«Nous avons été surpris par le contenu du rapport de la Cour des comptes !». C'est en ces termes que Jamal Ba-Amer, directeur général de la Samir (Société anonyme marocaine de l'industrie du raffinage), a exprimé son «étonnement» suite aux récentes conclusions de la Cour des comptes concernant cette dernière, ressentie comme un «couperet» au sein du groupe. La Cour a en effet statué que l'Etat marocain doit récupérer 3,5 milliards de dirhams auprès de la Samir et que cette dernière n'a pas «respecté ses engagements, notamment en matière d'investissement». Pour Ba-Amer, le rapport n'exprime que le point de vue de la Cour des comptes. «Les auditeurs de la Cour ne nous ont pas consultés et ne se sont pas déplacés chez nous pour réaliser leur audit», répond pour sa part un membre du comité de Direction du raffineur. Ba-Amer, qui présentait mardi les résultats financiers 2009 du groupe, a aussi déclaré que la Samir «n'a pas été informée officiellement du contenu du rapport la concernant». «Ce rapport porte atteinte à l'image du groupe, qui plus est côté en Bourse», fulmine Ba-Amer, qui parle d'une réunion prochaine du Conseil d'administration du raffineur pour trancher sur cette question. Rappelons que la Cour des comptes a recommandé au ministère de l'Energie et des mines «une refonte du système de reprise des prix des produits pétroliers vis-à-vis de la raffinerie» et de «récupérer 3,5 milliards de dirhams, engrangés entre 1999 et 2002» auprès du raffineur. Pour le ministère, le contrat de privatisation des «raffineries de Mohammedia a été signé par le ministère chargé de la Privatisation, à qui il appartient d'appliquer les mesures prévues par la loi à ce sujet et non le ministère de l'Energie et des mines». Par ailleurs, Ba-Amer a annoncé que le ministère de tutelle tiendra prochainement un point de presse, où la Samir devrait exprimer son point de vue officiellement. La «Corral» associée à la restructuration de la dette Au-delà du remue-ménage suscité par le rapport de la Cour des comptes, l'annonce des résultats de la Samir a été une occasion pour le top management pour clarifier un certain nombre de points concernant le raffineur. D'abord, le programme de modernisation et de restructuration du groupe. On annonce ainsi que Coral Holding, maison mère de la Samir, prendra part au chantier de restructuration de la dette de celle-ci. Un sujet en négociation avec les banques, selon Ba-Amer (C'est la Banque Populaire qui a été mandatée en janvier 2010 pour améliorer les fondamentaux financiers de la société). Deux pistes sont à l'étude : injection de fonds propres ou augmentation du capital de la société. La restructuration de la dette a d'ailleurs poussé le conseil à affecter le résultat net de 555 millions de DH en report à nouveau. La décision sera proposée à la prochaine AGO qui se tiendra le 1er juin. Pour ses perspectives de développement en 2010, le groupe dit vouloir améliorer ses parts de marché local (une bonne partie du chiffre d'affaires est réalisée localement). Sauf que les ambitions de la Samir sur le marché national ne se réaliseront pas «aux dépens de nos marges», nuance Jamal Ba-Amer. Ce dernier faisait allusion au débat soulevé par certains distributeurs d'hydrocarbures quant à la cherté des prix imposés par Samir. Pour Jamal Ba-Amer, ceci est un «faut débat». «Les prix subissent la loi du marché. Des négociations sont en cours avec certains distributeurs pour des tarifs préférentiels. Ceux qui ne veulent pas acheter chez nous n'ont qu'à importer directement», souligne le directeur général du raffineur. «La raffinerie Jorf Lasfar ne peut être opérationnelle que dans 8 ans» La deuxième raffinerie de produits pétroliers prévue à Jorf Lasfar nécessitera plus de huit ans pour être opérationnelle, d'après les estimations du directeur général de la Samir. Selon les premiers éléments, le projet, dont les études de faisabilité seraient déjà bouclées, consiste en une raffinerie d'une capacité de quelque 200 barils par jour. Le site sera destiné à produire 80% à l'export. Lors d'une sortie médiatique, Amina Benkhadra, ministre de l'Energie et des mines, avait déclaré que le tour de table de la société gestionnaire «pourrait être ouvert à tout autre partenaire, y compris des nationaux s'ils en manifestent l'intérêt». Rappelons que la capacité de raffinage de la Samir est aujourd'hui de 6,5 millions de tonnes de pétrole par an, depuis la fermeture de la raffinerie de Sidi Kacem (1,5 million de tonnes). D'où l'urgence d'une deuxième unité de production. Les besoins en produits pétroliers sont assurés, en grande partie, par la raffinerie «La Samir». En effet, pour l'année 2007, celle-ci a assuré l'approvisionnement du marché national en produits pétroliers de base à raison de 55%, le reste ayant été assuré par des importations qui concernent particulièrement le butane dont les besoins sont couverts à 92% par des importations, le propane à 76% et le gasoil à 48%. Hydrocracking, les émanations de gaz maîtrisées En mars 2010, Samir a procédé au démarrage de son unité d'hydrocracking (valorisation optimale des produits pétroliers). Le raffineur table désormais sur une utilisation de 100% de sa capacité. Celle-ci s'élève actuellement à 6,5 millions de tonnes. Au début de ce mois, des informations avaient fait état d'émanations de gaz toxiques, lors du démarrage de la station. «Un incident qui a suscité beaucoup de bruit pour rien», estime Ba-Amer. Selon lui, la Samir a consenti beaucoup d'efforts pour l'amélioration de la qualité de ses produits. Il parle d'un programme réalisé pour le traitement des émanations de gaz. Valeur aujourd'hui, ce programme a permis d'en maîtriser 24%. Le DG du raffineur n'a pas raté l'occasion pour remettre sur la table le dossier de l'introduction du gaz naturel au Maroc, «pour en finir avec les émanations de gaz. Un projet d'envergure et seule une décision du gouvernement pour lancer ce chantier», dit-il.