Les ménages à faible revenu et la classe moyenne sont les premiers à subir l'impact de la hausse des prix du carburant à la pompe (le prix de l'essence a augmenté de 2 DH/litre à 12,18 DH et celui du gasoil de 1 DH/litre à 8,15 DH). Une décision qui est tombée comme un couperet vendredi dernier dans la soirée. Ses retombées sur le panier de la ménagère sont imminentes surtout que le poids de l'alimentaire en représente 41,2%. Dès le lendemain de cette décision, les prix des fruits et légumes ont commencé leur ascension, et ce n'est que le début. Après plusieurs mois de baisse ou de légères augmentations, l'indice des prix des produits alimentaires serait appelé à grimper à quelques semaines du mois de Ramadan. Pour le moment, les différentes filières agricoles sont en phase d'évaluation des effets. «Les réunions se multiplient avec les agriculteurs, gros consommateurs de gasoil, pour évaluer les effets directs sur le coût de la production et fixer le pourcentage à répercuter sur le client. Sans oublier le coût indirect induit par le transport de ces marchandises», a-t-on précisé au niveau de l'APEFEL (Association marocaine des producteurs exportateurs de fruits et légumes). Pour dire que la réaction des transporteurs de marchandises, libres de fixer le prix de leurs prestations ne s'est pas faite attendre, ils ont estimé le surcoût à 9% et ont automatiquement répercuté cette hausse sur le client. Pour le transport urbain et interurbain (autobus, taxi,...), c'est l'attentisme qui plane. La bataille s'annonce dure avec le gouvernement qui doit assumer ses responsabilités. Une assemblée générale est, d'ailleurs, prévue le 10 juin prochain pour décider de l'approche à adopter pour la gestion de cette situation et ceci avec l'aval du wali. Ainsi, aucune décision n'est prise pour le moment, surtout que rien n'est encore fait au niveau de tout le secteur du transport en commun, a indiqué Mohamed El Harrak, président du syndicat des taxis affilié à la Confédération démocratique du travail (CDT), lequel n'a pas écarté une augmentation d'1DH pour le petit taxi si le gouvernement ne revient pas sur sa décision. Un souhait exprimé aussi par la Ligue nationale de protection du consommateur dont le président, Mohamed Belmahi a estimé l'impact sur le pouvoir d'achat à près de 25 %. «Le gouvernement n'a pas tenu sa promesse. Le timing n'est pas opportun, vu l'approche du ramadan et des vacances. Le quotidien des ménages sera des plus difficiles» , a-t-il commenté. C'est un vœu pieux surtout que le gouvernement a dressé un tableau noir de la situation des finances publiques. Il annonce via le ministre délégué auprès du ministre de l'Economie et des finances chargé du budget, Driss El Azami El Idrissi, que la situation est intenable et qu'à fin mai 2012, l'Etat a consommé plus de 80 % de l'enveloppe de 36,5 MMDH allouée à la compensation. À ce rythme, à mi-juillet, la totalité de l'enveloppe allouée à la consommation aurait été consommée. Par ailleurs, outre l'impact sur le pouvoir d'achat des ménages, même la compétitivité des entreprises s'en trouvera affectée. En effet, même le prix du fuel industriel a subi une hausse de 988,04 DH/tonne, le portant à 4.666,04 DH, sachant que la subvention est établie à 2. 000 DH/ tonne pour le fuel industriel. Où en est alors le souci de rééquilibrage de la croissance marocaine qui se doit de reposer sur deux moteurs : la consommation des ménages et l'investissement des entreprises. C'est d'ailleurs le seul nouveau modèle de croissance soutenant à la fois la demande et l'offre domestiques qui permettra d'assurer une croissance forte, stable et surtout créatrice d'emplois. Certes, la situation des finances publiques et de la Caisse de compensation sont lourdes à gérer, n'empêche que le gouvernement Benkirane, est en train de dilapider complètement son capital de sympathie et de crédibilité auprès de la population. Une perspective qui risque d'ouvrir la porte à une contre-révolution qui portera une colère et une frustration populaires encore plus exacerbées. Point de vue : Yousef Belal, Politologue Je pense qu'en décidant d'augmenter les prix du carburant pour combler le déficit public, le gouvernement a agi par paresse. C'est une décision urgente et impopulaire. Au lieu de procéder à une réelle réforme de la Caisse de compensation pour trouver d'autres recettes, notamment celles issues de la taxation de l'agriculture ou encore de l'impôt sur la fortune, il a décidé d'augmenter ses recettes sans aucun ciblage. Il aurait pu imaginer d'autres mesures sans faire dans l'improvisation.