Les systèmes d'information des entreprises marocaines ne sont pas suffisamment protégés. C'est là le constat dressé par EMC2, spécialiste international des technologies de l'information, dans un rapport analysant les systèmes de sauvegarde dans les entreprises de la région MENA. Plus que de dresser un simple état des lieux dans les pays de la région, cette étude a surtout le mérite de constituer une référence pour les PME marocaines afin de mieux cerner les risques qui peuvent découler de l'absence d'un système de restauration. «Alors que les systèmes informatiques sont de plus en plus avancés dans les entreprises, la technologie de sauvegarde pour protéger ces systèmes est souvent datée et conçue pour un environnement TI antérieur», déplorent d'emblée les analystes d'EMC2. Cette conclusion est principalement le fruit de la constatation que les entreprises de la région, particulièrement les PME, consacrent des budgets assez limités aux systèmes de sauvegarde et de récupération. Il faut dire que, pour le cas du Maroc, les données d'EMC2 font ressortir que 5,57% seulement des budgets TI (technologies de l'information) sont consacrés aux systèmes de sauvegarde, un chiffre qu'il faut cependant considérer avec précaution. Ce sont en effet principalement les grandes structures, à l'image des banques, qui tirent ce taux vers le haut. Le constat dressé par le spécialiste des TI est d'autant plus marquant qu'il fait ressortir que le Maroc est le pays où les budgets consacrés à la sauvegarde des systèmes d'information s'avèrent les moins importants. Quatre décideurs informatiques sur dix dans le Royaume avouent en effet que les budgets consacrés à ce volet sont insuffisants, soit la proportion la plus importante des pays étudiés par EMC2. D'après les professionnels de l'informatique, la situation est telle qu'on a d'une part, certaines grandes structures qui sont de plus en en plus sensibilisées et conscientes des risques qui découlent de l'absence de systèmes de sauvegarde. D'autre part, au niveau des PME, cette prise de conscience est timide ou inexistante. La PME, plus vulnérable Pourtant, dans le milieu, on s'accorde à considérer qu'en termes de sensibilité d'activité, les PME peuvent faire face aux mêmes problématiques que les grandes entreprises. Cette négligence peut s'avérer fatale, dans la mesure où à cette ère de l'informatique, les données deviennent un patrimoine important pour une société. D'ailleurs, «plus la structure est petite, plus la vulnérabilité aux problèmes des systèmes d'information est importante», assure-t-on auprès d'EMC2. Cette situation impose à toute organisation, indépendamment de sa taille et de son type d'activité de disposer d'un plan de secours informatique. De plus, selon le sondage effectué par EMC2, ce sont 9 entreprises sur 10 qui ont récemment été touchées par des problèmes d'arrêt ou des pertes de données alors que dans des pays comme la Turquie, ce taux ne dépasse pas les 50%. Les raisons souvent invoquées par les décideurs informatiques marocains concernent des pannes dans les matériels, suite notamment à certains événements exceptionnels tels que les inondations. Ce sont principalement les entreprises du secteur financier qui se plaignent des plantages dus à des défaillances matérielles, tandis que dans l'énergie et les secteurs utilitaires ce sont surtout des plaintes liées à la sécurité des systèmes. Ces problèmes se sont traduits, selon EMC2, dans quatre cas sur 10 par des pertes considérables de productivité. Pis encore, pour les entreprises marocaines, il s'agit surtout de pertes de confidentialité qui se traduisent inéluctablement par une perte de fidélisation des clients, chose dont les répercussions sur la rentabilité de l'entreprise a des conséquences dramatiques. C'est particulièrement le cas dans les métiers de la finance et des télécoms. Que faire alors dans pareille situation? En cas de problèmes dans le système d'information, les données du spécialiste des IT font ressortir que le premier réflexe des décideurs informatiques est d'améliorer la sécurité des systèmes et le changement des procédures de sauvegarde. La perte de données suite à des pannes engendre également une augmentation des budgets généralement alloués aux systèmes de back-up. En d'autres termes, ce n'est qu'en étant confronté à la problématique que les décideurs prennent réellement conscience de la nécessité d'investir davantage dans le back-up. C'est le cas dans les pays analysés par EMC2, à une exception près : le Maroc. «Près de 60% des structures marocaines ne décident pas de relever le budget alloué aux back-up, ni la refonte des procédures après qu'elles ont été confrontées aux problèmes du système», relèvent les analystes d'EMC2. Si les données relatives au Maroc semblent les moins encourageantes comparativement aux pays comme la