Dans la course à l'intelligence artificielle, la Chine a récemment vu les États-Unis prendre un temps d'avance avec l'avènement de ChatGPT. Mais Pékin est loin d'avoir dit son dernier mot. Le futur se concevra à grand renfort d'intelligence artificielle, et la tendance s'est confirmée ces derniers mois avec l'engouement suscité autour de ChatGPT, le robot conversationnel américain lancé en novembre, et capable de formuler en quelques secondes des réponses détaillées sur un large éventail de sujets. De simple curiosité à ses débuts, l'outil passe désormais pour indispensable, s'invitant dans toutes les conversations, au point d'être intégré au moteur de recherche Bing de Microsoft, dans la nouvelle version présentée en février. Une évolution scrutée avec la plus grande attention par la Chine, qui nourrit de grandes ambitions dans ce domaine. Pékin entend, en effet, se positionner à l'horizon 2030 comme le leader mondial de l'intelligence artificielle, amenée à révolutionner une multitude de secteurs, dont l'industrie automobile et la médecine. DES GÉANTS DÉJÀ POSITIONNÉS Dans l'Empire du milieu, le moteur de recherche Baidu a été le premier à annoncer travailler sur un équivalent local à ChatGPT, qui n'est pas accessible en Chine. Présenté le mois dernier à la presse, Ernie Bot, qui fonctionne en mandarin et vise uniquement le marché chinois, n'est pour le moment disponible qu'en version bêta. Alibaba, le géant du commerce en ligne, lui a emboîté le pas. Mardi, il a présenté «Tongyi Qianwen» (machine qui sait tout). De son côté, Tencent, géant chinois du web et du jeu vidéo (League of legends, entre autres), avance aussi secrètement sur un pro- jet de chatbot sur le même modèle que ChatGPT. UN SECTEUR À ENCADRER Malgré un intérêt certain pour les services d'intelligence artificielle, Pékin ne compte pas se lancer à corps perdu dans la course. L'un des premiers défis pour la Chine est d'encadrer juridiquement un champ qui suscite pas mal de scepticisme. L'Administration chinoise du cyberespace a publié mardi un projet de réglementation. Pour le régulateur, l'enjeu est de s'assurer que les contenus générés par intelligence artificielle reflètent «les valeurs socialistes fondamentales» et ne servent pas de tribune aux discours sur la subversion du pouvoir de l'État. Le pays surveille déjà étroitement son Internet et ses médias, avec une armée de censeurs qui effacent les contenus présentant la politique de l'État sous un mauvais jour ou de nature à créer de l'agitation. Un contrôle renforcé donc, également observé au niveau des réseaux sociaux. À la pointe en matière de réglementation des nouvelles technologies, Pékin avait déjà demandé l'an dernier aux géants de l'Internet de dévoiler leurs algorithmes, un secret généralement bien gardé. Le pays a, par ailleurs, durci en janvier l'encadrement de l'hypertrucage («deep- fake»), ces manipulations numériques des images de plus en plus réalistes et qui représentent un défi en matière de lutte contre la désinformation. Sami nemli avec agences / Les Inspirations ÉCO