Les Echos quotidien : Vous avez décliné à plusieurs reprises l'invitation de Maroc Cultures pour participer au festival Mawazine. Pourquoi avez-vous accepté de prendre part à l'édition 2012 ? Fnaïre : Parce que toutes les conditions étaient réunies pour que notre participation à Mawazine soit à la hauteur des aspirations de notre public. Lorsque le responsable de la programmation marocaine, Hassan Neffali, nous a contactés, nous n'avons pas hésité à prendre part à cette édition, parce qu'il était tout simplement professionnel. Notre contrat était prêt des mois avant le coup d'envoi du festival, ce qui prouve que les organisteurs de Mawazine ont changé de comportement vis-à-vis de l'artiste marocain. D'ailleurs, le festival ne cesse de grandir et de se professionnaliser. Nous sommes prêts à participer à n'importe quel événement, à la condition que l'on nous respecte. Lors de votre concert à Mawazine, vous avez présenté votre dernier album «Basma ». Quelle est la particularité de cet opus ? Avant de parler de «Basma», je tiens à préciser que nous avons livré un show à Mawazine, puisqu'il y avait des danseurs avec nous sur scène. C'est d'ailleurs la nouvelle image que nous voulons que le public retienne, celle d'une formation musicale qui évolue avec le temps et qui réussit à exporter sa musique 100% marocaine à l'étranger. Pour revenir à votre question, notre album «Basma» est dédicacé à notre ami Hicham, décédé il y a quelques années et dans lequel figurent plusieurs tubes sur l'espoir, l'amour... Comme vous le savez, nous sommes sensibles aux problèmes de notre entourage ; c'est pourquoi nous en parlons dans nos chansons. Pourquoi avoir mis trois années à sortir cet album ? Nous nous sommes toujours fixé comme objectif, de bien préparer nos albums. Bâcler le travail n'a jamais été notre devise. Après le succès de «Yed El Hna», il fallait bien choisir les chansons de notre album pour être à la hauteur des aspirations de notre public. Sinon, nous avons enregistré l'album «Basma » composé de 14 tubes à Dubaï dans l'un des plus grands studios au monde, ainsi qu'en France où nous avons finalisé le son. Cet album nous a coûté plus d'1,3 MDH. Produire un album qui répond aux normes internationales demande du temps et de l'argent. Justement, quel est votre source de financement, vous qui avez choisi d'autoproduire vos albums ? Notre seule source de financement demeure les festivals et les soirées privées. C'est grâce à ces événements que nous arrivons à produire nos albums. Il faut dire que notre manager a déjà élaboré un calendrier avec des objectifs bien déterminés, afin que nous puissions avancer à pas sûrs. L'autoproduction n'était pas un choix, mais plutôt une obligation. C'est vrai que le secteur musical s'est beaucoup développé au Maroc, grâce notamment à la présence de bon nombre de radios privées, mais cela reste insuffisant. L'absence d'une industrie musicale empêche le secteur de vivre une véritable mue. L'autoproduction reste, à notre sens, le seul moyen s'il l'on veut aller de l'avant. Gagnez-vous bien votre vie ? Nous travaillons dur pour pouvoir bien gérer notre carrière et arriver à produire des albums bien préparés. Pour le moment, nous arrivons à faire cela grâce aux festivals et aux soirées privées. On peut dire donc que nous gagnons bien notre vie ! Vous êtes l'une des rares formations musicales au Maroc à avoir un manager. Jusqu'à quel point sa présence est-elle nécessaire pour vous ? Nous sommes persuadés que la communication est nécessaire pour promouvoir le travail de tout artiste et que ce dernier doit être encadré et bien entouré s'il veut atteindre le sommet. Avoir un manager, un attaché de presse, tout un staff derrière, etc., cela donne une crédibilité à l'artiste. Chacun d'eux remplit sa tâche pour un objectif bien précis, celui de promouvoir l'artiste. Que pensez-vous du piratage, vous qui en souffrez depuis des années ? C'est vrai que nous souffrons du piratage, mais nous pensons que ce fléau a aussi des avantages. Dans un pays comme le nôtre, où nous n'avons pas de chaînes spécialisées dans la musique, il reste l'un des moyens efficaces pour la diffusion des chansons. Vous savez, grâce au piratage, nos tubes sont connus par tout le monde. Toutefois, ce phénomène que l'on peine à éradiquer, nous cause de nombreux ennuis sur le plan financier. Quel regard portez-vous sur le rap au Maroc ? Le rap a réussi au fil des années à se faire une place dans la scène musicale nationale. Il y a de grands artistes de rap qui s'imposent aujourd'hui sur la scène artistique marocaine et internationale. Malheureusement, l'art en général et la musique en particulier ne sont pas du tout bien gérés. Nous parlons des droits d'auteur, qui sont tout simplement bafoués au Maroc. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle nous avons décidé de devenir membres du Bureau américain des droits d'auteur, afin de protéger nos droits. C'est la seule solution pour être certains que nos droits seront protégés.