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Le e-recrutement bat son plein
Publié dans Les ECO le 12 - 01 - 2010

Pour chercher du boulot, tous les candidats connaissent désormais l'astuce. Plus besoin d'imprimer une pile de CV et de lettres de motivation. Plus besoin non plus de courir les rues à longueur de journée pour faire du porte à porte chez les entreprises. On fait un tour sur le net et, en quelques clics, le CV est posté chez le recruteur potentiel, via un portail d'emploi online. Fini donc les tracasseries d'antan. L'usage d'Internet a irréversiblement changé les habitudes des individus et les sites d'emploi en ligne ont révolutionné en un temps record le processus de recrutement des entreprises. Autrefois, on estimait en moyenne deux à trois mois pour boucler un cycle de recrutement. Aujourd'hui malgré la rareté des profils, deux à trois semaines suffisent.
Aussi, les portails en ligne permettent de ratisser large. Les chercheurs d'emplois peuvent désormais postuler aux offres des quatre coins du monde et gagner du temps lors de leur prospection d'emploi. Cependant, pour maximiser ses chances de tomber sur les bonnes offres, un candidat doit bien connaître le marché virtuel de l'emploi. Cette connaissance est aujourd'hui fondamentale car, grâce à l'engouement que suscite le créneau, une flopée de portails d'emploi existe sur le net.
Toutefois, elles n'ont pas toutes ni la même visibilité ni la même capacité à drainer de l'audience et attirer les annonceurs d'emploi. Or, c'est véritablement de ces deux critères que dépend la chance de tomber sur les bonnes opportunités. Au Maroc, les portails d'emploi se développent également d'une manière presque hallucinante. Ce jeune marché qui n'a tout juste que quatre années existence (l'emploi en ligne apparaît véritablement en 2006, avec le lancement du portail Rekrute.com) compte aujourd'hui près d'une vingtaine d'acteurs. Il devient dès lors important de se poser des questions sur le mode de fonctionnement de ce marché virtuel. Comment se développe-t-il? Comment se joue le jeu concurrentiel entre les acteurs et quels sont leurs facteurs clés de succès? Décryptage.
Structure du marché
La grande majorité des portails marocains ont vu le jour durant la période 2007-2008. Ainsi que l'ont souligné Philippe Montant, directeur général de Rekrute, et Hicham Lakhmiri, directeur général d'Amaljob, «si le marché devient de plus en plus attrayant, c'est aussi parce que c'est un créneau prometteur». Toutefois, en l'état actuel des choses, tous les acteurs ne tirent pas leur épingle du jeu, et ceci pour deux raisons fondamentales. D'abord, parce que les pionniers (Rekrute, Amaljob et Menara) ont vite gagné en notoriété et en savoir-faire, et qu'il est difficile de faire le poids face à eux. Ensuite, parce que parmi la vingtaine de portails existant aujourd'hui, très peu ont un modèle économique viable. Aussi, dans certains cas, les créateurs de portails n'en font pas leur métier principal. C'est sur ces deux réalités que repose toute la différence entre les acteurs du marché. Ces derniers peuvent ainsi être classés en trois catégories. La première catégorie est composée des portails véritablement professionnels, s'appuyant sur une logique entrepreneuriale, disposant des moyens nécessaires et d'une vision stratégique plus ou moins claire: Rekrute, Amaljob, Menara, Bayt.com. Ils sont les véritables détenteurs du marché et réalisent l'essentiel du volume des affaires. En 2009, par exemple, les offres annoncées sur Rekrute concernent plus de 50.000 postes, avec un nombre total de candidatures dépassant 1,4 million. Chez Amaljob, le nombre de candidats enregistrés dans la base de données est estimé à 150.000, avec un nombre total d'annonceurs/clients s'élevant à 1.000.
La deuxième catégorie regroupe la majorité des acteurs. Ceux-ci pèsent peu sur le marché et affichent une notoriété jusque-là très faible. Selon Philippe Montant, cela s'explique par le fait que, «pour réussir sur le marché de l'emploi en ligne, il faut comprendre comment fonctionne le web.
Or, cette expertise manque à la plupart de ceux qui se lancent dans le métier». La troisième catégorie, quant à elle, est constituée de portails tout récemment lancés (courant 2009), dont carrieres.ma et embauche.ma. Contrairement à la deuxième catégorie, ces nouveaux entrants apportent une certaine originalité, qui pourrait probablement imprimer une nouvelle cadence au développement du marché. Qu'en est-il de la situation concurrentielle ?
