La loi de Finances 2020 a introduit le relèvement de 600.000 DH à 2 MDH du plafond des cotisations exonérées dans le cadre du Plan épargne action (PEA). Cette mesure a été mise en place pour inciter les investisseurs à se positionner sur ce type de produits. Mais en vaut-elle vraiment la peine? Le Plan épargne action (PEA) peut-il faire son grand retour cette année? L'amendement de la loi de Finances 2020 tente de donner une nouvelle impulsion à ce produit créé en 2011. La nouvelle disposition introduit en effet le relèvement de 600.000 DH à 2 MDH du plafond d'exonération des revenus et profits réalisés dans le cadre du PEA. Cet instrument de placement permet, moyennant des cotisations périodiques ou libres, de constituer une épargne à investir dans des actions et des OPCVM actions, tout en bénéficiant, après une période de 5 ans, d'exonérations sur les dividendes et plus-values. À partir de cinq années de détention du PEA, il est possible d'effectuer le retrait total ou partiel de la somme ou des valeurs investies. Un retrait reste exonéré d'impôts. Ce coup de pouce de la DGI réjouit un certain nombre de financiers qui espèrent voir le marché actions renouer avec un certain dynamisme. «Cette mesure arrive à point nommé. Elle s'ajoute à certaines dispositions phares mises en place ces dernières années comme la contribution libératoire, l'amnistie fiscale pour les étrangers ou encore la régularisation fiscale des professions libérales, qui devraient donner un nouveau souffle à la collecte de l'épargne. Cela va par ailleurs profiter au marché actions», relève ce professionnel de la place. Des signes de faiblesse Les incitations en faveur du PEA arrivent donc dans un contexte favorable marqué par la baisse des taux d'intérêt et par l'absence d'alternatives de placement, ce qui permettra d'attirer les personnes physiques douées d'un certain potentiel d'investissements. Pourtant, ce type de produit a longtemps été boudé par les investisseurs. Les plans d'épargne défiscalisés (PEA, PEL, PEE) n'ont pas suscité l'engouement escompté au sein des ménages marocains. L'investissement dans ces instruments demeure dérisoire en comparaison avec le placement dans d'autres produits financiers. Il a montré des signes de faiblesse dès les premiers mois de son lancement. Les plans d'épargne toutes catégories confondues n'ont capté que 30 MDH durant les cinq premiers mois de leur démarrage. Les mois qui ont suivi ne se sont pas révélés plus concluants, puisque six mois plus tard, ils n'ont drainé que 4 MDH. En 2017, ces plans d'épargne défiscalisés ont cumulé un actif d'environ 150 MDH, dont quelques dizaines de millions de dirhams drainés par les PEA. À titre comparatif, l'encours des OPCVM a franchi la barre des 400 MMDH la même année, dont 68 MMDH pour les OPCVM actions. L'encours de l'assurance vie s'est élevé à 77 MMDH. De plus, l'année 2019 a été marquée par un réel essoufflement. Selon les derniers chiffres de Bank Al-Maghrib, l'encours de ces produits défiscalisés à fin mars 2019 s'est limité à 108 MDH, dont 72% sous forme de plan d'épargne éducation. Lors de son lancement déjà, les professionnels du marché jugeaient cet instrument mal adapté aux besoins des épargnants. Le discours reste le même. Le manque de souplesse des plans d'épargne défiscalisés freinerait donc le décollage de l'instrument. Les avantages fiscaux qu'ils offrent sont conditionnés par des durées souvent longues et peu attractifs. En effet, pour bénéficier de l'exonération d'impôts, l'épargnant ne doit pas effectuer de retrait avant cinq ans sous peine de voir son compte PEA fermé. Aussi, «Conserver son épargne en Bourse pendant cinq années, c'est trop long et ce n'est pas intéressant dans l'esprit d'un épargnant», remarque ce gestionnaire de fonds. La réforme de l'économie prioritaire D'autres requêtes ont été émises par certains professionnels de l'épargne, qui espéraient voir ces ces plans d'épargne inscrits dans le même schéma fiscal que les produits de retraite complémentaire, à savoir l'exonération du montant investi à l'entrée. Une doléance qui n'a toujours pas été prise en considération dans les dernières lois de Finances. Pour certains économistes comme Mehdi Fakir, ces dispositions fiscales ne sont pas suffisantes pour intéresser les investisseurs. «Le marché actions a besoin de réelles réformes pour retrouver un certain dynamisme», tranche-t-il, dénonçant la cherté de la place et l'absence de compartiment PME. Pourtant, la Bourse de Casablanca se prépare au lancement d'autres instruments financiers tels que les OPCI et les ETF. Or, pour un autre opérateur de la place, le manque de culture financière impacte négativement la commercialisation de ces produits. «L'épargnant marocain n'a aucune connaissance des produits financiers. Il n'arrive même pas à faire la différence entre les dépôts à vue et les dépôts à terme», remarque-t-il, affirmant que le problème est bien plus profond que les incitations fiscales ou autres. «L'économie marocaine doit être entièrement réformée pour que le consommateur marocain puisse épargner un jour», conclut-il.