans la foulée, l'Etat est invité à repenser sa stratégie agricole, d'autant que le risque de faible production agricole reste entier et devrait augmenter sous l'effet du changement climatique”, a-t-on prévenu. Sur ce chapitre, le Plan Maroc Vert constitue une «opportunité» mais également un «défi». À noter enfin qu'au terme de l'année 2010, les importations de blé se sont établies à 6,9 milliards de dirhams contre 5,4 milliards de dirhams en 2009, soit une hausse de prés de 27%. en 2008, elles se chiffraient à 12,4 en 2008 suite à la flambée des cours internationaux.