L'épineux dossier de la réforme du Code de travail sera bientôt sur la table des négociations avec les partenaires économiques et sociaux. Le bras de fer s'annonce serré. La flexibilité du marché du travail en est la principale pomme de discorde. Le ministre du Travail et de l'insertion professionnelle, Mohamed Amkraz, vient de souligner que le dossier de la réforme du Code de travail sera bientôt négocié avec les acteurs concernés. Ce point était inscrit à l'ordre du jour du précédent round du dialogue social, mais n'a pas encore été discuté avec le patronat et les centrales syndicales. Le gouvernement s'est engagé, à travers l'accord conclu avec les partenaires sociaux et économiques en 2019, à ouvrir les discussions sur ce chantier ainsi que sur la publication du décret relatif aux contrats de travail à durée déterminée et la révision des conditions applicables aux contrats de travail temporaire. La mission du gouvernement, consistant à trouver un terrain d'entente entre les syndicats et le patronat, n'est pas de tout repos. La réforme du Code de travail qu'exige la CGEM est très redoutée par les syndicalistes. Ces derniers continuent d'opposer un niet catégorique à la réforme du Code du travail depuis son annonce dans la déclaration gouvernementale en 2017. Respect de la loi Les partenaires sociaux estiment qu'il faut en premier lieu procéder à l'application des dispositions du Code de travail actuel et lutter contre les violations des droits des salariés. C'est ce que souligne la syndicaliste et parlementaire de la Confédération démocratique du travail Rajae Kessab: "les dispositions de la législation actuelle, malgré leur caractère avancé, ne sont pas appliquées dans plusieurs entreprises formelles et dans le secteur informel qui échappe à tout contrôle". Les syndicalistes se disent conscients des difficultés que rencontrent les entreprises, mais demandent à régler les véritables problèmes comme celui du secteur informel, que l'Etat doit accompagner pour qu'il puisse basculer dans l'économie formelle. Face à la positon des syndicats, le gouvernement va-t-il pouvoir tenir son engagement? Rien n'est moins sûr. La bataille s'annonce rude. Les syndicats n'entendent pas lâcher du lest. De son côté, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), qui appelle depuis des années à cette réforme, compte aller jusqu'au bout de ses revendications. Pour la Confédération, le renforcement de la compétitivité nécessite l'amélioration du climat social au sein des entreprises marocaines par la réglementation du droit de grève et la réforme du Code du travail qui date de plus de 15 ans. Quelques dispositions du code sont pointées du doigt par la CGEM qui les juge incomprises, rigides, sujettes à de multiples interprétations et provoquent de nombreux litiges et conflits sociaux. En tête des doléances du patronat figure la mise en place «d'une flexibilité responsable» au sein du marché du travail au service de la compétitivité et de l'emploi, en phase avec les nouveaux enjeux de l'économie marocaine et les attentes des opérateurs économiques, à travers nombre de mesures: contrats à temps partiel, nouveau cadre-juridique pour le télétravail, suppression des cumuls des indemnités en cas de licenciement abusif, révision de la durée de l'intérim qu'il faudra ramener à au moins six mois renouvelables deux fois… Les syndicats critiquent vertement les propositions du patronat qui ne datent pas d'hier, estimant que la flexibilité du travail risque de précariser la situation des salariés. Augmenter l'emploi formel Les opérateurs économiques n'hésitent pas à invoquer la recommandation de la Banque mondiale de réviser le Code du travail. Cette institution internationale plaide pour une plus grande flexibilité du marché du travail afin de permettre d'augmenter l'emploi, notamment formel, des jeunes et des femmes et de réduire le chômage tout en préservant les salaires. Les prochains mois s'annoncent décisifs en ce qui concerne cette réforme, décriée par les syndicats, mais aussi d'autres dossiers brûlants comme le projet de loi organique sur la grève, qui constitue la pomme de discorde entre le gouvernement et les partenaires sociaux. Impossible d'entamer les négociations sur le Code du travail avant de se mettre d'accord sur le projet de loi organique sur la grève. Un dossier aussi épineux que celui de l'adoption d'une réglementation de l'échiquier syndical.