Le concept de «finance islamique» trace ses derniers traits avant d'être dévoilé en Conseil de gouvernement avant la mi-septembre. C'est en substance ce qu'a affirmé le ministre de l'Economie et des finances, lundi, en réponse aux questions des parlementaires pjidistes. «Le rythme d'examen de la loi bancaire, qui comportera des clauses sur les produits des banques islamiques est accéléré». Le ministre explique que ce projet de loi comportera une partie entièrement réservée à la réglementation des activités des banques participatives. Ce volet sera, en l'occurrence, axé sur les principales clauses relatives à l'identification de ces banques, des comptes d'investissement ainsi que des opérations permises. Dans un même ordre d'idées, Nizar Baraka explique que le nouveau texte prévoit la mise en place d'un comité financier, de comités d'audit ainsi que la protection des clients à travers la mise en place d'un fonds de garantie des dépôts. Ce nouveau système financier arrive donc non seulement avec un cadre réglementaire bien étudié mais également des bras armés pour veiller à sa bonne marche. Au préalable de ce travail d'élaboration, le feu vert avait été donné par la Banque centrale sous condition que la réglementation de la finance islamique soit intégrée dans un chapitre de la loi bancaire plutôt que via l'adoption d'un texte de loi spécifique. La question qui se poserait alors serait de savoir quel sera l'impact de l'introduction de la finance islamique sur le marché bancaire conventionnel ? Il n'est une nouvelle pour personne que les banques marocaines présentent aujourd'hui un certain nombre d'offres «islamisées» et que l'émergence d'un système de finance islamique à part entière pourrait bien avoir des retombées sur leurs activités... Dans un entretien accordé il y a quelques semaines aux Echos quotidien (www.lesechos.ma), Youssef el Hazzouani, consultant et auteur du livre «Finance islamique, fondements, mécanismes et apports», expliquait déjà : «La finance islamique étant une toute nouvelle industrie au Maroc, elle aura tout intérêt à cohabiter avec la finance conventionnelle, pour mieux planifier sa croissance et orienter ses innovations afin de gagner le challenge qui lui est imposé par la Finance conventionnelle et confirmer son statut de finance alternative». Voilà de quoi rassurer les banques conventionnelles qui n'auraient de fait rien à craindre quant à un éventuel spectre d'une concurrence ardue et soudaine. «Nouveaux défis» Sur le long terme, un nouveau challenge se posera cependant aux banques conventionnelles. «Le référent religieux ne devra pas être l'unique mobile de la clientèle d'une banque et la recherche d'une rentabilité meilleure continuera de guider les déposants et les investisseurs» note Youssef El Hazzouani. C'est à juste titre sur ce terrain que les banques conventionnelles devront alors se battre pour sauvegarder leurs parts de marché. Dans une vision plus globale, l'introduction du système de finance islamique représente des enjeux aujourd'hui évidents. Pour le gouvernement, il s'agit à travers la réforme du secteur financier, de permettre aux établissements bancaires d'investir au Maroc en tant que banques islamiques. Sur ce point également, les banques conventionnelles devront faire preuve d'un sens de l'adaptabilité voire de l'innovation. L'entrée de nouvelles structures sur le marché constituera certes une nouvelle concurrence qui pourrait alors pousser certaines banques marocaines à se positionner en tant que nouvelles entités spécialisées. Le chantier est en tout état de cause encore en friche. Oseront-elles relever le défi ou est-ce que cette nouvelle porte sera enfoncée par les mastodontes du Golfe ? Ces dernières avancent d'ores et déjà leurs pions et la partie ne fait que commencer. Portrait robot de banque islamique Le nouveau chapitre de la loi bancaire baptisé « finance islamique » signe l'acte de naissance d'un tout nouveau système financier qui viendra cohabiter avec le système conventionnel existant. Retour sur les principaux traits de cette nouveauté. Pour ceux qui feront le choix de ce nouveau système, les prêts qu'ils contracteront ne relèveront plus du cadre commercial. Le financement qui sera accordé par la banque islamique impliquera donc une participation de l'organisme aussi bien dans les profits que dans les pertes. Contrairement aux banques conventionnelles, les banques islamiques ne se limiteront pas à proposer des services d'aides financières mais joueront un rôle actif dans le processus de création, de transformation et de commercialisation des richesses. Ainsi, le projet de loi qui sera prochainement dévoilé devra définir le champ d'intervention de ces institutions allant des opérations d'ouverture de tous types de comptes à la mise à la disposition des clients de financement conformes à la Charia, passant par la collecte des dépôts sans oublier la réalisation de transferts, l'ouverture de lettres d'engagement, l'émission de lettres de garantie, et l'octroi ainsi que l'encaissement de chèques, des ordres et des bons de change. En d'autres termes tous les services qu'offrent aujourd'hui les banques conventionnelles, agrémentés de la nouvelle fonctionnalité des produits de finances islamiques. Celles-ci auront, toujours selon le nouveau cadre légal, la possibilité de gérer toutes les opérations et les instruments de change à l'international comme les chèques de voyage, les garanties, les crédits documentaires, les polices de perception ainsi que tous les services agréés par Bank Al-Maghrib compatibles avec les préceptes de l'islam.