Un marché estimé à 5,5 milliards d'euros en Europe. 4,5 milliards pour l'alimentation. 1 milliard pour la restauration rapide. Deux fois plus que le bio ! Le marché du halal est estimé au double de celui du bio en Europe. Selon l'Institut Solis, il serait estimé à 5,5 milliards d'euros pour l'année 2010. Au delà des gesticulations politiciennes qui ne manquent pas de rebondir sur tout ce qui touche à la dimension communautaire en Europe, le commerce et le marketing inscrits dans une dimension pragmatique ne semblent pas se soucier des atermoiements des politiques. En février dernier, Quick avait lancé sa phase de test à Roubaix dans le nord de la France et s'était attiré les foudres d'une bonne part de la classe politique l'accusant de promouvoir le communautarisme et de tenter d'imposer un mode de vie particulier à l'ensemble de la population locale. 5 mois plus tard, ce sont huit autres points de vente du géant de la restauration rapide qui se lancent sur la niche du halal et seront suivis dans la foulée par six autres. Phénomène nouveau ou tendance lourde, l'avenir nous le dira. Initié il y a plus de dix ans, le marché croît tout de même d'environ 10% par an selon une étude de Xerfi et d'autres enseignes sont déjà présentes sur le créneau, comme le distributeur Casino qui référence 400 produits halal dont 30 sous sa propre marque ou le géant Nestlé pour qui l'opportunité identifiée a été estimée à 20% de croissance par son vice-président Fritz Fan Dick. Le marché mondial, estimé à quelques 100 milliards d'euros est à l'esprit de tous les acteurs du secteur agro-alimentaire qui y voient un relais de croissance unique face à l'essoufflement des cibles actuelles. Il faut dire que globalement, le marché du halal, embryonnaire et peu organisé attend encore son leader, d'autant que l'étude menée par Solis fait ressortir le manque de visibilité pour les marques leader traditionnelles au profit de marques « ethniques » qui se taillent la part du lion dans la configuration actuelle. Aujourd'hui, en France, qui représente encore le principal marché en Europe pour cette offre, 80% de la viande halal est toujours vendue dans les circuits traditionnels. Cependant, le marché est bien moins organisé qu'aux Pays-Bas, ce qui fait craindre aux acteurs français de voir passer sous leur nez la fameuse poule aux oeufs d'or. Mais la France, sur le marché mondial représente bien peu par rapport à des pays comme la Malaisie ou l'Indonésie que tous les salons spécialisés courtisent. Et pour cause. Avec une population majoritairement musulmane et au pouvoir d'achat important, ces pays sont l'objet de toutes les attentions des acteurs du secteur. Il faut bien entendu distinguer le marché des produits de base (carcasses) des produits transformés. Pour les premiers, le Brésil, la Nouvelle Zélande, l'Australie et les autres producteurs traditionnels sont déjà présents sur le marché, puisqu'ils approvisionnent une bonne partie de la Planète dont les pays musulmans comme l'Arabie Saoudite, l'Egypte, ou encore le Maroc. Le défi se situe davantage sur le segment des produits transformés et de la restauration. Partant d'une réalité sociologique, les acteurs de la distribution et de la restauration ont fini par comprendre l'intérêt d'une offre spécifiquement halal et s'activent à lui donner une place de choix dans leur offre. Alors que le discours politique se crispe en Europe et ailleurs, stigmatisant une communauté parmi les autres, le marketing pourrait être le prochain vecteur d'intégration. Le pouvoir de l'argent et des intérêts financiers pourrait, pour une fois, en supplantant les discours passéistes des politiques, contribuer à banaliser davantage la place des français et autres Européens «d'origine étrangère» parmi leurs concitoyens.