Attendue «pour fin octobre ou début novembre», comme l'avait confié préalablement Nizar Baraka aux Echos quotidien, la sortie du Maroc à l'international ne devrait finalement pas se faire avant la fin du mois de novembre. C'est en tout cas ce qui ressort des derniers échos au sein du ministère de l'Economie et des finances. Ce dernier préférerait attendre l'adoption du projet de loi de finances, prévue durant la troisième semaine de novembre avant de lancer son opération. En attendant, un consortium formé de trois banques internationales, à savoir Citibank, Barclays et Natexis, poursuit son travail pour préparer au mieux le «dossier» du Maroc. Il reste maintenant à savoir si les conditions des taux à cette période là seraient favorables ou pas au Maroc. À cette question, les analystes de la place ne manquent pas de souligner le flou qui entoure le sujet. D'un côté, il existe des craintes quant à la répercussion de la dernière sortie de Standard & Poors sur la prime de risque du royaume. L'agence de notation avait pour rappel revu les perspectives du royaume de «stables» à «négatives» et a placé la note du Maroc sous surveillance. Néanmoins, l'investment Grade, l'un des principaux atouts ayant permis au Maroc de réussir la dernière sortie de 2010, est pour l'heure maintenu. Aucun changement ne devrait y être apporté d'ici la concrétisation de la levée. La situation actuelle de la balance des paiements, avec notamment un effritement continu des réserves de changes est également un point que les investisseurs pourraient également considérer comme pénalisant pour le royaume. Actuellement, le stock en devises du royaume se situe aux alentours de quatre mois d'importations et le gouvernement s'engage à le maintenir à ce niveau au moins jusqu'à fin 2013. Cet engagement pourrait pousser le Trésor à recourir davantage à l'international pour se financer, chose qui augmenterait son niveau d'endettement extérieur. Le ralentissement de l'économie nationale en 2012, conjugué aux perspectives sombres au sein de nos principaux partenaires étrangers, n'arrangent également pas les choses. De meilleures perspectives économiques D'un autre côté, le marché s'attend à ce que le Maroc capitalise sur certains facteurs, afin d'améliorer sa prime de risque. Le premier, et pas des moindres, est la dernière ligne de précaution accordée par le FMI et qui couvre les risques d'impacts de la conjoncture internationale sur le royaume. Cette ligne pourrait aujourd'hui être assimilée à une garantie pour les créanciers du Maroc. De même, l'entrée attendue pour la fin de l'année sur le marché des flux liés à la cession par la holding SNI de Centrale Laitière et de Bimo permettrait d'alléger sensiblement la pression sur les réserves de changes et ce, en attendant la concrétisation des actions prévues par le gouvernement pour atténuer le déficit de la balance commerciale. Ces deux opérations devraient à elles seules injecter plus de 8 MMDH de devises sur le marché, auxquels il faudrait ajouter les ressources promises par les investisseurs du Golfe lors de la récente tournée royale dans les pays du Conseil consultatif du Golfe. Par ailleurs, bien que l'économie nationale peine à réaliser un taux de croissance de 3% en 2012, les perspectives s'annoncent meilleures pour le prochain exercice. C'est du moins ce sur quoi table le gouvernement dans le cadre de son projet de loi de finances. Certes, beaucoup d'économistes jugeaient jusqu'à cette semaine la réalisation de 4,5% de croissance non réalisable (l'objectif fixé dans le PLF 2013). Cependant, avec l'optimisme affiché quant à la campagne agricole en marge des dernières précipitations, les 4,5% de croissance ne sont plus une hypothèse aussi exagérée qu'elle l'était il y a quelques jours. Et pour cause, une récolte céréalière à 70 millions de quintaux comme cela est prévu, marquera une nette croissance du secteur agricole comparativement à 2012, où elle s'est limitée à la moitié de ce chiffre. Un spread compensé par la baissedes taux Tenant compte de ces aspects, le marché s'attend certes à une prime de risque bien plus élevée que celle retenue pour l'emprunt de 2010, cependant le taux d'intérêt global ne devrait, quant à lui, pas s'éloigner des 4,5 % de l'ancienne émission. Et pour cause, la récente annonce de la Banque centrale européenne de soutenir les dettes souveraines des pays de la zone euro a détendu nettement la pression sur les taux obligataires sur les marchés internationaux. La BCE avait annoncé en septembre dernier le lancement du programme «OMT», relatif aux rachats illimités de dettes à court et moyen termes, destinés à soutenir les pays de la zone euro en difficulté. Ce plan a semble-t-il rassuré les investisseurs vu la baisse des taux qui s'en est suivie. Ceci devrait ainsi permettre au Maroc de subir un coût moins important que prévu pour sa nouvelle émission, bien que la prime d'émission doive dépasser largement les 200 points de base de 2010. En effet, suite à la forte hausse enregistrée sur les «spreads», «la persistance de l'aversion au risque et la détérioration des conditions de financement sur le marché financier international ont entraîné l'élargissement de leurs spreads à des niveaux très élevés», souligne-t-on auprès de la direction du trésor. Cette dernière rapporte par ailleurs que l'indice EMBI+, qui reflète la tendance globale du risque lié aux titres émergents, s'est nettement élargi au cours de l'année 2011 dépassant au mois d'octobre le seuil des 400 points de base. Dans ce contexte et sous l'effet conjoint des tensions politiques dans la région MENA et d'une conjoncture internationale défavorable, les niveaux des «CDS 5 ans» du Maroc et des spreads des Eurobonds Maroc à échéance en 2017 et 2020 ont connu une tendance globalement haussière durant l'année 2011. En 2012, ce spread a oscillé entre 300 et 350 points de base. Reste à savoir si ce Spread pourra être compensé par la baisse des taux. Volatilité des taux sur le marché interne Le décalage entre l'annonce de la sortie du Trésor à l'international et la date effective de son exécution n'ont pas manqué de marquer de leur empreinte le marché obligataire local. Selon les analystes, les rendements obligataires connaissent une volatilité importante, particulièrement depuis la fin du troisième trimestre, en raison justement du manque de visibilité concernant la date effective de cette émission à l'international. Et pour cause, devant faire face à d'importants besoins, le Trésor continue de se rabattre sur la dette intérieure pour se financer et continuera à le faire à un rythme tout aussi soutenu tant que l'opération à l'international ne sera pas concrétisée. Du coup, les rendements obligataires ont tendance à se rehausser dans un contexte où le marché souffre d'un grave déficit de liquidités. Dès lors que la levée sera effective, les rendements devraient se stabiliser, voire se réduire légèrement en raison d'une pression moins forte de la part du Trésor public. Lire : Vigilance sur le taux d'endettement