Comportements et tendances
Malgré sa jeunesse et la non professionnalisation du grand nombre des acteurs présents sur le créneau, une rude concurrence s'annonce sur le marché marocain de l'emploi en ligne. Cela influence surtout la structure des prix, dont la tendance est de plus en plus à la baisse. Ainsi, alors qu'une annonce d'emploi coûte 6.000 dirhams chez Rekrute, elle est de 4.000 dirhams chez Amaljob et retombe à 1.200 dirhams chez Bayt.com. Chez les autres acteurs l'annonce est même souvent gratuite. Toutefois, cette réalité ne perturbe pas pour l'instant les leaders du marché. Ces derniers estiment que le principal défi ne se trouve pas au niveau de la pratique des prix, mais au niveau de l'innovation. À ce propos, souligne Philippe Montant, « la question du prix déstabilise peu car, pour les annonceurs d'emploi, le budget n'est pas la contrainte fondamentale. Ce qu'ils recherchent, c'est l'efficacité dans leur processus de recrutement». Sur ce volet en effet, si les pionniers du marché ont pris de l'avance en
investissant non seulement dans les innovations technologiques et la communication-marketing (Rekrute, par exemple consacre
3 millions de dirhams à son marketing,
soit 25% de son chiffre d'affaires), les nouveaux venus en 2009, font également preuve d'initiative.
On s'achemine désormais vers l'adoption du web 2.0 avec une diversification des services proposés. Carrieres.ma et embauche.ma ont fait leur entrée en introduisant des services d'accompagnement aux candidats tels les simulations d'entretien, le coaching virtuel et des bilans de compétences. Des innovations sont également prévues pour attirer les annonceurs, notamment grâce à la vidéo d'entreprise. Cette tendance ira sans doute crescendo et modifiera à terme l'organisation du marché virtuel de l'emploi. Désormais pour figurer en tant qu'acteur de l'emploi en ligne, créer seulement un site web ne suffira plus. Il faut aussi disposer d'une structure et des moyens nécessaires pour en assurer le suivi et le développement.
Khadija Boughaba,:« Il y a de la place pour tout le monde »
Les Echos : Vous êtes le premier cabinet RH marocain à vous positionner comme acteur sur le marché de l'emploi en ligne. Qu'est-ce qui justifie ce choix?
Khadija Boughaba : Nous nous sommes lancés dans l'emploi en ligne pour deux raisons. En tant que cabinet RH, nous avons l'expertise nécessaire qui nous permet de mettre en contact les employeurs et les candidats, mais aussi de proposer à ces derniers un accompagnement virtuel qui les aidera à mieux optimiser leur recherche d'emploi. C'est donc un développement naturel pour notre cabinet.
N'y a-t-il pas là un conflit d'intérêt entre votre rôle de cabinet et celui de site d'emploi? Les autres cabinets qui sont vos concurrents, ne seront-ils pas réticents à faire des annonces sur votre site?
Nous y avons pensé avant de nous lancer, mais ne voyons aucun risque. Tous les sites d'emploi ont le même principe, celui de recueillir des données et de constituer des bases de données de candidats et de proposer quelques services RH. Notre site peut donc être utile même aux autres cabinets. D'ailleurs INVEST RH est aussi client du portail carrieres.ma. Car, pour éviter toute confusion, nous avons prévu une page «offre directe» qui redirige directement le candidat vers le site du cabinet ou de l'entreprise qui a émis l'annonce.
Il y a de plus en plus d'acteurs sur le marché de l'emploi en ligne. Pensez-vous, qu'il y'a encore de la place pour de nouveaux entrants comme vous?
Il y a de la place pour tout le monde, du moment où le marché de l'emploi se porte bien et que le recrutement en ligne se substitue à la méthode classique. Ceci dit, il ne sera pas facile de sortir du lot quand on n'est pas professionnel. Etre pro, sur ce marché c'est, avant tout, être capable d'apporter des réponses aux problématiques de recrutement grâce à la mise en place de bons outils permettant de faciliter la vie aux entreprises et aux candidats.
Seul 10% des offres d'emploi font l'objet d'annonces
L'emploi en ligne marocain a connu un essor considérable durant les quatre dernières années. Un commentaire signé Philippe Montant, DG de Rekrute. Selon lui, le recrutement en ligne est aujourd'hui le premier moyen utilisé par les chercheurs d'emploi au Maroc (source enquête The Network – Intelligence Group – ReKrute.com de juillet 2009). «Néanmoins, le potentiel de développement de ce marché est encore important, et devrait accompagner le développement de l'économie nationale dans les prochaines années», tient-il à préciser. Toutefois, le mode de recrutement prépondérant au Maroc reste le relationnel. «Les annonces représentent 10% de l'ensemble des offres, selon nos estimations», ajoute Philippe Montant. Néanmoins, on constate aujourd'hui que les recruteurs font de plus en plus appel au recrutement en ligne . Le nombre de postes proposés sur ReKrute cette année a crû de 33%, alors qu'en parallèle de nouveaux portails sont apparus. En effet, une quinzaine de sites de recrutement ont été lancés ces deux dernières années et cela prouve bien qu'il y a de la place pour tout le monde. Mais les nouveaux entrants doivent faire preuve d'originalité dans leur positionnement et leur offre pour contribuer au développement harmonieux du marché à long terme.


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