Le phénomène de la spoliation foncière s'est atténué de manière significative. Au point de pousser à l'instauration de plusieurs mesures projetées en vue d'en renforcer la sécurité. L'état des lieux des actions entreprises dans le cadre de la lutte contre la spoliation foncière était à l'ordre du jour de la dernière réunion de cette année 2021 de la commission chargée du suivi de ce dossier. Le même seuil de vigilance sera gardé par cette structure qui est chargée du suivi judiciaire des affaires qui tombent sous le coup du dispositif pénal se rapportant à l'atteinte à la propriété foncière d'autrui. Lors de son intervention à cette occasion, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a précisé que les organes chargés de ce dossier «poursuivront le processus d'écoute de l'ensemble des intervenants ainsi que la prise en compte des efforts supplémentaires qui ont été consentis pour faire face à la spoliation». Le ministre a, également, dévoilé qu'un rapport «global» sera soumis à l'appréciation du Souverain, ce qui impose «de délimiter les dysfonctionnements et proposer les solutions pour les dépasser», a noté Ouahbi lors des travaux de cette commission élargie, qui englobe les principaux organes de veille sur la sécurisation juridique du foncier. Les mesures activées La coordination entre le ministère de la Justice, l'autorité judiciaire et le parquet général a permis de finaliser un programme d'action pour les dossiers qui sont de la compétence des juridictions. Le suivi a été généralisé à l'ensemble des tribunaux, indique le bilan établi par le département de la Justice, «ainsi que la formation des cadres chargés de la gestion de ces dossier». Le volet digital du suivi a été aussi renforcé avec l'intégration des notaires et des rédacteurs des contrats en vue de leur permettre d'accéder à des données jugées fondamentales pour cerner les cas d'usurpation de l'identité d'autrui. Il faut dire que la commission spécialisée dispose d'une feuille de route portant sur les révisions légales à apporter pour donner des garanties supplémentaires à la propriété immobilière. Les membres de la commission devront ainsi travailler de manière conjointe pour finaliser de nouveaux décrets relatifs à la mise en place d'un registre national des droits réels, d'un registre des sociétés civiles immobilières ainsi qu'à la fixation des modalités du dépôt électronique et de l'archivage des contrats. En ligne de mire, un traitement en amont des cas qui peuvent faire l'objet de mauvaise foi lors de la rédaction des contrats par les professions intégrées dans le champ d'application de la loi pénale. Parmi les actions urgentes, l'achèvement des modalités réglementaires du traitement judiciaire des dossiers déposés «dans des délais raisonnables», indique le bilan d'étape réalisé par le département de la Justice. Pour rappel, la commission devra poursuivre, en 2022, la même cadence de ses réunions, avec des réglages qui seront suggérés pour renforcer le volet dissuasif. La spoliation foncière reste, en effet, un sujet complexe qui relève des domaines civil, pénal et foncier, ce qui nécessite une forte coordination entre les diverses instances représentées au sein de la commission. À noter qu'un registre a été créé auprès du secrétariat greffe pour tous les contrats qui ont été élaborés dans le domaine foncier. Le bilan provisoire de l'année indique, de son côté, que ce sont 42 affaires qui sont soumises au verdict des magistrats spécialisés, dont 14 en appel, et 8 devant la Cour de cassation. L'inventaire qui a été réalisé pour les biens immobiliers, sous la menace de spoliation, sera quant à lui actualisé, avec plus de 4.000 terrains titrés sur les 8.209 qui ont été identifiés durant cette année. Des lacunes juridiques qui persistent Les dispositions juridiques, comprises dans le Code des droits réels, le Code pénal, le Code de la procédure pénale, et le Droit des obligations et des contrats (DOC), comportent certaines carences et lacunes nécessitant l'introduction d'amendements pour barrer la route aux auteurs de ces actes criminels et limiter la propagation de ce fléau. En attendant les recommandations qui seront formulées par la commission dans son rapport final, les réglages à apporter englobent la lutte contre les cas de falsification des procurations coutumières, l'unification de la sanction y afférente et l'organisation des opérations d'enregistrement des procurations. Une série de mesures ont été prises pour protéger les biens immobiliers délaissés, à travers l'inclusion de la mention "bien immobilier abandonné" sur le dossier de la conservation foncière concernée, et en incitant les conservateurs des biens immobiliers à faire preuve de vigilance lors de l'examen des transactions et du traitement des requêtes relatives aux biens immobiliers abandonnés. Pour rappel, le Maroc dispose de six millions de titres fonciers, avec plus de 350.000 titres fonciers qui sont produits annuellement. Younes Bennajah / Les Inspirations ÉCO