Un rapport accablant de l'ONU fait état de dix ans de massacre au Congo, entre 1993 et 2003. Les soldats rwandais sont soupçonnés de faits de «génocide», commis entre 1996 et 1998. Un rapport de l'ONU du Haut-Commissariat aux droits de l'homme dresse un bilan accablant de dix ans de crimes en République Démocratique du Congo (RDC), de 1993 à 2003. Le Congo a été déchiré au cours de cette période par deux guerres, de 1996-1997 puis de 1998 à 2003. Les violences qui déchirent aujourd'hui le Nord-Kivu, dont les viols collectifs révélés la semaine dernière, découlent de ces précédents conflits. Le rapport d'environ 600 pages, dévoilé avant publication par le journal Le Monde, révèle notamment qu'au cours de la première guerre en RDC, de 1996 à 1998, certains faits commis par les soldats rwandais pourraient être qualifiés d'actes de génocide. Les enquêteurs estiment que durant cette période, «les attaques systématiques et généralisées (contre des Hutus réfugiés en RDC) révèlent plusieurs éléments accablants qui, s'ils sont prouvés devant un tribunal compétent, pourraient être qualifiés de crimes de génocide». Ces actes de guerre sont liés au génocide survenu au Rwanda, pays frontalier, de 1993 à 1994. Durant cette période, une guerre civile a opposé les ethnies Hutu et Tutsi, conduisant à la mort d'environ 800.000 Tutsi. Suite à la prise de pouvoir à Kigali du Front patriotique rwandais (FPR) à majorité tutsie, plus d'un million de Hutus du Rwanda s'étaient réfugiés sur le territoire de la République Démocratique du Congo, appelé à l'époque Zaïre. Le Monde affirme que le président rwandais, Paul Kagamé, récement élu avec 93% des voix, a tenté d'empêcher la publication de ce rapport, en menacant de retirer ses troupes des opérations de l'ONU en cas de fuites dans la presse. Le Rwanda est en effet un des plus gros contributeurs africains de casques bleus, avec 3300 hommes actuellement déployés au Darfour. Le Monde précise toutefois que le rapport n'incrimine pas que le Rwanda. 21 groupes armés irréguliers et 8 armées nationales, dont l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) et l'Armée patriotique rwandaise (APR), sont accusés. L'APR, une force armée tutsie dirigée par Paul Kagamé, aurait commis ces exactions en RDC, alors qu'elle poursuivait officiellement des génocidaires hutus ayant quitté le Rwanda. Elle s'était alliée à l'époque à l'AFDL, du congolais Laurent-Désiré Kabila. Les troupes congolaises avaient ainsi profité du soutien des voisins rwandais pour renverser le dictateur Mobutu Sese Seko. Partis de l'est, près de la frontière rwandaise, les insurgés congolais avaient réussi à se rendre jusqu'à Kinshasa, à l'extrémité ouest du pays, pour prendre le pouvoir. Le Haut Commissariat aux droits de l'homme fait état de la «nature systématique, méthodologique et préméditée des attaques contre les Hutus (qui) se sont déroulées dans chaque localité où des réfugiés ont été dépistés par l'AFDL/APR sur une très vaste étendue du territoire». «La poursuite a duré des mois et à l'occasion, l'aide humanitaire qui leur était destinée a été sciemment bloquée, notamment en province orientale, les privant ainsi d'éléments indispensables à leur survie», indique le rapport. Définition d'un génocide : Actes commis dans l'intention de détruire, intégralement ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. Convention des Nations Unies pour la prévention et la répression du crime de génocide.