Les propriétaires et salariés annoncent la création d'un comité de coordination chargé de défendre leurs intérêts La chaîne de télévision 2M a filmé, en direct, le « scandale » en présence des huissiers de justice. Ils ont entamé les procédures judiciaires pour être indemnisés suite aux préjudices causés. Voici une affaire qui a suscité et suscitera la polémique du point de vue juridique et environnemental. Pour mémoire, l'Agence nationale des ports (ANP) a «fait coulé» au large de la côte atlantique (Agadir) entre le 1er août et le 13 octobre 2010, près de 30 à 40 bateaux. Les propriétaires et salariés de ces derniers, qui se sentent lésés, voire même spoliés, reviennent à la charge et annoncent la création d'un comité de coordination chargé de défendre leurs intérêts, selon un communiqué dont le Soir échos tient copie. La question qui se pose : pourquoi l'autorité portuaire s'attitre-t-elle les foudres de ces derniers? Mohamed Zebdi, patron des sociétés Royal Fisheries, Trefoil& Agrapelit nous confie qu'il s'agit là d'une violation de la loi. À la lecture du jugement du tribunal, rien ne stipule de faire couler ou détruire nos biens. «le verdict autorise à évacuer ou déplacer les bateaux vers un endroit proche voire même à l'extérieur du port d'Agadir, si nécessité il y a», est-il mentionné. Quelles réponses avancent l'ANP face à ces témoignages? L'agence nie carrément le fait de couler lesdits bateaux. Ensuite, « la décision de l'agence d'évacuer est bel et bien légale », nous confirme une responsable à l'ANP. Dans un souci de lever l'ambiguïté et pour prouver que l'autorité portuaire avait procédé indûment au sabordage, un des membres du nouveau comité de coordination, qui requiert l'anonymat, nous avoue que notre confrère, la chaîne de télévision 2M, a filmé en direct le scandale en présence des huissiers de justice. Pour ce faire, l'ANP avait dû recourir aux services de la société Netrox, selon une source digne de foi. « Une fois à bord, le personnel avait ouvert les vannes ou les prises pour que l'eau pénètre et remplisse le bateau », explique Zebdi. Dans la foulée et puisque un malheur n'arrive jamais seul, le coût de la décision de transgresser la loi pèse doublement. Primo, les pertes financières des « victimes » s'élèvent, selon elles, à plus de 400 millions de dirhams (un bateau vaut entre 10 et 10.5 millions de DH). Pour plus de détails, les sociétés Royal Fisheries, Trefoil& Agrapelit estiment avoir perdu 9 bateaux, la société El Baraka 6, Somathon 4, Général Fisheries1…pour ne citer que ces exemples. Secundo et c'est là que le bât blesse, cette « attaque à la propriété privée » porte atteinte également à l'écosystème marin. À un moment où le pays s'engage fermement à intégrer la Charte de l'environnement parmi ses stratégies et de rompre avec les activités destructrices de la faune et de la flore, mettant ainsi un terme à la pollution maritime. «C'est décevant. L'agence n'avait même pas pris l'avis des autres départements ministériels, en l'occurrence, le département de la Pêche maritime et celui de l'Environnement », se désole, Abderrahman El Yazidi, le secrétaire du Syndicat des officiers et marins pêcheurs de haute mer. Cette quête de la facilité interroge et à plus d'un titre. D'abord, « sur le niveau des compétences » des cadres en charge de la gestion de l'ANP. « Cette opération intimidante contredit même les prérogatives de la police du port au vu du Dahir de 1961 », argumente El Yazidi. Et d'ajouter qu'«on ne restera pas les bras croisés. On a entamé les démarches pour exercer un recours en annulation de cette décision devant le Tribunal. Objectif : être indemnisés des préjudices causés », fulmine-t-il. Elle interroge aussi sur la protection des biens sur l'impartialité et l'indépendance de la justice au Maroc. Flashback L'agence aurait péché Pour la petite histoire, cette affaire trouve ses racines, lorsque l'année dernière, suite aux dégâts qu'ont subis plusieurs dizaines de barques de pêcheur dans le port d'Agadir. Et pour cause, les déferlantes des vagues d'une mer houleuse qui ont provoqué le déplacement des chalutiers et les pousser vers ces barques. Jugeant illégales la présence de ses bateaux qui avaient gêné les activités portuaires, l'ANP a agi ainsi. Selon le nouveau comité de coordination, l'agence a péché par le fait qu'elle a mélangé et les vieux bateaux et ceux séquestrés pour des causes de redressement judiciaire.