Hausse du nombre de reconduites à la frontière, accélération des départs volontaires d'étrangers sans papiers, augmentation de l'immigration de travail par rapport à l'immigration familiale... Tel est le bilan dressé tout récemment par le ministère français de l'Immigration et de l'identité nationale. Vantant un «rééquilibrage très net en faveur de l'immigration professionnelle» et un net recul de l'immigration familiale qui aurait baissé de 13 %, le ministère s'est réjoui du nombre des reconduites à la frontière, qui est passé de 25.000 en 2007 à 26.000 en 2008 et 28.000 en 2009, dont 3.340 Marocains. Objectif : atteindre, si Sarkozy est réélu, 400.000 expulsés, un nombre qui correspond à la population d'un pays comme le Qatar. Ces chiffres de la honte, qui illustrent pour la majorité gouvernante une réussite digne de faire «école en Europe», est loin de faire l'unanimité chez le peuple de France. Les résultats du dernier sondage publié par Le Parisien sont édifiants : 85% des sondés sont pour une régularisation massive des sans papiers. Ce chiffre dépasse de 3 points le pourcentage de Français qui ont voté Jacques Chirac contre le frontiste Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle du 5 mai 2002. Ainsi, l'immigration positive, la diversité et l'intégration, mots stars dans le discours sarkosien s'avèrent impossibles en l'absence d'une action concrète en direction de ces immigrés, jeunes et moins jeunes, qui ne se reconnaissent plus dans le regard des autres. Ils y voient plus de suspicion que de compréhension, plus de rejet que de générosité. Un constat savamment résumé par le Réseau éducation sans frontières (RESF) qui avait décliné, il y a un an, l'offre du ministre de l'Intérieur pour un entretien autour de l'immigration. «Une telle entrevue nous semble autant inutile que votre ministère de l'Identité nationale. Vous avez fait voter une loi destinée à empêcher les parents et les enfants de vivre ensemble. Vous avez imposé les tests ADN pour le regroupement familial, pratique jusqu'alors réservée aux criminels. Le pays dans lequel ces immigrés avaient placé leur espoir d'une existence nouvelle, les rejette, les expulse et les dépose comme un déchet, sans bagage, sur un tarmac où personne ne les attend. Nombre d'expulsés finissent désespérés, désocialisés, à la rue, mendiants, fous ou suicidés (...) Ces raisons, entre autres, nous font décliner votre proposition d'audience. Nous vous prions, Monsieur le ministre, d'agréer l'expression de la considération que mérite votre politique». L'Identité, thème majeur des Régionales À trois mois des élections régionales et déjà la campagne électorale est largement engagée sur l'immigration et l'identité nationale. Toutes les forces politiques en France, tous les candidats aux régionales lorgnent les Français issus de l'immigration, leurs voix électorales les intéressent. Certains le font à juste titre, parce qu'ils ont toujours été aux côtés des immigrés. Certains veulent leurs voix, mais sans trop s'afficher avec, pour ne pas perdre sur l'autre tableau. D'autres, bien sûr, font de l'identité et des problèmes des banlieues un fond de commerce électoral. Et à l'image des campagnes précédentes, l'immigration et l'identité ressurgissent à partir d'un autre thème qui leur est systématiquement couplé, celui du patrimoine politique, social et culturel de la France. Ce patrimoine est cette fois à l'origine d'un débat sans vote entamé depuis mardi à l'Assemblée nationale autour de l'Identité nationale. Certains, parmi la majorité gouvernante, y voient un rendez-vous de réflexion humaniste, d'autres à l'image du groupe socialiste, reprochent au président Nicolas Sarkozy, de faire de l'identité ‘'un instrument de division nationale'' et refusent de présenter l'immigration comme une menace pour la France. Ce solide attachement à l'identité a poussé certains députés de la majorité à aller jusqu'à déposer une proposition de loi interdisant les drapeaux étrangers dans les salles de mariages lors des cérémonies. «La France traverse une crise d'identité» de sa proposition de loi, évoquant ensuite diverses manifestations de non-respect de l'identité française, comme notamment l'affichage de drapeaux étrangers, notamment marocains et algériens, au cours de cérémonies de mariage dans les mairies.