C'est une bonne relance pour la filière du poulpe. Le département de la Pêche maritime est (re)passé à l'acte. À la date d'hier, la tutelle a décidé de l'instauration d'un arrêt biologique sur la filière du poulpe pour les trois prochains mois. Si la décision en soi n'est pas nouvelle pour la filière, elle comporte quelques aspects la rendant particulière. Parmi ceux-ci, la généralisation de l'application de cette décision sur l'ensemble des 3.000 km de littoral du royaume. Cela devrait en effet permettre de réussir une généralisation de la politique de sauvegarde de la ressource sur toute l'étendue de l'activité, ainsi qu'un renouvellement équilibré et mieux réparti des stocks en fonction des zones de pêche. «La tutelle a eu le courage politique qu'il fallait pour prendre cette décision. Toutefois, elle n'a pas été seule à la prendre. Il faut aussi souligner le rôle important des professionnels du secteur, en particulier ceux du nord», commente Hassan Oukacha, président de la Fédération de la pêche maritime (FPM). «L'essentiel est qu'on a pu cette fois cibler toute la zone de pêche. Cette vision plus globale permettra certainement de mieux préserver la ressource sur toute son étendue». Du côté du département de la Pêche maritime, cette décision a été prise, compte tenu du cycle biologique du poulpe, caractérisé par le démarrage de la phase de «recrutement» pendant la saison automnale, ainsi que du besoin d'assurer la protection des géniteurs et de maximiser le rendement. Pêche illicite L'autre retombée attendue de l'application généralisée de cette décision est relative à la lutte contre l'activité de pêche illicite qui porte fortement atteinte au secteur. Sur cette question, tutelle et professionnels s'accordent sur le fait qu'un renforcement des contrôles est plus que nécessaire, dans l'intérêt commun. L'autre aspect significatif écoulant de cette décision est relatif à la période d'instauration de cette décision. «Elle concrétise une toute nouvelle approche de gestion et de sauvetage de la ressource de la filière», nous explique le responsable patronal. Cette nouvelle approche consiste effectivement, en lieu et place de plusieurs arrêts biologiques d'un à deux mois décidés en fonction de l'état ponctuel de la ressource, d'instaurer une seule et unique période de repos biologique de trois mois dans l'année. Résultat, les pêcheurs peuvent ainsi opérer tout au long des neuf mois restants dans l'année, sans rupture d'activité. Pour le président de la FPM, cette approche permettra également de réduire considérablement l'effort de pêche sur la ressource dans le temps et l'espace, en permettant une meilleure répartition de cette pression sur la ressource. Sur le plan commercial aussi, les professionnels y voient des avantages. «L'arrêt biologique va également permettre une meilleure gestion de l'effort commercial, favorisant un écoulement plus rapide de la marchandise et donc moins de risque pour le producteur et le consommateur». Impacts sociaux ? Sur le plan social, un repos biologique laisse toujours planer la menace du désœuvrement pour les ressources humaines de la filière. Pour Hassan Oukacha, toutefois, celle-ci n'est pas réelle. Pour le segment de la pêche hauturière par exemple, les niveaux de salaires des marins pêcheurs sont généralement assez importants pour leur permettre de tenir trois mois sans ressources additionnelles. Le revenu moyen mensuel en vigueur dans le segment varie de 4.000 à 5.000 dirhams, et est établi en fonction du système de rémunération appliqué par les armateurs (Primes sur le tonnage capturé, pourcentage sur le chiffre d'affaires, etc.) Dans le segment de la pêche côtière, le problème de l'arrêt d'activité des marins pêcheur ne se pose pas non plus, pour la seule et simple raison que les opérateurs font une sorte de reconversion vers d'autres espèces halieutiques, principalement dans la zone de pêche au nord de Boujdour, durant toute la période du repos biologique. Quant à la pêche artisanale, les décisions de repos biologiques provoquent généralement un mouvement de migration des facteurs humains de production vers d'autres zones d'activité du littoral marocain. «De toute façon, il est certain que l'intérêt global du secteur est que l'on puisse arriver à un niveau où il n'y aurait plus besoin d'arrêt biologique. Cela permettrait de sédentariser tous ces pêcheurs», conclut le président de la FPM.