Turquie, l'Arabie Saudite ou le Qatar, il est des plus logiques que de retrouver le Royaume en tête des pays qui ont le plus subi des pertes de données durant les douze derniers mois. C'est du moins ce qu'annonce EMC2 qui cite 57% des entreprises ayant déclaré des pertes de données. La moitié de ces pertes de données sont liées à des problèmes sécuritaires et qui n'ont pu être restaurés, en raison de systèmes de back-up souvent archaïques. Site de back-up, une assurance De l'avis des professionnels, les dirigeants des PME sont principalement freinés par leur perception que le coût d'une solution de back-up est inadéquat avec les moyens d'une petite structure. Or, cela fait partie intégrante des dispositifs à mettre en place en vue de garantir la poursuite normale des activités, quelqu'en soient les entraves. Il est en effet clair que quand le site principal d'une PME est sujet à des sinistres affectant ses données informatiques, il faut que l'entreprise puisse disposer d'un autre site qui a la même image de ces données. Dans la pratique, il existe différentes manières d'architecturer le lien entre le site du back-up et le site principal de l'entreprise et ceci suivant le budget et le besoin de l'entreprise. Ce budget reste en effet nettement inférieur aux coûts que pourrait engendrer un arrêt de travail pour l'entreprise. Certes, il n'est pas fréquent que cela se produise. Néanmoins, et c'est le même principe de l'assurance, il vaut mieux investir dans un outil permettant d'éviter de subir les coûts d'un sinistre éventuel que de continuer à naviguer à vue, encourant le risque d'un arrêt brutal de l'activité à cause d'un événement imprévu. Si l'on prend une banque ou une assurance par exemple, les données sont vitales pour elles, elles ne doivent pas en perdre un morceau. Si jamais elles en perdent, il est, certes, possible de revenir à des copies selon des méthodes classiques sur bandes ou autres et de restaurer les données. Toutefois, cette restauration n'est pas totalement garantie et il n'est pas toujours évident de tout remonter. C'est la raison qui pousse ces entreprises à recourir à des solutions de Back-up sophistiquées, souvent même dans des sites externes. Les alternatives pour la PME Aujourd'hui, il est communément admis que ce sont plus les grandes structures qui sont ciblées par les professionnels de la sauvegarde des données informatiques. Néanmoins, au vu de l'importance que constitue ce volet même pour les PME, ces dernières disposent aujourd'hui d'outils et procédés lui permettant d'assurer la pérennité de leurs systèmes. Selon les professionnels du secteur, au niveau du secours informatique, l'avantage de la PME est qu'elle peut toujours trouver des solutions à sa mesure. À titre d'exemple, une PME d'une dizaine d'employés qui dispose d'un ERP gérant sa comptabilité, sa logistique, ses stocks...a toutes les données concernant ses activités stockées sur un serveur. Elle peut tous les soirs faire des sauvegardes, sur un autre serveur installé en dehors de ses locaux qui lui permet de fonctionner en mode dégradé. Si cette PME peut faire appel à un prestataire externe, deux possibilités s'offrent généralement à elle : soit elle amène, elle-même, sa plateforme technique (serveur secondaire) pour qu'elle soit hébergée, soit le prestataire met à sa disposition une plateforme physique ou virtuelle qui gère ses données. Le développement qu'a connu dernièrement le cloud computing, qui induit une baisse sensible du coût de cette prestation, rendrait même l'alternative de sauvegarde virtuelle plus intéressante pour la PME. Toutefois, dans ce cas de figure, c'est à la société de savoir, en fonction de la criticité de ses données, si elle doit opter pour une sauvegarde permettant une reprise ou une continuité d'activité (sans interruption d'activité ou de perte de données) en cas d'incidents. Absence d'obligations Si dans certains pays, la quasi-majorité des entreprises sont obligées de disposer de systèmes de sauvegarde et de restauration, comme c'est le cas pour le Qatar, soit par contraintes réglementaires ou vis-à-vis de celles des assureurs, au Maroc la plupart des entreprises qui disposent de ces systèmes le font principalement par volonté personnelle. Selon les données rapportées par EMC2, seules 29% des entreprises déclarent être contraintes de disposer de systèmes de sauvegarde. Là encore, c'est le taux le plus faible recensé dans les pays analysés. De plus, ce sont principalement les grandes structures qui subissent cette contrainte, souvent par leur assureur en contrepartie d'avantages tarifaires. Par ailleurs, EMC2 note dans son étude que 48 des entreprises marocaines sondées choisissent d'établir leur système de back-up sur des sites externes. Il s'agit particulièrement des établissements bancaires et financiers qui choisissent d'externaliser.