À l'occasion de la 1re Semaine de l'architecture initiée par l'UPF, le wali de Fès-Meknès a présenté un bilan d'étape des programmes de réhabilitation de la médina (2010-2025). Un investissement de 3 MMDH aux retombées significatives, souligné lors de cet événement dédié au patrimoine et à l'avenir urbain. L'Université privée de Fès (UPF), à travers son Ecole supérieure des métiers de l'architecture et du bâtiment (ESMAB), a organisé, du 16 au 18 avril, la première édition de sa «Semaine de l'architecture». Cet événement ambitionne de devenir un rendez-vous incontournable pour la célébration et la promotion de l'architecture et de l'urbanisme ainsi que pour la préservation du riche patrimoine marocain. Conçue comme un carrefour d'échanges et de réflexion prospective, cette semaine thématique a réuni un parterre d'experts et de professionnels du secteur, ainsi que la nouvelle génération d'architectes et d'urbanistes en formation et les futurs bacheliers, tous conviés à penser la ville de demain. Réhabilitation de la médina : un bilan chiffré L'ouverture de cette Semaine de l'architecture a été particulièrement marquée par l'intervention de Mouaad Jamai, wali de la région de Fès-Meknès. Ancrant résolument cette initiative dans les réalisations tangibles sur le terrain, le wali a dressé un bilan exhaustif des «Programmes de mise en valeur et de réhabilitation de la médina de Fès». Pilotés sous l'égide de la wilaya et mis en œuvre principalement par l'Agence pour le développement et la réhabilitation de la ville de Fès (ADER-Fès), ces programmes couvrent la période 2010-2025 et représentent un investissement conséquent de trois milliards de dirhams. Jamai a détaillé l'ampleur de ces interventions, qui totalisent, à ce jour, 399 projets distincts et ont permis le traitement de 4.671 bâtisses menaçant ruine. L'impact social de ces opérations est considérable, touchant directement près de 20.000 bénéficiaires au sein de la cité historique. Le wali a ensuite illustré la diversité des composantes de ces programmes, dont plusieurs sont en cours d'achèvement : 32 projets concernent la restauration de monuments historiques et lieux emblématiques ; 100 projets visent à redynamiser l'artisanat et le commerce, secteurs vitaux de la médina ; 95 interventions sont dédiées aux lieux de culte et de spiritualité ; 119 concernent les lieux de bien-être ; 17 portent sur la réhabilitation du bâti et l'amélioration du paysage urbain, avec des réalisations notables comme le Jardin Bab Lamer (en cours de finalisation) ; 11 d'entre eux concernent les équipements de proximité essentiels ; et enfin, 25 projets visent à améliorer l'accessibilité, comme en témoignent les nouveaux parkings stratégiques de Bab Jdid et Bin Lamdoun, qui ont fluidifié la mobilité aux abords de la médina de manière significative. Des impacts socio-économiques mesurables Au-delà de la préservation physique, le wali a particulièrement insisté sur les retombées socio-économiques tangibles de ces programmes, chiffres à l'appui. Les données de 2010 à 2023 ont permis de mettre en évidence une croissance remarquable. Dans le secteur du tourisme, le nombre d'unités d'hébergement classées a plus que doublé (+123%), la capacité litière a augmenté de 132% (passant de 1.056 à 2.448 lits), et le nombre de nuitées enregistrées a connu une hausse de 81%. Parallèlement, le trafic passagers à l'aéroport de Fès-Saïss a bondi de 131%, atteignant 1,7 million de voyageurs en 2023, signe de l'attractivité retrouvée de la destination. Le secteur vital de l'Artisanat n'est pas en reste. Jamai a révélé que le chiffre d'affaires du secteur a grimpé de 154%, atteignant 4,32 MMDH. La main-d'œuvre employée a crû de 74%, passant de 23.000 à 40.000 artisans. Un indicateur de la montée en gamme et de la meilleure structuration du secteur, encouragée par la réhabilitation et la conversion de nombreux locaux, est l'explosion du nombre d'artisans labélisés. Il est ainsi passé de 21 à peine en 2010 à 433 en 2023, soit une augmentation spectaculaire de 1.962%. Pour le wali, ces succès démontrent sans équivoque la pertinence d'une approche intégrée, où architecture, urbanisme, préservation patrimoniale et développement socio-économique se renforcent mutuellement. Fès, source d'inspiration pour la «relève de demain» Intervenant à l'ouverture de la semaine de l'architecte, Lahlou Mohammed Aziz, président de l'Université privée de Fès, a souligné l'importance de cette Semaine de l'architecture pour les futurs architectes, qu'il a qualifiés de «relève de demain». Insistant sur la valeur de la collaboration entre toutes les parties prenantes – institutions, professionnels, académiques et société civile – il a rappelé le statut unique de Fès, «ville millénaire», qui n'est pas seulement un pôle de développement économique mais surtout une source d'inspiration fondamentale. Lahlou a lancé un appel aux jeunes étudiants, leur conseillant de puiser dans ce riche héritage architecturo-culturel. Il les a exhortés à porter Fès dans leurs cœurs et dans leurs futurs projets professionnels, et à devenir les ambassadeurs de cette cité qu'il considère comme le noyau pour l'avenir du Maroc et de l'Afrique. Un projet pour reconnecter la ville à son fleuve Oued Fès La cérémonie d'ouverture a également été enrichie par deux conférences. Mounia Bennani, architecte-paysagiste et présidente de l'Association des architectes-paysagistes du Maroc (AAPM), a animé une présentation sur le thème «Ville-paysages au Maroc : Histoire et projets». Evoquant l'héritage de la «ville-paysages» développée sous le Protectorat, elle a présenté le projet d'aménagement paysager des rives de l'Oued Fès, qu'elle mène actuellement. Ce projet vise à reconnecter la ville à son fleuve, la «mémoire vivante» des Fassis (Oued El Jawahir), en renaturalisant 5,5 km de berges pour lutter contre l'érosion et la pollution, tout en intégrant les usages agricoles et créant des espaces publics. Dans une seconde conférence, Mohamed Es-Semmar, historien spécialiste de l'architecture islamique, a exploré le patrimoine architectural et immatériel du Maroc. Il a mis en lumière la singularité du legs marocain, fruit d'un métissage harmonieux entre racines locales et apports civilisationnels successifs. Une filière d'avenir ancrée dans son territoire Mohammed Ouazzani Jamil, vice-président de l'UPF, a contextualisé cette Semaine de l'architecture comme la première d'un cycle d'événements thématiques visant à valoriser les différentes disciplines de l'université. Il a rappelé que la nouvelle filière Architecture, ouverte pour l'année universitaire 2024-2025, répond à un besoin avéré au niveau national et particulièrement pour la région Fès-Meknès. L'objectif est d'accompagner les projets structurants en matière d'architecture, de paysage et d'urbanisme, et de participer à la sauvegarde du patrimoine culturel et artisanal local. Ouazzani Jamil a ajouté que l'université ambitionne de contribuer au rayonnement international de ce patrimoine, notamment via la recherche et l'utilisation d'outils modernes comme l'intelligence artificielle, et de soutenir les artisans dans leur transition numérique. Mehdi Idrissi / Les Inspirations ECO