La question des droits d'auteurs au Maroc refait surface. La semaine dernière, une table ronde a eu lieu à Casablanca sur la gestion collective des droits d'auteurs dans notre pays. Une rencontre organisée à la suite de la pétition pour un audit du Bureau marocain des droits d'auteurs (BMDA), forte de 656 signatures. Cette rencontre fait suite également à bon nombre de tables rondes et réunions mises en place récemment pour discuter de ce sujet épineux. Alors que les responsables du BMDA préféraient, au début, ne pas assister à ce genre de rencontres, ils se sont enfin vus obligés d'y assister, pour communiquer ainsi avec l'opinion publique. Toutefois, les interventions du président du BMDA, Abdellah Ouedghiri, sont loin de satisfaire «nos agitateurs culturels». En effet, ces derniers reprochent au BMDA de ne pas pouvoir accomplir la mission qui lui a été confiée. Cet organisme, qui a le monopole légal de la représentation des auteurs, toutes disciplines confondues (de la littérature à la danse, en passant par la photographie) a failli, selon les signataires de la pétition, à ses missions essentielles, notamment la protection des œuvres et la défense des intérêts de tous les créateurs, auteurs et artistes marocains, au Maroc et à l'étranger. On reproche aussi au BMDA de ne pas collecter des droits d'auteurs et des droits voisins auprès des chaînes de télévision, de radiodiffusion et de tous les espaces publics. Ce n'est pas tout, le BMDA ne redistribuerait pas des sommes collectées aux ayants-droit, à titre de droits d'auteurs ou de droits voisins. Tant de points qui restent suspendus... Et le BMDA répond ! «Nous avons 2.000 artistes au Maroc qui bénéficient de leurs droits d'auteur», souligne Abdellah Ouedghiri. Dans cette même optique, le président du BMDA précise que ce bureau, qui existe depuis plusieurs années déjà, perçoit pas moins de 140 MDH par an. Et ce, sans oublier le budget de 13 MDH, dédié à la restructuration de cet organisme. En effet, Ouedghiri, et avant lui le directeur des Etudes et du développement au ministère de la Communication, Mohamed Belghouat, a précisé que le BMDA est en cours de restructuration. «Le chantier est déjà ouvert... l'objectif étant de faire du BMDA un organisme capable d'accomplir sa fonction», déclarait, il y a quelques mois, Mohamed Belghouat. La grande nouveauté demeure toutefois ce partenariat conclu entre le BMDA, Médi1 et Maroc Cultures. «Nous avons pu avoir l'aval des responsables de Medi1 et de l'association Maroc Cultures pour le paiement des arriérés liés à l'exploitation des droits d'auteur», a affirmé Ouedghiri. Ce n'est pas tout. Le responsable déclare aussi que les seuls diffuseurs qui versent les droits d'auteur à l'institution qu'il dirige sont la SNRT, 2M, Atlantic radio et Hit radio. Le montant des versements constitue, selon lui, 1,2 MMDH réparti entre les auteurs inscrits au BMDA en quatre tranches. Ce qu'ils en pensent... Avec cela, cette dernière rencontre a laissé nos agitateurs culturels sur leur faim. «Nous voulons des résultats tangibles. Nous voulons savoir comment ce bureau recueille ces droits et comment il les distribue et qui en bénéficie réellement», n'ont-ils cessé de demander. Un avis partagé par l'ancien président de la Coalition marocaine pour la culture et les arts, Hassan Neffali. «Nous avons demandé, il y des années de cela, le changement du statut de la loi qui réglemente ce bureau, ainsi qu'une représentativité des artistes au sein même de ce bureau, mais rien de cela n'a été fait. Nous avons aussi demandé à ce que la loi qui gère les droits voisins soit appliquée, mais en vain», commente Neffali. «À mon sens, poursuit-il, le BMDA doit se transformer en une société de gestion des droits d'auteurs gérée par les auteurs et les artistes interprètes, mais il faut provoquer un débat national pour pouvoir régler ce problème». Le directeur de la station Hit Radio, Younès Boumehdi, se montre quant à lui lassé par ce débat. «C'est vraiment une insulte de revenir sur cette question des droits d'auteur et d'implication du BMDA», a-t-il déploré. Un contrat-programme «sur le papier» Nous sommes en mai 2010. Le Bureau marocain des droits d'auteurs (BMDA) signe un contrat-programme avec le ministère de la Communication dirigé à l'époque par Khalid Naciri. Au terme de ce contrat-programme, le BMDA s'est engagé à améliorer progressivement les montants des répartitions au profit des auteurs, afin d'atteindre les ratios internationaux. Il doit également mettre en place plusieurs mesures de mise à niveau, y compris la généralisation de la formation continue, l'amélioration des conditions de travail du personnel ainsi que l'amélioration des instruments de gestion. C'est ainsi que le ministère de tutelle lui a octroyé un budget de 13 MDH étalé sur trois ans (le plan d'action s'étale sur la période 2010-2012) pour atteindre ces objectifs (l'installation de nouveaux locaux, l'amélioration du parc informatique faisaient également partie des objectifs de ce contrat-programme). De son côté, le département de la Communication, s'engageait, entre autres, à œuvrer à la rédaction d'un texte juridique relatif à la copie privée et l'amendement de l'arsenal juridique, de manière à faire bénéficier tous les ayants-droit et assurer son adaptation conformément aux nouveautés technologiques. Deux ans plus tard, rien n'est encore fait.