Zakaria Fahim Président CJD International, Dir. BDO Sarl Audit&Conseil Depuis quelques temps foisonnent un certain nombre d'études sur le poids du secteur informel au Maroc et sous d'autres cieux. Il serait pertinent avant d'aller plus loin d'en cerner les contours. Selon le bon vieux Petit Robert, «le secteur informel, c'est ce qui n'est pas organisé de façon formelle». Que contient ce réceptacle ? Le secteur informel est une opportunité si et seulement si nous ne mélangeons pas les genres et n'appliquons pas les mêmes recettes aux différents acteurs, dont le seul dénominateur commun est qu'ils sont en en marge du droit établi. Certains l'ont choisi et le cultivent, d'autres le subissent et font contre bon gré mauvaise fortune. Que dire d'un patron, quelle que soit son activité, qui décide que la collectivité ne lui rapporte rien. Il légifère seul et considère que x% de ses revenus sont à mettre directement en poche. Toutes les vraies-fausses raisons sont valables : une administration tatillonne, une justice qui se cherche, des routes dans un état déplorable, un ramassage d'ordures à plusieurs vitesses. La liste est longue... Nous pouvons faire le parallèle avec le/la client(e) d'un supermarché qui sort avec un Caddie chargé à ras bord et pense que cela lui donne le droit de subtiliser une lame de rasoir ou un rouge à lèvres. De temps en temps, il est intéressant de se rappeler ces bons vieux proverbes «qui vole un œuf, vole un bœuf». Il est faut applaudir la mesure d'un impôt à 15%Arrêtons de croire que payer une partie de ses impôts est suffisant parce que le voisin ne paierait rien. Ce sport national, éluder l'impôt est analysé comme un acte «légitime» et non contraire aux lois divines notamment. Ici, l'exemplarité des autres dirigeants et une communication à travers des témoignages seront des leviers pour faire tomber ce pan de l'informel. Le message doit être clair : «Tout déclarer, c'est un investissement pour demain, pour nos enfants et pour nous». Payer ses impôts ne sera certainement jamais un plaisir, mais pourrait devenir un acte «normal». Partant, il est légitime d'applaudir la mesure qui permet aux nouvelles TPE, dont le chiffre d'affaires est inférieur à 3 millions de DH, d'avoir une taxation réduite de 50% avec un impôt à payer au taux de 15%. Il est intéressant d'aller plus loin dans les incentives, en leur donnant accès à des outils informatiques simples de gestion et en les incitant à intégrer des associations professionnelles ou des associations de chefs d'entreprise, à avoir l'accompagnement de professionnels (experts comptables par exemple) pour transformer le back-office en levier pour le développement du business avec une tarification adaptée. Par ailleurs, il va falloir ne pas exclure ceux et celles qui ont toujours été dans le formel et qui, eu égard à leur métier, resteront des structures humaines avec des CA inférieurs à 3 millions de DH. Cette mesure ne doit pas créer une iniquité. La prime au basculement au formel ne doit pas sanctionner les gens honnêtes. Rappelons que pour être un bon citoyen «musulman», il faudrait d'abord être une locomotive pour ses pairs, ses collaborateurs et pour toutes les autres parties prenantes sur tous les volets, y compris fiscal. ExceptionsCes qualités intrinsèques ne souffrent pas d'exception. Les solutions de progrès existent, il faut juste les cueillir avec l'aide d'une fiscalité adaptée et une culture de changement. La vraie richesse, c'est celle qui est pérenne et acquise en toute légalité. Revenons vers nos jeunes pousses, créées par des jeunes qui n'ont qu'un prénom. Leur force et leur mérite c'est d'avoir refusé la fatalité et le mobilisme. Ils ont cru à la vie, ils nous donnent une leçon d'humilité et de courage. Beaucoup oublient que Facebook a été créé avec un capital de 1.000 $ US par deux copains. Aujourd'hui, il pèse 25 billions de $ US. Moralité, dans un pays où les idées valent leur pesant d'or, où porteurs d'idées et financeurs sont mis ensemble, cela peut être le gros lot. Il est donc impératif, pour permettre à des souris d'être des gazelles et après des éléphants, de les soutenir pour passer ces étapes le plus vite et le plus harmonieusement possible. Sans les business angels, point de salut pour les petites start-up portées par des jeunes sans sou. Le drame, en l'absence d'un mécanisme de ce type, qui permet d'amorcer la pompe bien avant le banquier, le capital-risque et, juste après, la maigre épargne qu'il a pu apporter, le jeune préférera enterrer avant la naissance son «bébé» que de se le voir «emprunter» par d'autres dont le seul capital est le gros sou. L'école n'est, pour certains d'entre eux, qu'une chimère et, très souvent, ils n'ont vu que son enceinte. Nous devons aller à leur rencontre et capitaliser sur leur expérience pour aller, ensemble, des bonnes pratiques vers les futures pratiques. La dernière étude sur la région Mena fait ressortir cette vérité amère selon laquelle 50% de nos jeunes veulent quitter cette région. C'est un signe, on ne peut plus fort, de désespoir et un camouflet pour tous nos décideurs. Ces jeunes sont la note d'espoir et notre avenir. N'ayons pas peur de nous rapprocher d'eux, la seule maladie qu'ils peuvent nous transmettre, c'est leur rage de réussir... leur vie.Couverture socialeEn parallèle de cet accompagnement des business angels, nous devons leur donner le droit à une couverture sociale : Bidaya donne le ton. Pour les entre-deux, le commerçant de la «Jouette» et assimilés confond le fait d'être assujetti au régime fiscal forfaitaire et celui de déclarer des bases nulles en matière de charges et de produits. En effet, un seul discours fait loi, c'est celui de réaliser les opérations en espèces, de supprimer le terme Impôts de son vocabulaire, d'avoir pour seule retraite sa santé et pour seule assurance un grigri. Là aussi, prendre quelques entrepreneurs volontaires qui serviraient de locomotives, les faire adhérer à cette nouvelle taxation à 15% et à une démarche entrepreneuriale où l'homme est le point central, leur rappeler que notre société est en pleine mutation et qu'elle a besoin d'eux pour un développement mieux partagé, où leurs intérêts et ceux de leurs enfants seront préservés. La mise à niveau de l'entrepreneur et de l'entreprise doit d'abord être celle de la très petite entreprise, le cœur de notre tissu socioéconomique des secteurs formel et aussi informel. En outre, il ne faudrait surtout pas, sur ce volet, penser que la petite ou micro-entreprise est une grande entreprise en miniature. Prenons du secteur informel la substance entrepreneuriale et donnons du sens aux projets de nos jeunes et moins jeunes pour leur permettre de s'intégrer volontairement et harmonieusement dans le secteur formel, avec l'appui du business angel pour leur prendre la main et les faire grandir vite dans la transparence.