Les Echos quotidien : Que symbolise pour vous et pour TFZ l'étape des 10 ans de la zone ? Jamal Mikou : Cette étape symbolise pour nous la réussite du projet, parce que lorsque nous l'avons lancé, on peut, aujourd'hui, dire que l'on connaissait notre objectif qui était de faire une zone industrielle professionnelle et d'y accueillir des investisseurs, mais nous n'étions pas sûrs de notre approche. À l'époque, les actionnaires avaient dit «Ok, on participe...», sur la base du besoin et de la confiance dans les promoteurs du projet. Aujourd'hui, les résultats sont là avec de l'investissement, de l'emploi, des PME et des multinationales et une large gamme de services de qualité. Et surtout, nous avons cinq ans d'avance sur le contrat-programme signé avec l'Etat. Dix ans après le démarrage, qu'estimez-vous avoir réussi de plus notable ? La capacité de l'équipe de TFZ a être très réactive par rapport aux demandes d'installation sur la zone. Nous réagissons vite et nous faisons gagner du temps aux industriels qui envisagent d'investir à Tanger. J'en veux pour preuve une visite effectuée par la direction générale de Delphi pour l'inauguration de leur usine. Le président des pièces détachées pour Delphi a dit dans son discours qu'il n'avait jamais construit une usine aussi rapidement et aussi efficacement ailleurs dans le monde. L'autre fait notable qui coincide avec cet anniversaire, c'est le fait que TFZ vient d'être classée ce mois-ci 8e meilleure zone franche du futur sur 200 zones candidates et sur un total de 25 zones franches classées. Est-ce que vous vous y attendiez ? Non, cela a été une surprise mais nous étions dans la compétition. Peut-on aujourd'hui parler de Tanger Free Zone comme d'une zone industrielle complète ? Oui. Cela a été l'objectif du travail que nous avons accompli au cours de ces dernières années. Cette dernière année, nous avons finalisé toute l'offre : nous avons une très bonne infrastructure routière, une infrastructure télécoms de très haut niveau, nous avons une caserne des sapeurs-pompiers et une clinique. Cela est important et rassurant. Cela est non seulement bien en soi, mais fait aussi baisser les primes d'assurances des investisseurs. Nous avons un hôtel et nous en aurons un autre dans les 24 mois, si tout se passe bien, des restaurants; une vraie vie se met en place et de ce point de vue, nous sommes une zone industrielle complète. Quelle différence y aurait-il pour un industriel à s'installer à TFZ, à Gzénaya ou à Moghogha ? Chez nous, l'avantage évident est que l'investisseur bénéficie du texte de loi sur les zones franches. Ensuite, il y a les services dont nous avons parlé et le guichet unique. Comment voyez-vous la contribution de TFZ et de TMSA plus globalement au projet industriel marocain ? Dès 2006, TMSA est entrée dans le capital de TFZ. Le fait de présenter une offre intégrée est intéressant. Aujourd'hui lorsque nous discutons avec un investisseur, nous pouvons désormais mettre en avant le fait qu'il y a un port moderne, un aéroport, une zone franche et entre tout cela l'autoroute. C'est d'ailleurs l'une des raisons de notre bon classement par le magazine londonien FDI. Il est clair qu'au cours des dernières années la connexion du Maroc avec le reste du monde s'est améliorée, et cela c'est vital dans un monde d'importateurs et d'exportateurs. Vous dirigez TFZ depuis 2003. Quel est le défi de l'industrie marocaine aujourd'hui ? C'est la formation. Nos besoins ont augmenté très vite et la transition est un peu difficile à gérer, mais il faut continuer les efforts et opérer une meilleure allocation des ressources de formation. Le défi, c'est de trouver des gens formés pour des métiers nouveaux. 5.000 hectares de foncier ont été mobilisés pour le développement industriel régional. Pensez-vous que cette réserve sera épuisée et à quelle échéance ? Ce qu'il faut voir à travers ce chiffre de 5.000 hectares, c'est la possibilité qu'il existera toujours un espace de développement pour l'industriel et l'investisseur. L'important dans ce chiffre, c'est la visibilité qu'il donne. Qu'avez-vous prévu pour l'intégration des 15 unités de la zone franche du port de Tanger-Ville ? Nous allons démarrer l'aménagement d'un espace de 10 hectares et dès que les opérateurs de la zone du port et les autorités auront achevé leurs discussions, nous serons prêts à les accueillir. Nous commencerons les travaux à la mi-septembre. Quels sont les projets de TFZ pour les deux à trois années à venir ? Nous avons deux projets importants. Nous allons construire une nouvelle entrée 4 fois plus grande que l'actuelle pour permettre une meilleure fluidité des camions et des minibus de transport du personnel. Du fait que de nombreux équipementiers de Renault seront installés ici, nous voulons que le temps de transport entre TFZ et Melloussa soit réduit au minimum. Le deuxième point c'est de capitaliser sur notre expérience et traiter le dossier des déchets industriels. La question commence à se poser de manière importante et le recyclage des déchets est un métier. Quelle place voyez-vous pour Tanger en tant que pôle industriel et en tant que pôle contributeur à l'industrie marocaine ? Son rôle aujourd'hui est clair. À travers ce que nous voyons, ce que nous lisons et à travers les chiffres, Tanger avec ses infrastructures, se développe et devient incontournable. Elle renforce sa 2e place après Casablanca. Les comparaisons régionales sont importantes, car elles poussent chacun à mieux faire. Cela crée l'émulation. Pour attirer l'investisseur, au-delà du terrain industriel, il y a la qualité de service. La place de Tanger dans le développement industriel, et ceci est un avis personnel, est qu'avec l'infrastructure portuaire et la position géographique de la ville, sera considérable. Qu'est-ce que la crise de ces deux dernières années a révélé comme forces et faiblesses de TFZ et de la capacité d'accueil marocaine de l'investisseur ? Ce qui a incontestablement constitué un plus dans la crise économique de ces deux dernières années, c'est la réaction des autorités qui ont vite su créer un comité de veille et développer encore plus l'écoute des investisseurs et des exportateurs. Aujourd'hui, avec le recul et les remontées d'information que j'ai des investisseurs, mes principaux interlocuteurs au quotidien, je peux dire que la réaction des autorités a permis de sauver des unités et de limiter l'impact de la crise sur le tissu industriel marocain. Le deuxième point, est que l'offre Maroc, pour ceux qui étaient déjà installés, leur a permis de prendre des parts de marché. Nous n'avons pas eu en 2009 de nouveaux investissements, grands ou petits. En revanche, nous avons eu beaucoup d'extension de capacités.