Rien ne va plus entre les agents eFloussy et leur société mère, Quick Money, spécialiste du transfert d'argent. Les pourparlers en interne n'ayant pas abouti, le mouvement de contestation s'est durci et des décisions radicales sont mises en application. Ainsi, à partir d'aujourd'hui, toutes les agences eFloussy, au nombre de 300, seront fermées au grand public, et ce pour une période indéterminée. Une décision prise à l'unanimité par les membres de l'Association marocaine des agents eFloussy (créée en février 2010). Selon le porte-parole de cette association, Abdeljalil Lahdaya, cette décision a été prise après l'échec des négociations entreprises avec Karim Boukaâ et Karim Rahal, patrons de l'enseigne eFloussy. Pourtant, le projet, lancé en grande pompe fin 2008 était annoncé comme «projet citoyen». «Les négociations avaient commencé fin 2009. Elles avaient pour seul objectif de sauver le projet eFloussy et les 300 jeunes entrepreneurs qui y ont cru», explique-t-il. Crise de liquidité, services insuffisants, problèmes de commercialisation, des banquiers et une société mère qui ne tiennent pas leurs engagements..., les maux des agents eFloussy se suivent et ne se ressemblent pas. Passés sous silence durant plus de six mois, les problèmes de ces agents sont ainsi révélés au grand jour. «Les pourparlers avec les responsables de l'enseigne n'ont abouti à rien. Il fallait donc rompre le silence et réclamer ouvertement nos droits», tonne Abdeljalil Lahdaya. Un communiqué de presse a été publié la semaine dernière et une lettre envoyée au cabinet royal. Par ailleurs, pour faire entendre leur voix, les agents eFloussy comptent organiser une conférence de presse au courant de la semaine. Pour rappel, l'enseigne eFloussy a officiellement été lancée le 13 novembre 2008. Les patrons de Quick Money avaient signé ce jour-là un accord stratégique avec Attijariwafa bank pour financer la mise en place de 2.000 petites agences proposant des services parabancaires (transfert d'argent, encaissement de factures pour tiers -eau, électricité, assurances-...). L'initiative visait la création de 4.000 à 6.000 emplois directs, soit un à deux emplois pour chaque point de vente. Valeur aujourd'hui, seules 300 agences ont été créées, pour commercialiser... un seul et unique service qu'est le transfert d'argent à l'international. Ce qui remet en question la viablité du business modèle. Face à autant d'incertitude, même la banque partenaire a levé le pied. Selon des témoignages d'agents eFloussy, Attijariwafa bank aurait envoyé des mises en demeure aux agents pour non-paiement des traites mensuelles. Déjà en mars dernier les premiers signes de la crise ont commencé à filtrer. À seulement une année du lancement du projet. Des rumeurs circulaient en effet quant à un éventuel déficit en fonds de roulement dont souffrirait l'enseigne de Karim Rahal et Karim Boukaâ. On accusait à l'époque un décalage entre la distribution de l'argent transféré et sa compensation en est la cause. En clair, les sommes distribuées par les agences de la franchise ne sont pas compensées simultanément, créant ainsi un déficit de liquidité. Mais déjà les agents tiraient la sonnette d'alarme quant à l'état financier de la franchise la plus «populaire» du pays. Contacté à l'époque, Karim Rahal avait assuré, sur nos colonnes, qu'eFloussy ne souffrait d'aucun déficit de fonds de roulement. Le patron de la chaîne de restauration du même nom avait catégoriquement réfuté les «soi-disant problèmes de trésorerie» et de «déséquilibres créés par les flux des transferts d'argent». Au contraire, il parlait de perspectives de développement à l'international et soutenait que son associé et lui étaient à la recherche d'un partenaire financier pour les accompagner à l'international, notamment en Europe et en Afrique. Nous avons essayé de relancer les deux associés de l'enseigne, au vu des derniers développements, mais ils sont restés injoignables à l'heure où nous mettions sous presse. En tout cas, il est clair que le bateau eFloussy a pris l'eau. Et les agents grévistes parlent déjà d'une action devant la justice.