J-10... Le décompte est officiellement lancé. Dans son dernier bulletin officiel datant du 13 septembre dernier, les autorités de l'ensemble communautaire confirment effectivement l'entrée en vigueur, à partir du 1er octobre prochain, du partenariat conclu entre le royaume et l'ensemble communautaire européen, portant sur de nouvelles mesures de libéralisation réciproques en matière d'échanges de produits agricoles frais et transformés, de poissons et de produits de la pêche. De ce côté-ci de la rive, les exportateurs agricoles, notamment des filières des fruits et légumes, s'apprêtent à cette perspective avec, en arrière plan, une campagne agricole 2012-2013 moyennement performante. Cette situation s'est en effet exprimée par une baisse de production de 25 à 30% en moyenne, mais qui a également directement déteint sur les volumes à l'export vers les marchés traditionnels de la zone euro, quasiment avec la même variation, concernant la campagne de commercialisation et d'exportation allant d'octobre 2011 à mai 2012. Cependant, pour les exportateurs de primeurs et d'agrumes, qui sont les principaux produits agricoles marocains bénéficiaires du quota préférentiel applicable à partir du mois prochain, l'échéance est envisagée avec sérénité. «Nous avons honoré nos engagements avec l'Etat en ce qui concerne le renouvellement de nos moyens de production et l'extension des superficies plantées, ce qui devrait nous permettre une meilleure réactivité au marché européen en termes de volumes d'offre, et par rapport aussi aux nouveaux quotas instaurés par l'accord», déclare aux Echos quotidien, Ahmed Darrab, SG de l'Association des producteurs d'agrumes du Maroc (ASPAM), s'exprimant également au nom de l'Association marocaine des exportateurs (ASMEX). Le discours est quasiment le même auprès des responsables de l'Association marocaine de producteurs des fruits et légumes (APEFEL). «Le premier défi est dans notre productivité. Nous avons vécu une mauvaise année en termes de rendement, d'où la nécessité de relever le niveau pour la campagne prochaine. Cela nous amène à poursuivre l'amélioration des moyens de production existants, avec de nouvelles générations de serres, par exemple et de technologies de culture, adaptées aux contraintes climatiques», explique Omar Mounir, le vice-président de l'APEFEL. Passerelle chancelante Produire plus pour exporter plus, oui... mais via quel moyen ? La principale inquiétude des professionnels producteurs et exportateurs en perspective de l'application du nouvel accord agricole, se situe principalement à ce niveau. «L'offre logistique nationale est quasiment insignifiante», assène Omar Mounir. Présentement, la voie maritime, en l'occurrence, constitue le moyen le plus usité pour expédier les agrumes et primeurs vers le marché européen, respectivement à des proportions de 90 et 60% pour chacun de ces groupes de produits agricoles. Néanmoins, les récentes disgrâces connues par l'offre locale en transport maritime, n'ont pas contribué à arranger les choses sur ce dossier. Mais si le niveau de la production est étroitement lié à des conditions peu maîtrisables telles la pluviométrie, les producteurs et exportateurs de fruits et légumes tentent de prendre les choses en main sur le volet de la logistique. La question est en tout cas au centre d'un projet de création d'un comité technique interprofessionnel, regroupant les exportateurs et les principaux armateurs nationaux. Objectif : fixer de nouvelles règles du jeu et mettre à niveau l'offre logistique. «La régularité des lignes sur certaines destinations prioritaires, sera une des priorités qui seront étudiées. Nous souffrons en effet énormément de problèmes de régularité des expéditions, en sachant que nous sommes sur des produits hautement périssables et que la majeure partie de la distribution sur le marché européen, se fait via le réseau des GMS (grandes et moyennes surfaces), qui sont très exigeantes en matière de régularité des livraisons», plaide Ahmed Darrab. Offensive commerciale Au-delà du casse-tête du transport, les professionnels devront également faire face à d'autres soucis liés au volet commercialisation. Ces difficultés sont relatives notamment à l'organisation promotionnelle et commerciale à l'export des filières en elles mêmes, ainsi qu'aux problèmes de coordination et de concertation des exportations du secteur des fruits et légumes. Pour le SG de l'ASPAM, la libéralisation des exportations du secteur a ouvert la porte à plusieurs incohérences (volumes, répartition des marchés à l'export, politique de prix, etc...). Quant au segment promotionnel de l'offre marocaine sur les marchés étrangers, les professionnels s'accordent sur le fait que la stratégie de promotion devrait être revue et adaptée aux spécificités du produit. Dans ce sens, justement, ces derniers comptent monter en agressivité quant à la promotion de leurs produits. Ils prévoient en effet d'intégrer directement les stratégies de communication et de promotion des réseaux de distribution européens, en l'occurrence en partenariat avec les principaux acteurs du segment des GMS. Tout cela, sera élaboré sous l'encadrement des organismes publics de promotion de l'offre commerciale marocaine comme Maroc-Export. La guerre commerciale se jouera en amont de la chaîne. La tutelle prépare le terrain aussi... Le ministère de l'Agriculture et de la pêche maritime affine ses moyens d'intervention en perspective de la mise en œuvre prochaine de l'accord agricole entre le Maroc et l'UE. La tutelle envisage en effet la mise en place d'une «plateforme logistique de commercialisation des fruits et légumes marocains sur les principaux marchés extérieurs». Le projet n'est pour le moment qu'au stade des études préliminaires. Selon le ministère d'Aziz Akhannouch, cette initiative rentre, de toute façon, dans le cadre beaucoup plus global du Plan Maroc vert. La stratégie de développement du secteur agricole prévoit en effet, parmi ses axes d'intervention, la valorisation de la production et l'amélioration des conditions de commercialisation des filières des fruits et légumes sur les marchés extérieurs. Ce projet de plateforme logistique extérieure devrait également permettre aux exportateurs marocains de faire face au besoin de diversification des marchés et en débouchés pour leurs produits. Ce devrait être également un moyen de lutte contre la rude concurrence de l'offre en produits agricoles de certains pays comme la Chine. Pendant ce temps, du côté des armateurs privés, seul le groupe CMA-CGM semble pour le moment s'inscrire dans un réajustement de son offre. Pour la fin de l'année 2012, l'opérateur devrait lancer une nouvelle ligne hebdomadaire entre le Maroc et le vieux continent. Cette ligne devrait relier les ports d'Agadir et de Dunkerque (France) en cinq jours, puis Saint-Pétersburg (Russie), en dix jours et demi.