Samedi 1er mai. L'avenue des FAR à Casablanca fourmillait de centaines de salariés, tous enrôlés sous la bannière de l'UMT (Union marocaine du travail) de Mahjoub Ben Seddik. L'avenue est devenue par la force du temps et à chaque célébration de la fête du Travail, le territoire de l'UMT, le plus ancien des syndicats du pays. Dix heures passées, la marée ouvrière se met en branle. Les banderoles sont presque figées alors qu'un soleil de plomb repousse les quelques spectateurs et les éléments des forces de l'ordre, très discrets, à se cacher à l'ombre des arbres desséchés de l'avenue. Grands et petits taxis, véhicules de dépannage rouges, et autres autocars animent la marche par des klaxons tonitruants. Les affiliés du syndicat se sont regroupés par entreprises et pratiquement tous les secteurs sont représentés : transport, pêche, métallurgie, textile... Elément frappant, à quelques exceptions, les slogans affichés sur les banderoles ou scandés par les marcheurs du 1er mai se ressemblent. À les lire, Abbas El Fassi, qui garde encore l'espoir de convaincre les classes ouvrières de se maîtriser, devrait avoir déjà déchanté : poursuite du mouvement syndical pour l'amélioration du niveau de vie de la classe ouvrière et le respect de ses droits, unification des rangs pour faire face aux tentatives portant atteinte à l'intérêt de la classe ouvrière, critique du processus du dialogue social et de l'approche unilatérale du gouvernement,... L'Union n'a pas manqué de réclamer une réponse favorable et urgente aux revendications légitimes des fonctionnaires, relatives notamment à une augmentation des pensions de retraite, une réforme des caisses de retraite, une action pour la préservation du pouvoir d'achat des citoyens et une promotion exceptionnelle pour l'ensemble des fonctionnaires. La centrale syndicale a également appelé à la titularisation des employés temporaires dans tous les secteurs, à la généralisation de la formation continue des salariés, à une augmentation générale des salaires et à une révision des régimes des indemnités. Elle a aussi revendiqué une application saine du Code du travail, une normalisation du SMIG dans tous les secteurs et une solution à la situation des diplômés en chômage. Même son de cloche chez les autres syndicats. L'Union nationale du travail au Maroc (UNTM), syndicat proche du PJD, a appelé par la voix de son secrétaire général à la nécessité pour le gouvernement de s'engager dans des dialogues sectoriels en marge du dialogue social et de procéder à la mise en oeuvre des résultats de ce dialogue, en incitant les établissements concernés à s'y engager pleinement. Pour sa part et dans son allocution, Abderrahmane El Azzouzi, secrétaire général de la Fédération démocratique du travail (FDT), proche de l'USFP, a exprimé la volonté de la FDT de poursuivre la coordination avec les autres centrales syndicales pour mieux assurer les prochains rounds du dialogue social. La FDT, qui célèbre la fête du travail sous le signe «Garantie des droits fondamentaux: un pilier pour une édification régionale démocratique et solidaire», estime que la défense des droits des travailleurs passe, d'abord, par la satisfaction de leurs revendications majeures, dont la réforme des régimes de retraite et des mutuelles.À ce propos, la FDT appelle à la création d'un Fonds d'allocation chômage destiné à indemniser les travailleurs qui perdent leur emploi et l'activation de l'adoption d'un statut régissant les syndicats.La CDT, dont le meeting a été marqué par l'absence de Noubir Amaoui, a plaidé pour la revalorisation des régimes salarial et indemnitaire en vigueur à la fonction publique et dans le secteur privé. Le syndicat a notamment annoncé son intention d'organiser le 9 mai à Rabat une marche protestataire. Cette décision fait suite à une autre décision prise le 17 avril dernier par le Conseil national de la CDT relative à l'organisation de marches à travers toutes les régions du Royaume. Pour le Conseil du syndicat, la raison de ce mouvement est d'inciter le gouvernement à «répondre favorablement aux revendications de la classe ouvrière».À Rabat où elle a décidé d'organiser son meeting, l'Union des syndicats autonomes du Maroc (USAM), un nouveau-né dans le paysage syndical du pays, avec vingt syndicats et une association affiliés, revient sur la nécessité de réviser la grille des salaires pour soutenir le pouvoir d'achat de la classe ouvrière. Grande absente de ce 1er mai, l'Union générale des travailleurs marocains (UGTM) avait décidé début avril de boycotter les fêtes de cette journée syndicale. Selon le syndicat proche de l'Istiqlal, cette décision intervenait suite à la persistance des atteintes à nombre de libertés syndicales et au traitement réservé au dossier revendicatif du syndicat. Ce dernier insiste notamment sur la nécessité de promulguer une nouvelle loi relative aux syndicats professionnels et une autre réglementant le droit à la grève. Hamid Chabat, secrétaire général de l'UGTM, avait indiqué auparavant que la liberté syndicale est un droit constitutionnel, relevant que l'UGTM a participé au premier round du dialogue social avec le gouvernement sur la base d'un dossier revendicatif réaliste et bien ficelé, qui comprend des données chiffrées et précises. Le 7 mai, l'UGTM sera de la partie lors du nouveau round du dialogue social, que le ministre de la Modernisation des secteurs publics veut désormais institutionnaliser.